Guerandi Mbara Goulongo: Lettre au peuple Béti du Cameroun

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Mes Sœurs et Frères,
Le 05 octobre 2012, le Tribunal de grande instance du Mfoundi à Yaoundé condamnait Titus Edzoa et Thierry Michel Atangana à 20 ans de prison ferme pour détournement et tentative de détournement de fonds publics. Il y a déjà 15 ans, ces deux compatriotes étaient condamnés pour les mêmes raisons, à 15 ans de prison ferme. Si on doit punir des criminels dans une société, encore faudrait-il que cela se fasse dans la justice et l’équité. Dans le cas de notre pays, les réactions sont unanimes à travers le monde : c’est de l’acharnement sur les accusés.
On se souvient alors, à la suite de Titus Edzoa et Thierry Atangana, que Jean Marie Atangana Mebara (condamné à 15 ans), Urbain Olanguena Awono, Polycarpe Abah Abah, etc. subissent des tracasseries depuis des années, voyant leurs droits bafoués à chaque procès. Ces personnalités, membres à part entière du régime de Paul Barthélémy Biya, sont issues, comme une autre  dizaine de prisonniers célèbres, de son régime défaillant ; ces personnalités embrigadées et torturées appartiennent pour la plupart au groupe ethnique Béti.
Après les avoir utilisées pour sa survie politique et envoyées au front de la prévarication et de la concussion, voici que le recéleur en chef les liquide un à un comme dans toute bande de crimes organisés. Certains sont en prison depuis plus d’une décennie et pourtant le pays se porte plus mal encore, la corruption nargue toujours les pauvres populations du Cameroun, qu’elles soient Beti, Sawa, Bamiléké, Fulbé, Tpuri, Baya, Bakweri, Maka  ou Kotoko, etc. Notre propos n’est pas un soutien aux criminels qui pillent les biens publics, mais plutôt un appel au respect de la dignité humaine.
Et que dire des Patriotes Bétis qui sont embastillés pour s’être opposés au Prince dans le fief Bulu comme Enoh Meyomessé qui croupit à la prison de Nkondengui ? Que penser de l’exil forcé de Ndzana Sémé pour avoir refusé de cautionner l’autocratie de Yaoundé?
Votre place dans le combat patriotique
Depuis l’avènement du multipartisme au Cameroun, Paul Barthélémy Biya, incapable de participer au débat contradictoire, impotent et sans inspiration, distille un vilain message tribaliste et fasciste au sein du peuple Béti : « J’incarne votre pouvoir, si je tombe, vous allez en souffrir ». Malheureusement, certaines ¨créatures¨ de son administration, issues d’autres groupes ethniques du pays se laissent aller à ce jeu (cf. Amadou Ali in Wikileaks) et tentent de stigmatiser le peuple Béti.
L’iniquité de la justice de Paul Barthélémy Biya à travers sa fameuse Opération Epervier (qui, de toute évidence, torture plus ¨ses fabrications¨ Béti que les autres) doit nous ramener à la raison. Le monstre au pouvoir détruit tout sur son passage. Pour son pouvoir personnel, transformé en autocratie cruelle.
Aujourd’hui, face à une déchéance inéluctable, Paul Barthélémy Biya et ses thuriféraires du RDPC, parti-Etat, veulent faire de la région du Sud, une zone inexpugnable face à tout sursaut patriotique du Peuple camerounais. Ces ennemis du Cameroun veulent faire des Bétis un bouclier humain !!!  Observons de près tout l’arsenal et le dispositif sécuritaires et militaires enfouis dans cette partie du pays.
Ne soyons donc pas étonnés par la stigmatisation d’autres composantes de notre Nation, à l’instar des Bamilékés. J’ai déjà eu à proclamer que chaque grand Peuple dans ce monde a ses Bamilékés, c’est-à-dire ses locomotives. Paul Barthélémy Biya et ses fascistes du RDPC n’ont plus que l’ethnicisme comme mode de gouvernance. Le futur noyau extrémiste, voire fasciste, en construction  autour du fils de Mvomeka’a, achèvera très bientôt de convaincre les Camerounais de sa volonté d’installer notre Patrie dans un chaos planifié.
Devrait-on rappeler que dans la lutte contre le colonisateur, des combattants célèbres sont venus de ce Centre et Sud-Cameroun qu’on tente d’infantiliser depuis quelques décennies ? Martin Paul Samba, Charles Atangana,  Madola, André-Marie Mbida, Ossende Afana, Marthe Moumié, Ayissi Mvondo, Mongo Béti, Abel Eyinga, etc. aimaient leur pays comme vous l’aimez aujourd’hui. Comme eux hier, vous êtes depuis  toujours avec les autres patriotes dans le combat pour notre libération et notre mieux-être. Aucune manoeuvre de mystification ne viendra perturber votre sérénité et votre témérité légendaires !
Devrait-on rappeler que je suis encore en vie grâce aux populations de Yaoundé qui ont bravé la soldatesque répressive lancée à mes trousses après le soulèvement patriotique du 06 avril 1984 ?

Mes Sœurs et Frères,
Des défis majeurs demeurent comme jalons du Cameroun de demain : la Réconciliation, l’intégration nationale et le vivre-ensemble. C’est un des axes fondamentaux pour refonder le Cameroun. En effet, notre Patrie a besoin de beaucoup plus qu’un « dialogue politique» tant les frustrations et blessures infligées aux institutions, au partenariat indispensable entre acteurs politiques, à la cohésion sociale et à la concorde nationale sont profondes. Seuls des gestes forts ouvriront la voie à la forme supérieure de l’élégance républicaine afin de préserver l’essentiel : un pays réconcilié et tourné vers la construction du futur et non vers les rancœurs et les blessures du passé. Seuls des gestes forts pourront aussi redorer le blason terni de notre démocratie et nous propulser dans le peloton de tête des pays africains leaders en démocratie et en gestion pacifique des successions au pouvoir. C’est en ayant à l’esprit cet élan positif et cette volonté salvatrice, que le pouvoir actuel doit admettre que la vérité précède le pardon et non l’inverse.
Une véritable Réconciliation nationale est revendiquée par notre Pays et notre Peuple:
• Réconciliation immédiate et sincère avec l’ancien « West Cameroon » à travers une décentralisation large et constructive, en plus d’un programme prioritaire de reconstruction économique de cette belle et verte zone incluant le « Ring Road » capable d’être la locomotive d’une économie nationale renaissante dans un pays où les deux régions dites anglophones (Nord-Ouest et Sud-Ouest) se sentiront aimées, acceptées, respectées, et parties intégrantes et essentielles d’une Nation en devenir.
• Réconciliation véritable de la classe politique à travers un code électoral consensuel, une renonciation immédiate et sincère aux tripatouillages incessants de la Constitution, un retour aux civilités démocratiques et à l’élégance républicaine, l’arrêt systématique de l’instrumentalisation de l’ethnie à des fins politiciennes et électoralistes, la dépolitisation de l’administration publique au profit d’une administration neutre formée de professionnels, forte et respectée, l’égalité de tous les citoyens devant la loi et de toutes les confessions religieuses devant l’Etat, la réaffirmation du socle laïc et républicain de notre Nation.  
• Réconciliation des cœurs et des esprits à travers le retour des corps des Leaders camerounais inhumés à l’étranger (l’ancien chef de l’Etat Ahmadou Ahidjo, l’ancien président de l’UPC le Dr Félix Roland Moumié, etc.), l’institution de la Commission « Vérité, Justice et Réconciliation », les hommages de la Nation aux Martyrs et Héros camerounais, en plus des actes de la République au profit de la famille républicaine, pour aujourd’hui et pour toujours.
• Réconciliation de la nation autour de l’histoire politique de l’Etat camerounais en construction et de ses Chefs historiques que sont le couple Ahmadou Ahidjo-Um Nyobé et leurs compagnons historiques ou successeurs dont chacun, avec ses qualités, sa vision et ses limites, aura sans aucun doute marqué l’histoire de notre Patrie. Nous leur devons tous, et en dépit de tout, gratitude et considération. Si on ne doit pas insulter l’avenir, on ne peut pas non plus renier son passé. Ceux et celles qui seront choisis par le Peuple camerounais doivent être officiellement et solennellement réhabilités et faire leur entrée au Panthéon des illustres fils et filles de ce pays nôtre.  
Toutes ces ambitions populaires et légitimes devraient être consignées dans une Charte de Réconciliation, de l’intégration nationale et du vivre-ensemble.
Le pays est aujourd’hui à la croisée de son destin. Les populations de toutes les origines vivent dans le mépris royal de Paul Barthélémy Biya et ses hommes de main, eux aussi issus de toutes les contrées. Le combat ne s’achèvera que le jour où sera installé à Yaoundé, un pouvoir qui se soucie du mieux-être et  du vivre-ensemble des populations ; un objectif que s’étaient fixé nos Héros et Martyrs, pionniers de notre Lutte patriotique. Cette Lutte de Libération continuera, avec le peuple Béti aux côtés de toutes les autres composantes de la Nation. Je n’ose pas croire en la démission du vaillant peuple Béti.
C’est MAINTENANT ou JAMAIS ! NOW or NEVER !
Le 12 octobre 2012.
Votre dévoué GUERANDI Mbara Goulongo