Un double enjeu pour un double scrutin. leurs conséquences collatérales !!!

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Les lampions viennent de s’éteindre sur le double scrutin législatif et municipal du 30 Septembre. Place désormais aux résultats et à leur analyse. (1)
Avec un taux de participation qui flirte les 75 %, ce double scrutin aura réveillé la population et les acteurs politiques avec un double enjeu dont les conséquences visibles n’apparaissent que timidement pour l’heure.

Une crédibilisation du processus électoral et de l’organe en charge de superviser celui-ci, Elecam
L’un des enjeux de ce double scrutin résidait dans la conduite impartiale du processus électoral par l’organe en charge de celui-ci ELecam d’une part et la transparence des opérations d’autre part. (2)
Lesté par un péché originel, celui de l’appartenance de la majorité de ses membres au parti au pouvoir, le RDPC,  un fichier électoral obsolète, ajouté à son inexpérience et la conduite insatisfaisante de la dernière élection présidentielle de 2011, Elecam ne partait pas, dans ce qui pouvait être considérée comme la « Mère de toutes ses batailles » avec des atouts pour atteindre des résultats à la hauteur de l’espoir placé en lui aussi bien par les Camerounais que les observateurs internationaux.
Dans l’ensemble les élections semblent avoir été conduites dans le calme, la sérénité. Tout le monde s’accorde à dire que l’organe, qui expérimentait pour la première fois la biométrie, a réalisé de nombreux progrès. Mais ceux-ci ont-ils gommé les irrégularités les plus criardes ?
De nombreux recours (une quarantaine) ont été introduits auprès de la Cour suprême, officiant comme Conseil constitutionnel. Fait inédit, ces recours proviennent de tous les partis y compris du RDPC. (3)
Si ces irrégularités sont confirmées, la Cour suprême dira-t-elle le droit et uniquement le droit ? Par ses décisions, renforcera-t-elle ou amoindrira-t-elle au contraire la crédibilité de notre processus électoral en pleine gestation et appelé déjà par de nombreux acteurs à connaître d’autres améliorations ?
En effet, le rapport dressé par la conférence épiscopale jette un voile sur quelques-unes de ces améliorations entre autres l’introduction du calendrier électoral dans le code électoral afin que les dates d’élections soient connues à l’avance par tous les acteurs. (4)

Une réconciliation de la famille politique originelle au pouvoir pour une transition apaisée
L’irruption comme un ouragan de la fille cadette de l’ancien Président Ahmadou Ahidjo, Mme Aminatou, sur la scène politique camerounaise, a surpris plus d’un. En attendant de mesurer l’ampleur des bienfaits et dégâts collatéraux dans la majorité, celle-ci a suscité plus de remous passionnés que d’analyses poussées. Entre encres noires utilisées par ceux qui affectionnent les faces hideuses et boueuses de la politique et l’encre blanche, si tant est qu’il en existe une, pour les adeptes de l’angélisme politique ou de la propagande plate, très peu d’observateurs politiques avertis encore moins le commun des Camerounais auront pris suffisamment le temps de scruter et analyser ses gestes, faits et discours.(5)
Au-delà du choix du moment de son apparition, préparé sans doute de longue date, il apparait une constante, celle de la volonté manifeste du Chef de l’Etat, dès sa prise de fonction, symbolisée dans son discours d’investiture de 1982, d’assurer le « Changement dans la continuité ». Dans son esprit, sans avoir la prétention d’être un des exégètes les mieux placés de sa pensée, il ne s’agissait point d’une volonté de rupture avec un système et une famille politique auxquels il appartient et n’entendait point quitter. Les soubresauts liés à la transition dont le point culminant fut la tentative avortée du coup d’Etat d’Avril 1984, n’auront été qu’un long et douloureux déchirement au sein d’une famille comme on en trouve partout. Loin de nos chimères, il n’y a jamais eu jusqu’à l’heure au Cameroun, deux systèmes politiques et deux Présidents mais plutôt un même système politique avec deux présidents successifs autrement dit deux faces d’une même pièce dont l’heure de la réconciliation est enfin arrivée pour préparer une transition apaisée au moment où les facteurs tant endogènes qu’exogènes nécessitent union, solidarité, loyauté, renouvellement etc …
Qui mieux que la Fille cadette d’Ahmadou Ahidjo pouvait servir de « monnaie » pour amorcer cette réconciliation et au-delà servir de passerelle voire de passage de témoin entre l’ancienne génération, les « Founding father » de l’UC, l’UNC, leur excroissance le RDPC et l’actuelle génération pour affronter les futures batailles politiques à venir ? Qui mieux qu’elle pouvait permettre au Président de solder le passé et le passif au sein de leur famille politique commune ? Qui mieux qu’elle pouvait assumer l’héritage politique de l’ancien Président ? Entre l’ancienne première dame qui peut difficilement se départir de sa posture mais ne peut non plus s’opposer à l’engagement de sa fille, majeure de surcroit et un frère et une sœur transparents, Mme Aminatou apparait comme une réponse à plusieurs problématiques politiques dont le retour de la dépouille de l’ancien Président Ahmadou Ahidjo fait partie.
Et s’il ne s’agissait que de cela, on n’aurait pas eu autant de personnes notamment politiques dans la majorité présidentielle pour gloser négativement sur son adhésion au RDPC. Loin s’en faut. Les critiques les plus acerbes sont venues d’ailleurs de ceux qui se réclament « héritiers présomptifs » ou « légataires testamentaires » de son père et qui en ont fait depuis leurs fonds de commerce politique. Peut-on s’étonner encore des tirs croisés contre celle qui pourrait scier la branche sur laquelle s’est bâtie leur « fortune » politique ?
Avec un discours qui rappelle, même dans les intonations, celui de son géniteur, marqué du sceau de la paix, réconciliation, de la concorde, comme jadis après les périodes du maquis, Mme Aminatou fut l’une des rares personnalités, en dehors du Secrétaire National du RDPC, Jean Nkueté, à avoir effectué une campagne nationale. Signe des temps.
Après l’aire géographique où l’on s’attendait à la voir s’y confiner en sapeur-pompier, elle a déroulé un discours dont la portée politique dépasse sa seule personne tout en ouvrant d’autres perspectives et destins, à Douala, Bafia et pour terminer dans la capitale politique du pays, Yaoundé. Quel autre signe avant-coureur !!!
Toutes choses qui pourraient accentuer une décomposition – recomposition du paysage politique que nous annoncions depuis quelques années (6) et qui a commencé avant ce double scrutin, au sein du RDPC avec les investitures.

Avec comme conséquence majeure la décomposition – recomposition du paysage politique camerounais
La nouvelle carte politique du Cameroun à la sortie de ce double scrutin législatif et municipal nous enseigne plusieurs choses :
Les investitures au sein du parti au pouvoir ont permis de faire un premier écrémage volontaire. La désignation de l’exécutif dans les municipalités pourrait également réserver des surprises. Alors que l’on s’attendait par exemple à la désignation du Président du Sénat dans une short List que l’imagerie populaire avait dressée, la surprise fut de taille. L’exécutif municipal pourrait sortir d’un chapeau des listes malgré l’ordre préétabli consacrant un troisième écrémage après le deuxième issu des élections. Un acteur et fin politique, après sa victoire dans un fief considéré imprenable, a dit à ses camarades qu’il était urgent d’attendre les directives de la plus haute hiérarchie pour désigner l’exécutif.
En dépit des poches de résistance, par endroit, à la transparence voulue du système électoral (irrégularités, achat de consciences, etc.), les partis ont battu campagne, ont délaissé les grands meetings avec orgies alimentaires et beuveries pour faire le « Door To Door », pour convaincre les sceptiques. A l’arrivée nous avons assisté, malgré l’ancrage du RDPC dans ses fiefs du Sud, Centre et Est, au retour de l’UPC, considérée ces derniers temps comme moribonde, en coma politique avancé, à l’émergence des partis comme le M.R.C, l’UMS et l’UFP (7).
En diabolisant maladroitement le leader du MRC, le professeur Maurice Kamto, ses adversaires du RDPC lui ont permis de créer une enclave dans son chantre du Mfoundi, balayant ainsi l’idée qu’il faille absolument se présenter dans sa région ethnique. Le « Tout sauf Kamto » qui nous rappelle d’ailleurs le « Biya must go », ajouté au discours de celui-ci, a sans doute favorisé l’éclosion de ce « poucet » de la politique camerounaise avec qui il faudra certainement compter dans l’avenir. (8)
Les enseignements que tirera le chef de l’Etat, après avoir eu entre ses mains, les éléments pour jauger le poids politique réel de chaque parti de la majorité, celui des acteurs politiques de cette majorité, pourraient lui donner l’occasion d’impulser, à travers la formation d’un nouveau gouvernement fortement chamboulé, une nouvelle dynamique au projet, qui est le sien, de voir le Cameroun émergent à l’horizon 2035.
L’avenir politique du Cameroun, à compter d’aujourd’hui jusqu’à l’année butoir de 2018 n’est pas complètement balisé mais force est de reconnaître que, pendant que la majorité des Camerounais ont les yeux rivés sur le nombre de députés ou communes engrangés par le parti au pouvoir et dont l’hégémonie n’était point menacée outre mesure d’ailleurs, d’autres s’inscrivent dans l’histoire pour lever des hypothèques afin de préparer la transition la mieux disante. (9) & (10) & (10 Bis)
@ Adrien Macaire Lemdja
 (1)  http://www.cameroon-info.net/img/news/cm_legislatives_2013_tableau_le_messager_001.pdf
(2) http://www.cameroon-info.net/stories/0,52735,@,cameroun-elections-enjeux-politiques-du-deroulement-quand-paul-biya-joue-la-tran.html
(3) http://www.cameroon-info.net/stories/0,52849,@,cameroun-contentieux-des-legislatives-une-quarantaine-de-recours-introduits.html
(4) http://www.cameroon-info.net/stories/0,52714,@,cameroun-apres-les-elections-couplees-la-conference-episcopale-contre-tout-tripa.html
(5) http://www.cameroon-info.net/pagesp.php?spid=132
(6), (7) et (8) http://njanguipress.com/analyse-pol/et-si-le-cameroun-changeait-demain
(9) http://www.camer.be/index1.php?art=14709&rub=30:27
(10) http://www.journalducameroun.com/article.php?aid=8749
(10 Bis) http://www.journalducameroun.com/article.php?aid=8757