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Assommoir Cambriolage aux Finances : une affaire d’Etat

Cambriolage aux Finances : une affaire d’Etat

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Pendant la nuit de jeudi à vendredi dernier. Des individus non identifiés ont réussi à pénétrer dans le cabinet du ministre des Finances, Essimi Menye. Ceux-ci se seraient ensuite attaqués au coffre-fort placé dans le bureau du ministre, après avoir défoncé les trois portes donnant accès audit cabinet. Une enquête a été initiée par le Groupement mobile d’intervention (Gmi) dont les éléments assurent par ailleurs la garde des locaux. Il est bien clair que la commission d’enquête mise sur pied est une mascarade. Il est élémentaire : on ne peut être juge et partie. Une chose est sûre, une main invisible se cache derrière cet acte. La lecture de "Kaydara" (récit initiatique peulh) d’Amadou Hampaté Bâ, publié aux éditions "Classiques Africains" est un récit d'enseignement et d'éducation. Trois héros entreprennent un voyage dans un monde souterrain qui, en fait, est un monde des significations cachées derrière l'apparence des choses, un monde des symboles où tout est signifiant, où tout parle, interpelle pour qui sait entendre. Au cours de leur voyage épique, les trois héros font face aux événements et animaux dont chacun est un symbole à déchiffrer, à décrypter, à découvrir. Derrière le cambriolage du cabinet du ministre des Finances se cachent plusieurs énigmes.
Essimi Menye est l’homme à abattre pour de nombreux responsables. En homme de foi et de discrétion, Essimi Menye est le Tout Puissant argentier de l’État et de la République, de sorte que l’on voit en lui un monstre froid comme I ‘État qu’il incarne. Devenu ministre des Finances, il est adulé par-ci, dénigré par-là, béni par les uns et maudit par les autres. Malgré les déboires, Essimi Menye est resté le même homme serein, déterminé et mystérieux. Il est d’une très grande timidité et d’une étonnante sérénité qui illustre sa nature circonspecte et réservée. C’est pourquoi, dans son calme olympien, il dégage parfois une froideur qui indispose l’interlocuteur qui l’approche pour la première fois. Pourtant, il est un homme politique. Or, chez l’homme politique, l’élocution et la tonalité du discours sont bien des atouts fondamentaux et des indices d’homologation de La personnalité. ‘’L’éloquence est politique’’, enseigne le philosophe Alain. Mais, Essimi Menye, malgré la profondeur des idées et l’originalité des propos, n’est pas éloquent. C’est peut-être son plus grand handicap. Essimi Menye reste pourtant un océan de mystère. Son plus grand défaut est l’entêtement, car il est prudent à prendre une décision et prompt à l’exécuter. Parfois même, il prend des décisions audacieuses qui ‘’peuvent faire mal’’, dit-on. Il n’a pas hésité à se lâcher dans l’affaire de la Cbc : ‘’la Cbc n’est plus la banque Fotso’’ a-t-il lancé. Le 25 janvier dernier, il lance une opération visant à assainir le ministère des Finances. La rationalisation de la dépense publique a conduit la tutelle des Finances à la réalisation de l'audit du compte de chaque administration dans le but de débusquer des irrégularités dans le traitement des salaires. Cette démarche vise à  démanteler la perception des avantages, primes et autres indemnités indus par les fonctionnaires, et de mettre à nu le système de trucage des âges par les agents de l'État dans le but de différer leur départ à la retraite. Ses actions ne plaisent pas toujours à ses collègues. Tous les coups sont permis pour détruire un ennemi politique.  
L'impatience politique rend aveugle. Et quand Dieu veut perdre un homme politique, il le rend impatient. Le ministre délégué aux Finances, chargé du Budget croit certainement que son heure à sonné. A l’heure où on annonce un grand chambardement du gouvernement, Pierre Titi croit avoir rongé son frein pendant longtemps. Lui qui a été longtemps programmé pour diriger ce département ministériel. Pierre Titi ne sait pas que l’impatience n’est pas la mère de la sagesse. L’alliage entre Essimi Menye et Pierre Titi est un véritable tigre de papier. Sous son air jovial, à la limite obséquieux, se cache un être à l’ambition démesurée, pour l’instant endossant le statut de Vrp de luxe du budget camerounais, la brosse à reluire de mise, irritant une partie du gouvernement, qui l’affuble d’un pompeux ‘’fayot’’ pour les plus polis, pour les autres ‘’gros con’’. Le ministre délégué aux Finances se verrait bien calife à la place du calife. Pierre Titi pourrait bien jouer les instigateurs dans ces affaires, lui qui est à l’origine de l’ambiance maquisarde qui règne au Minfi. Dans l’attente, il  aiguise son ambition en lorgnant sur le poste d’Essimi Menye. Pierre Titi a longtemps trouvé son outil de communication : les chanteurs qui clament son nom à longueur d’albums. Les élucubrations du ministre délégué prêtent à sourire, l’ironie persistante, la parole grinçante, orchestrant de main de maître son parcours. Laurent Esso l’appréciant au plus haut point, mais pour d’autres sombres raisons. L’obséquieux de service pourra t-il faire face à une cohorte furibonde…
Dans son combat pour la rationalisation de la dépense publique, Essimi Menye s’est attaqué au personnel de la défense. En s’attaquant à la ‘’Grande muette’’, Essimi Menye savait qu’il affrontait à ciel ouvert les intouchables de la République. On n’est pas surpris quand certains essayent maladroitement d’impliquer le ministre des Finances dans l’affaire de l’achat de deux hélicoptères par l’armée camerounaise. Qui veut noyer son chien l’accuse de rage. Pourquoi veut-on éloigner l’attention des Camerounais, des détournements massifs observés, pour la construction des tribunes, au boulevard du 20 mai, à la veille du défilé de cette année. 750 millions pour la tribune du cinquantenaire. Le ministre des Finances ne s’est pas empressé à régler cette ardoise. Il garde  les documents frauduleux avec lui. Les individus qui ont visité les bureaux du ministre des Finances voulaient faire disparaitre les traces de cette affaire scabreuses. A l’ombre, ils essaient déjà de faire prospérer l’idée de la création d’un grand ministère de l’Économie et des Finances. Cet attelage sera  conduit par le falot Louis Paul Motaze. Celui là même qui tarde à matérialiser le projet du port en eaux profondes de Kribi. Ses incantations sur le sujet ne trompent que ceux qui ne sont jamais descendus à Kribi. Devant ce cocktail explosif pour le Cameroun, on remet au gout du jour, l’idée d’un repli identitaire des ressortissants de la province du Sud. C’est tout naturellement que ceux là laissent planer la psychose d’un coup d’État au Cameroun.
Le repli identitaire se prépare au sein du pouvoir Rdpc attisé par une instrumentalisation de certaines élites. Ceci va justifier une dure répression envers certaines tribus. La ville d’Ebolowa a servi de laboratoire à cette pensée avec la chasse au Bamoum. Le Cameroun est au bord du précipice du fait des ambitions égoïstes de certaines personnalités. Pour exprimer une révolte, hurler un refus, faut-il encore disposer de mots qui aient du sens. En avons-nous encore, de ces mots qui abattent des certitudes, font vaciller les servitudes ? De ces mots qui galvanisent des volontés, qui orientent les énergies vers l’émancipation ? George Orwell affirmait que ‘’le plus effrayant dans le totalitarisme n’est pas qu’il commette des ‘‘atrocités’’, mais qu’il détruise la notion même de vérité objective : il prétend contrôler le passé aussi bien que l’avenir’’. Il écrivait encore, dans 1984 : ‘’Dire des mensonges délibérés tout en y croyant sincèrement, oublier tous les faits devenus gênants puis, lorsque c’est nécessaire, les tirer de l’oubli pour seulement le laps de temps utile, nier l’existence d’une réalité objective alors qu’on tient compte de la réalité qu’on nie, tout cela est d’une indispensable nécessité.’’ Telle est la dictature à l’œuvre dans ses discours, dans ses mots. Elle démonte le passé.  Cette dictature précipite le Cameroun, dans le chaos de la pensée politique, qui devient indigente, trop rarement à la hauteur des défis. Cette dictature s’inscrit jusque dans les mots qui sont à nous et qu’elle s’approprie de fait, en les dénaturant, en leur ôtant toute leur signification.
Junior Etienne Lantier

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