Ma foi: un Cameroun à remettre à neuf

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Les Bonnes feuilles Depuis plusieurs années, je réfléchis sur ce que nous sommes. Une nation ? L’interrogation semble inopportune, mais elle vaut pour moi la peine d’être posée. Il est évident qu’il faille répondre à cette question. Et pour y répondre, ma réflexion a été nourrie pendant toutes ces années par l’enseignement de l’Église. Comme cet enseignement est riche ! Malheureusement nous sommes toujours sourds pour ne pas écouter et aveugles pour ne pas voir. Dans cet ouvrage, je voudrais avec tout l’amour de mon cœur pour notre peuple, pour notre pays, aider mes compatriotes à prendre conscience du terrible danger que courent les cœurs endurcis. A observer la vie politique et sociale au Cameroun depuis plusieurs décennies, on a l’impression de tourner en rond, de faire du « sur place ». Le résultat de tout cela est ce sentiment d’indifférence et de défaitisme qui habite les cœurs des Camerounais, surtout la jeunesse. La politique ne leur dit plus rien, ils n’y croient plus. En effet, le jeu politique est devenu, pour la plupart de nos compatriotes synonyme de mensonge, mais avant tout voie de réussite facile, joncher alors de stratégies de détournements du denier public et du vol (dans l’impunité !). Oui, le peuple camerounais est désabusé. Pourtant,  comme le souligne Hannah Arendt, cette « cité […] fondamentalement périssable, sa survie dépend de nous ! ».
Alors sommes-nous entrés dans une période d’unanimisme politique ? Sans doute pas.
D’abord parce que l’indifférence que nos compatriotes affichent lors des scrutins électoraux et leur grande abstention semblent traduire une profonde insatisfaction vis-à-vis des attentes des politiques. C’est un désaveu qu’il nous faut prendre en réelle considération pour re-partir de nouveau.
Ensuite, il m’a été donné de constater que les scrutins qui, malheureusement, se suivent et se ressemblent toujours. Et toujours les mêmes récriminations : fraudes massives, tripatouillages qui ne font même plus honte au parti au pouvoir, puisqu’ils sont toujours les vainqueurs. Le parti s’y complaît. C’est sa vie. C’est sa stratégie. Et cela, malgré les courants divers qui traversent depuis « les gouvernements d’ouverture nationale » ce qu’on appelle à souhait, la majorité politique de notre pays.
Mais, il est fort probable que le Cameroun rentre dans une période où les démarcations entre partis politiques soient à nouveau renforcées, permettant aux Camerounais de distinguer chaque idéal politique pour se prononcer  avec toute objectivité. Un véritable espace de débat politique doit donc s’ouvrir. Non pas qu’il n’en existe pas, mais que chacun des politiques pense d’abord à la nation avant son bien-être particulier. Et par cet ouvrage, je voudrais y apporter ma modeste contribution.
Je ne suis pas un politique, je n’espère pas l’être par respect de ma vocation de prêtre.
Si les principes sur lesquels notre « vivre ensemble » se construit ont été largement éprouvés par les abstentions massives aux élections, nul doute qu’il reste à bâtir ce « vivre ensemble », autrement et maintenant. Quelles que soient les responsabilités exercées, l’enjeu est d’importance. Parler de « débat politique », suppose qu’on reconnaisse la pluralité des engagements, la confrontation des idées, etc.
Délicate question au sein de la communauté où les chrétiens et tous les autres croyants sont majoritaires.
Alors quoi ? Que faisons-nous de notre foi ?
Le lecteur voudra bien m’excuser du nombre considérable de citations de textes du magistère de l’Église évoqués dans ce livre. Je le fais à dessein parce que je me suis rendu compte, tout au long de mon ministère pastoral, que l’ignorance de l’Enseignement social et doctrinal de l’Église est fatale pour les chrétiens catholiques. Quand ils entendent ou lisent certaines affirmations, les moins informés tirent la conclusion hâtive que cela sort de la tête de l’auteur pour les importuner ; pourtant ces choses existent pour les instruire et les former. Qui sait, peut-être en lisant ce livre, quelques-uns y trouveront ce qu’ils n’ont jamais eu l’occasion de découvrir par eux-mêmes. L’Église est riche et vieille de plus de deux millénaires ; puiser dans son expérience séculaire est une véritable école de sagesse.
Je suis débiteur de nombreuses personnes qui m’ont aidé de leurs conseils et critiques, ont enrichi mon travail en apportant des informations enrichissantes, ou ont saisi mes textes manuscrits. Je me garde de mentionner leurs noms, non par ingratitude, mais pour des raisons évidentes et afin d’éviter toute catégorisation. Qui sait, peut-être en lisant ce livre, dont j’assume seul les forces et les faiblesses, quelques-unes y trouveront ce qu’ils n’ont jamais eu l’occasion de découvrir par eux-mêmes.
Christian Cardinal Tumi, Ma foi: un Cameroun à remettre à neuf, Douala, Véritas, Chapitre 2 pp.15-18.

La communauté politique et la société civile
La communauté politique et la société civile sont deux réalités « réciproquement reliées et interdépendantes, ne sont pas égales dans la hiérarchie des fins. La communauté politique est essentiellement au service de la société civile et, en dernière analyse des personnes et des groupes qui la composent(1) ».
On ne peut donc considérer la société civile que « comme un appendice ou une variable de la communauté politique : au contraire, elle a la prééminence, car c’est dans la société civile même que l’existence de la communauté politique trouve sa justification(2) », une sorte de raison d’être.
Il n’est point besoin de focaliser l’attention sur la définition de l’expression société civile(3), même s’il faut toujours afin d’éviter amalgame et confusion, donner un sens aux termes, expressions et « thèmes qui ont été fabriqués à un moment particulier de l’histoire(4) ».
L’expression « société civile » est d’usage très répandu : « Elle est un des termes d’une grande fréquence dans le lexique et le code des transactions entre des individus, des associations, des organisations non gouvernementales nationales, des gouvernements, avec des institutions multilatérales, les agences de la coopération internationale(5) ».
Il va sans dire que la société civile est « un lieu de conflit entre des intérêts divergents, avec le risque que le plus fort prévale sur le plus faible. » C’est pourquoi l’État a l’obligation de « fournir un cadre juridique adapté au libre exercice des activités des sujets sociaux et doit être prêt à intervenir, lorsque c’est nécessaire et en respectant le principe de subsidiarité, pour  orienter vers le bien commun la dialectique entre les libres associations actives dans la vie démocratique(6) ».

1- La place des minorités dans une nation comme le Cameroun

« À chaque peuple correspond en général une nation, mais, pour diverses raisons, les frontières nationales ne coïncident pas toujours avec les frontières ethniques(7 )».
Notre nation a cette particularité de compter plus d’une centaine de groupes ethniques. Situation anthropologique qui met au goût du jour la question des minorités marginalisées. S’il est vrai que notre nation est composée essentiellement de groupes minoritaires, il me semble que le plus grand groupe minoritaire qui embarrasse nos dirigeants, tous régimes confondus, c’est la minorité anglophone. En effet, le Cameroun est composé officiellement de deux grands groupes : le groupe francophone largement majoritaire de la population et le groupe anglophone minoritaire, qui, me semble-t-il, doit jouir des « droits et devoirs spécifiques(8) ».

2- Les droits et les devoirs d’un groupe minoritaire

Tout groupe minoritaire a droit à sa propre existence. Mais ce droit « peut être méconnu de diverses manières, jusqu’aux cas extrêmes où des formes ouvertes ou indirectes de génocide le réduisent à néant(9) ».
L’Église renchérit en effet : « En outre, les minorités ont le droit de conserver leur culture, y compris leur langue […] Dans la légitime revendication de leurs droits, les minorités peuvent être poussées à rechercher une plus grande autonomie ou même leur indépendance : dans ces circonstances délicates, le dialogue et la négociation sont le chemin pour parvenir à la paix. Dans tous les cas, le recours au terrorisme est injustifiable et nuirait à la cause que l’on veut défendre(10) ».
Le groupe minoritaire au sein d’une nation a également des devoirs à remplir. Et le premier de ces devoirs, c’est « la coopération au bien commun de l’État où [ces groupes minoritaires] sont insérées. En particulier, un groupe minoritaire a le devoir de promouvoir la liberté et la dignité de chacun de ses membres et de respecter les choix de chaque individu, même si l’un d’entre eux décidait de passer à la culture majoritaire(11) ».

3- La minorité anglophone au Cameroun

Il est évident qu’au Cameroun le groupe anglophone « occupe une position qui est inférieure géographiquement, inférieure démographiquement, inférieure politiquement, inférieure dans ses ressources(12) ».

3-1- Les conséquences de l’inégalité entre les deux cultures

À cause de la faiblesse de la culture anglo-saxonne, le pouvoir d’inaugurer une politique, de façonner le cours des évènements en matière politique, économique, sociale et culturelle, reste en fait, « entièrement entre les mains des Camerounais de culture française(13) ».
L’inégalité entre les deux cultures fait en sorte que le Cameroun anglophone, communauté politique minoritaire, « à la table de conférence ne [peut] parler avec la même autorité et dignité(14) » que le Cameroun francophone, très influencé par la  forte présence physique de la France. On peut se rappeler ce qui s’est passé à la conférence de Foumban en 1961. Pour la France, dit-on, un Camerounais d’expression anglaise ne doit jamais devenir le Président de ce pays. [...]
Je n’oublierai jamais ce jour dont j’ignore à regret la date. Nous étions invités, d’autres évêques d’Afrique francophone et moi, à l’Ambassade de France auprès du Saint-Siège. Nous étions à Rome pour un des Synodes ordinaires des évêques. Un fonctionnaire de l’Ambassade m’approcha et voulut savoir de quelle nationalité j’étais. Ma réponse fut claire : je suis Camerounais de souche. Sans le moindre soupçon de sa part que je pourrais être un Camerounais anglophone, il me dit : nous (la France bien sûr) sommes contents que vous soyez en train de réussir l’assimilation culturelle des anglophones. Le diplomate essaya en vain de cacher son embarras, quand je lui fis savoir que j’étais du Cameroun anglophone. À partir de cette rencontre fortuite,  j’ai su quelle était et quelle est encore la politique culturelle française au Cameroun : faire disparaître du Cameroun la culture anglo-saxonne de la minorité anglophone.
On comprend pourquoi, depuis la Réunification, plusieurs pratiques et institutions sont venues du Cameroun francophone au Cameroun anglophone où, comme le faisait remarquer Bernard Fonlon : « on conduit sa voiture maintenant à droite, le franc a remplacé la livre comme monnaie courante, l’année scolaire a été alignée sur celle du Cameroun francophone et le système métrique scientifique a remplacé les mesures britanniques. Mais en vain ai-je cherché une seule institution ramenée du Cameroun anglophone au Cameroun francophone. L’influence du Cameroun anglophone est pratiquement nulle(15)  » sur l’ensemble du territoire national. Sauf ce qui vient de se faire 46 ans après la réunification des deux Cameroun : l’harmonisation du Code de Procédure pénale est venue mettre un terme à la dichotomie entre le système de la Common Law applicable dans la partie anglophone et celui en vigueur dans la partie francophone du pays, une pratique longtemps décriée par toute la communauté judiciaire du Cameroun(16).
La politique française d’assimilation du Cameroun anglophone pour faire disparaître la culture anglo-saxonne, grâce aux « vastes intérêts économiques français, et grâce à la présence physique » des Français au Cameroun, « est très forte et s’accroît encore(17) ».
On a l’impression que l’autorité politique du pays, encore sous une très grande domination de la France, fait tout pour rendre inefficace l’unité culturelle et même géographique qui existe entre les deux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. La route qui relie les deux régions est la plus négligée de la République ; peut-être veut-on empêcher le brassage des populations de ces deux provinces. Il faut construire la route Buea-Kumba-Mamfé-Bamenda. Afin de me faire comprendre, je donne un exemple simple: pour aller de Buea à Bamenda, on est obligé de traverser toutes les régions du Littoral et de l’Ouest pour des raisons évidentes. [...]
Et comme le souligne Karl Rahner : « il est clair que si nous laissons les choses au hasard et que  la volonté et le choix positifs de nos dirigeants n’interviennent pas, il y a peu d’espoir que quelques coutumes et institutions britanniques survivent dans notre système culturel à venir(18) ».
Ce serait sûrement une très grande perte culturelle pour la minorité anglophone, surtout pour les jeunes anglophones qui ne connaissent pas un autre courant culturel. Il est difficile d’imaginer un homme sans culture. « En tant qu’être personnel incarné (ayant besoin de son existence corporelle et de celle du monde ambiant pour s’objectiver) qui doit sans cesse se réaliser librement, l’homme ne peut jamais être sans culture […] C’est par sa culture authentique, c’est-à-dire conforme à sa nature [humaine] et à celle du monde ouvert au mystère et aux desseins de Dieu, que l’homme est vraiment naturel(19) ».

3-2-La minorité anglo-saxonne au Cameroun doit être protégée

L’accord de Foumban de 1961 n’a jamais prévu une assimilation, une dilution, ou une disparition pure et simple de la personnalité de la partie anglophone du pays. Il est clair qu’Ahmadou Ahidjo, jouant sur la force et usant des pouvoirs absolus et exceptionnels de l’époque, a fait disparaître ses partenaires de Foumban, en leur imposant une évolution contraire à leurs aspirations.
Un analyste politique décrivant cette situation avec perspicacité a écrit : « Ce que nous disons n’est pas une révélation originale, et ne devrait donc susciter ni passions ni consternations. Nous le savons tous, et l’avons supporté, dans le contexte d’un pays dirigé d’une main de fer. En 1972, les citoyens n’avaient pas la liberté de parole, le droit de vote, la liberté d’être citoyens au sens effectif du terme. On ne peut donc pas donner à la date du 20 mai une autre signification que malheureuse. [...]Tous estiment être comprimés, marginalisés, et trompés au change. Nous n’avons pas le droit de coller à un peuple les résultats d’un référendum organisé par une dictature sanguinaire(20) ».
Les ennuis quotidiens du premier ministre (anglophone) sur certains dossiers, le manque de respect répété, chronique et ouvert dont il est l’objet de la part de certains membres du gouvernement, aggravent une situation déjà forte embarrassante. Il en est par exemple ainsi du dossier du point d’achèvement, notamment en ce qui concerne les retombées. On peut citer bien d’autres, à l’instar de celui du barrage en cours de montage. Le premier ministre est absent de tout le processus et de toutes les discussions, écarté au profit d’un ministre des Finances omnipotent et omniscient. Achidi Achu, tout comme son successeur Musonge, en sait long sur ce que vaut effectivement un premier ministre anglophone. « Dans ces conditions, le bilinguisme tant vanté est un leurre au sens complet. La quasi-totalité des documents officiels sont libellés uniquement en français, de même que les inscriptions et indications d’information dans les services publics(21) ».
Pour protéger la minorité anglophone au Cameroun, nous devons avoir ce que j’appellerais le courage politique, lequel nous aiderait à « admettre soigneusement leurs éléments constitutifs dans le but de les synthétiser en un système nouveau, riche, harmonisé et dynamique(22) ».
[...] Notre but serait de créer une culture nouvelle à partir des meilleurs éléments de toutes celles dont nous avons hérité de la francophonie et de l’anglophonie. Comment y parvenir ? « Trois opérations seront nécessaires : d’abord, un examen perspicace, objectif et scientifique, des principes constitutifs des cultures en question ; ensuite un choix logique, décisif et sans passion ; enfin, une exécution judicieuse et énergique des modalités de ce choix(23)». [...]
Le Docteur Bernard Fonlon, dont je me suis inspiré jusqu’à présent, enseignant très admiré par la jeunesse universitaire de son temps, nous donne une réponse à cette question : « D’abord, on choisit en général les éléments authentiques, bons et beaux en eux-mêmes ; parmi ces derniers, on préférera celui qui satisfait aux besoins spécifiques par nous-mêmes éprouvés et qui comble certaine[s] lacune[s] de notre vie culturelle.(24) »
En homme bien averti, l’enseignant souligne que la nouvelle culture à créer pour les deux Cameroun, s’ils veulent continuer à exister comme une nation, doit être camerounaise : « Le premier principe que nous ne devons jamais perdre de vue est que cette culture à créer à partir d’éléments si différents quant à leur origine, doit être camerounaise en son essence; le sol d’où elle jaillit, d’où elle tire sa nourriture doit être camerounais ; le Camerounais doit être le tronc sur lequel seront greffés les emprunts franco-britanniques,  si bien que la sève qui parcourt son organisme des racines aux fleurs et qui donne la vie à l’unité de l’ensemble soit camerounaise.(25)»
Pour que ce projet devienne une réalité, « deux choses sont absolument nécessaires : d’abord, les valeurs [camerounaises] devraient être étudiées à nouveau, purifiées, réhabilitées et chargées d’un nouveau dynamisme ; deuxièmement, il est d’une importance primordiale que ce renouveau camerounais, autant que possible, que l’examen et le choix des éléments étrangers à y greffer soient faits par des Camerounais(26) ».
Pratiquement, qu’est-ce qu’on doit faire ? Je me permets encore de citer longuement Bernard Fonlon pour la pertinence de ses arguments : « En règle générale, partout où on crée, adopte et adapte une institution culturelle d’importance nationale, aucune intervention étrangère ne devrait s’ingérer avant que les cerveaux camerounais n’aient eux-mêmes épuisé le problème.
« Du stade de la conception à celui de la réalisation, une politique normale suit les étapes suivantes : d’abord, quelqu’un conçoit, ensuite on examine, délibère et élabore, puis on adopte et finalement on applique.
« Au stade de conception, de délibération et de choix, les Camerounais ne doivent jamais chercher du secours avant qu’ils ne soient certains, d’une façon indubitable, que le problème est au-dessus de leurs capacités. Bien sûr, le manque de cadres qualifiés et d’honnêteté intellectuelle rend absolument nécessaire l’obligation de s’appuyer sur le technocrate étranger.
« Pourtant à moins qu’il ne puisse en être autrement, il ne faudrait inviter l’étranger qu’au stade de l’application et de l’exécution, et même là, son travail devrait être l’objet d’une soigneuse surveillance.
« En règle générale, à n’importe quel stade, avant d’employer l’aide d’un étranger, il faudrait être certain que ce dernier est vraiment spécialiste dans le domaine en question. Bien plus, et ceci est d’une importance capitale, il faudrait être certain que c’est bien un homme qui ne viole ni sa parole ni ses engagements, un homme dont la sincérité est indiscutable(27) ».
Dans ce dialogue culturel entre le francophone et l’anglophone au Cameroun, « le principe de l’égale participation » doit être scrupuleusement respecté. L’inégalité « en superficie, population et puissance » entre les deux parties du pays est manifeste. « C’est pourquoi la faiblesse de l’influence anglo-saxonne dans cette république, conséquence de cette infériorité multiforme, en est le résultat parfaitement naturel. Il serait donc naïf pour un anglophone de s’en plaindre. Pourtant, un homme digne de ce nom ne perd pas ses droits à cause de la petitesse de sa taille.28 » de ce fait, un bébé né aujourd’hui a exactement les mêmes droits fondamentaux qu’un centenaire.
Autrement dit, je crois que nos deux cultures officielles « doivent être placées sur un même pied d’égalité ». Et il est à noter que  « sans adjectif qualificatif », notre constitution stipule « que l’anglais et le français sont [nos] langues officielles(29( ». C’est pourquoi je suis d’accord avec le Docteur Fonlon qu’à chacune de ces deux cultures on devrait donner une chance égale de participation effective au développement culturel de ce pays. Aucune culture au monde n’est supérieure à une autre, de même qu’aucun être humain n’est supérieur à un autre.
Le Cameroun nouveau dont je rêve, c’est un Cameroun qui doit se convertir, se perfectionner, se transformer en profondeur. Un pays prêt à acquérir de nouvelles façons de vivre et d’agir. Bref, un pays qui doit être le contraire de ce qu’il était hier. Se convertir, c’est éliminer de sa manière de faire tout ce qui est négatif.
Christian Cardinal Tumi, Ma foi: un Cameroun à remettre à neuf, Chapitre 2, Douala, Véritas,   pp.29-39. Pour les références, cf. ouvrage