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Des désastres judiciaires

Des désastres judiciaires

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Index de l'article
Des désastres judiciaires
Une justice rendue au nom du ministre de la justice, de l'exécutif et de Paul Biya
Ces condamnations qui discréditent la justice camerounaise
Une justice indépendante à l'épreuve des fait
Une justice accroupie
Indépendance de la justice: attention danger!
Rendre justice la faim dans le ventre
Construire des ennemis intérieur
Me Charles Tchoungang : «Dans certaines affaires, la principale motivation ayant permis le déclenchement des poursuites a été politique »
J'accuse...
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L'injuste Tcs
Les mots ont un sens. Quand on les emploie, c’est pour dire quelque chose, pour se faire comprendre surtout si on a pris la peine de clarifier le sens de chaque notion utilisée afin d’éviter quiproquos et mésinterprétations. Ces derniers jours, pour ne pas dire ces derniers temps, un mot est régulièrement revenu dans la bouche des Camerounais, qu’il s’agisse du nouveau Code pénal récemment adopté par le Parlement et promulgué par le président de la République, ou des procès pendant devant le Tribunal criminel spécial (TCS), la Cour suprême, ou ceux dont les jugements ont déjà été rendus par ces juridictions : c’est le mot magique justice. Ce mot revient dans les expressions ministère de la Justice, palais de Justice. Ne perdons pas de vue qu'à aucun moment, on ne parle de ministère de la Vérité ou de palais de la Vérité. Cela veut dire qu’il y a très souvent un gap entre la justice et la vérité, le décalage entre ces deux réalités étant dû à l’intervention humaine.
On sait que le terme justice

désigne un idéal universel et en même temps qu’une vertu personnelle. On a aussi coutume de dire que la justice n’est pas de ce monde et que ce qui l’est c’est l’idéal de justice. À défaut de la vraie justice qui relèverait de Dieu ou des dieux, les hommes souhaiteraient avoir une qui, faute de les satisfaire entièrement, les consolerait.
Au Cameroun, hélas ! le palais de justice est devenu moins le lieu où peut se réaliser l’idéal d’équité que celui où injustices, carriérisme et pressions politiques multiformes plombent l’idéal de justice vers lequel on devrait tendre. Cette situation est surtout marquée au TCS où prévaut le devoir d’injustice avec les interventions intempestives de l’exécutif, de la Chancellerie donc des politiques dans certains procès dits emblématiques impliquant les hauts commis de l’État ou de personnalités du monde des affaires. Les affaires Marafa Hamidou Yaya, Jean-Marie Atangana Mebara, Polycarpe Abah Abah, Lydienne Yen Eyoum, Etondé Ekotto, etc., présumés coupables dès leur arrestation, en sont des illustrations patentes. On comprend pourquoi, certains Camerounais n’hésitent plus à parler de ministère ou de palais de l’injustice et estiment que le TCS est un machin aux mains de l’exécutif et de certains pouvoiristes pour liquider des ennemis réels ou supposés.
Dans ces conditions, on n’est pas étonné de constater que les charges retenues contre les personnalités suscitées et les procédures judiciaires sont démontées par des instances internationales qui qualifient leur détention d’arbitraire et exigent leur libération.
Qu’avons-nous fait pour mériter un TCS, plus généralement, une justice si injuste ?
Heureusement, dans cette mare aux canards boiteux, il y a encore des Magistrats (avec grand M) compétents et téméraires qui, même dépourvus de moyens, disent le droit malgré des pressions, et des Avocats des sans voix qui défendent des causes perdues d’avance. Chapeau !!

Source: Germinal n°089 du lundi 11 juillet 2016


Une justice rendue au nom du ministre de la justice, de l'exécutif et de Paul Biya

Malgré les dénégations du gouvernement, les faits sont tétus et la réalité poignante. Certains procès au TCS et à la Cour suprême sont sujets à caution. Les décisions des instances internationales sont justifiées. Les grâces accordées par Paul Biya, mêmes légales, sont des résultats des pressions. Elles semblent constituer une mise à l’index de la justice et brouillent la lutte contre la corruption.
À bien y regarder, cela peut ressembler à l’histoire d’un tonneau de Danaïbes. D’année en année, et cela depuis le 6 novembre 1982, toutes les actions d’accomplissement de la démocratie et de l’avènement d’un État de droit ont été englouties, malgré les discours lénifiants.
À force de procéder aux détours, aux replâtrages et autres faux monnayages, les dirigeants actuels n’ont-ils pas fini par installer l’inertie, la gestion à l’emporte-caisse et la stérilité comme formes achevées de leur gouvernance ? Symbole d’un corps social à l’agonie et en déliquescence avancée, l’appareil judiciaire ou ce qui en tient lieu avance sur place, lorsqu’il ne marche pas à reculons, la tête au sol et les jambes en l’air. De sorte que, de plus en plus, dans certaines affaires emblématiques, telles que les affaires Marafa Hamidou Yaya, Urbain Olanguena Awono, Polycarpe Abah Abah, Etondè Ekotto, Lydienne Yen Eyoum, Jean-Marie Atangana Mebara, pour ne citer que celles-là, la justice semble être rendue au nom du ministre de la Justice, donc de l’exécutif (c’est-à-dire du politique et de ses visées) et de Paul Biya qui enclenche les arrestations. Le processus, bien connu, a déjà été mis en exergue dans nos colonnes. Peut-être convient-il de le rappeler.
Lorsqu’il faut enclencher une procédure qui conduira à l’interpellation de certaines personnalités, certains dossiers ficelés par le ministre délégué chargé du contrôle supérieur de l’État (Consupe) sont transmis au secrétaire général de la présidence de la République. Celui-ci adresse à son tour une note à la Très Haute Attention du président de la République généralement en ces termes : «  le ministre délégué à la présidence de la République chargé du Contrôle supérieur de l’État propose la traduction des mis en cause devant le Conseil de discipline budgétaire et financière ainsi que les juridictions compétentes. Pour hautes appréciations du chef de l’État. » Lorsque Paul Biya reçoit cette note, il griffe à la marge un petit “Accord” et retourne le dossier au clerc de service. À son tour, celui-ci achemine le dossier, avec des instructions précises, au ministre de la Justice qui actionne les services compétents qui procèdent aux interpellations.
Indubitablement, cette manière de procéder pose le problème de l’indépendance de la justice au Cameroun.
Répondant à certaines préoccupations des médias au cours d’un échange qui a suivi leur tête-à-tête au Palais de l’Unité, au cours de la visite d’État que le président français François Hollande avait effectuée au Cameroun, le 3 juillet 2015, le président de la République du Cameroun, Paul Biya, avait déclaré : « La justice au Cameroun est totalement indépendante. Même s’il arrivait à l’exécutif de vouloir l’influencer, l’exécutif ne réussirait pas. » Ces propos reviennent comme une rengaine dans la bouche du ministre de la Communication qui n’a jamais cessé de seriner mécaniquement, à propos et hors de propos, que : « la justice au Cameroun est indépendante », que « Le président de la République a attendu que la Justice indépendante fasse son travail, que les décisions rendues deviennent définitives pour user d’un pouvoir régalien que lui confère la Constitution. », et tutti quanti.
Les propos du « premier magistrat », Paul Biya, et de son ministre de la Communication, Issa Tchiroma Babary, sont sujets à caution. Les actes posés par Paul Biya et par le ministre de la Justice narguent leurs paroles. Et à force de répéter que « la justice camerounaise est indépendante», les Camerounais ont fini par croire le contraire.
De là à penser que les procès sus-cités sont politiques et des personnes incarcérées des prisonniers politiques, il n’y a qu’un pas que certains Camerounais et observateurs n’hésitent pas à franchir. C’est donc à juste titre qu’ils affirment que la justice camerounaise est devenue un terrain conquis par la (ou le) politique. Et comme on dit, « faites entrer la politique politicienne dans les affaires et les institutions, et c’est le bordel qui s’installe ».
Certes dans presque tous les pays du monde, la question de l’indépendance de la justice s’est souvent posée. Mais dans des pays démocratiques, les moindres pressions des hommes politiques sur la justice sont décriées, et parfois, les auteurs perdent leur crédibilité politique.
Au Cameroun, le phénomène est plus pernicieux. Tout se fait avec une arrogance qui frise le mépris. Si l’on se limite aux seules années de gouvernance du Renouveau, le bilan des affaires torpillées est très lourd. C’est dire si les affaires sus-évoquées ne constituent que la partie visible de l’iceberg. Elles mettent à nu de graves dysfonctionnements de la justice camerounaise.
On comprend pourquoi, certains parmi les prisonniers VIP, après leurs condamnations définitives dans le cadre de l’opération dite Épervier, se sont tournées vers les organismes internationaux auxquels le Cameroun a volontairement adhéré (le conseil des droits de l’Homme de l’ONU (Groupe de travail sur la détention arbitraire), cas de Marafa Hamidou Yaya, Michel Thierry Atangana et Me Lydienne Yen Eyoum, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples de Union africaine (cas de Jean-Marie Atangana Mebara)). Ces organismes ont relevé, des failles, de graves dysfonctionnements et manquements dans le déroulement desdits procès. Ils ont condamné l’État du Cameroun et ont demandé leur libération immédiate, quelquefois en exigeant un dédommagement ou en infligeant des dommages et intérêts conséquents. La commission africaine des droits de l’homme a, par exemple, condamné le Cameroun à payer à Atangana Mebara la somme de 400 millions de francs CFA, tandis que le groupe de travail de l’ONU, « conclut que la détention de M. Marafa Hamidou Yaya est arbitraire au titre de la catégorie III telle que définie au paragraphe 8 des Méthodes de Travail, et que le Gouvernement a l’obligation d’y mettre fin et d’accorder à la victime une réparation appropriée. Dans ces conditions, le Groupe de travail demande la libération immédiate de M. Yaya, avec la possibilité d’un nouveau procès où tous ses droits devront être entièrement respectés, pourvu que le Ministère public ait des raisons valables de le poursuivre ».
On comprend aussi pourquoi la France a exercé de fortes pressions sur le président Paul Biya qui a cédé par deux fois en graciant et en libérant les Franco-camerounais Michel Thierry Atangana et Me Lydienne Yen Eyoum.
Il est vrai que la grâce est cette prérogative que la constitution donne au président de la République de réduire, voire de supprimer une peine, l’article 8 (7) disposant qu’«il exerce le droit de grâce après avis du Conseil supérieur de la magistrature ». À l’évidence aussi, la grâce, recours de la dernière chance, est demandée lorsque tous les recours judiciaires ont été épuisés. Il va enfin sans dire que, contrairement à l’amnistie, qui est une sorte de « droit à l’oubli », la grâce ne fait pas disparaitre la condamnation du casier judiciaire et que par ailleurs, les droits des victimes restent inchangés.
Mais, son octroi à des personnes, soi-disant condamnées pour détournement de deniers publics, suscite un questionnement dans un contexte marqué par la lutte déclarée contre la corruption. En procédant à une remise totale des peines à ces personnes, même si celle-ci n’efface pas les dettes et la culpabilité, le président Biya ne reconnait-il pas implicitement qu’il y a eu des failles et dysfonctionnements dans les procédures judiciaires ? Ces grâces n’enlèvent-elles pas au président de la République toute légitimité pour poursuivre l’Opération Épervier ? Paul Biya en accordant les grâces ne perd-il pas toute légitimité pour parler de lutte contre la corruption au Cameroun ?
Jean-Bosco Talla


Ces condamnations qui discréditent la justice camerounaise

Opération Epervier : De lourdes peines infligées à Marafa, Atangana Mebara, Olanguena, Abah Abah, Lydienne Eyoum, entre autres, manoeuvres des comploteurs aux manettes d’un Tribunal Criminel spécialement instrumentalisé.
« Pas grand-chose à attendre du Tribunal criminel spécial. Nous sommes livrés à cette juridiction d’exception qui n’avait pas sa raison d’être. Elle devra appliquer un seul article : le 184 Cpp, un article coupeur de têtes. Avec le Tcs, c’est davantage l’avènement de la répression. C’est un tribunal créé pour réprimer uniquement. Je ne crois pas aux remboursements ». Ainsi s’exprimait Me Calvin Bilong, avocat au barreau du Cameroun le 16 octobre 2012, à la veille de l’ouverture du Tcs.
Des propos qui sonnent aujourd’hui comme une prémonition d’apocalypse, alors que le cycle infernal des condamnations suit inexorablement son cours devant la barre de cette «guillotine masquée pour les éperviables». Un cycle infernal de condamnations qui a pris de l’ampleur après le discours belliciste prononcé le 9 octobre 2015 par le Garde des Sceaux, Laurent Esso. C’était à l’occasion de la prise de fonction du nouveau procureur général près le Tcs. Dans une allocution qui avait les relents d’un réquisitoire, Laurent Esso exigeait de Justine Ngounou, la procureure, de faire une application aveugle et sans état d’âme de l’article 184 Cpp, synonyme de la condamnation à vie. 
De fait, de la panoplie des dossiers qui ont défrayé et continuent de défrayer la chronique judiciaire, l’affaire ou plutôt les affaires Atangana Mebara tiennent le haut du pavé. Jean Marie Atangana Mebara cumule aujourd’hui 60 ans de prison étalée sur trois procès dont l’issue sera toujours la même : 15 ans, 20 ans et 25 ans.  Parodie de justice que cette peine de 15 ans infligée par la Cour d’Appel et confirmée récemment par la Cour suprême. Là où la simple application de la loi créant le Tcs qui supprime le second degré de juridiction enjoignait les magistrats de la CS à acquitter l’accusé et déclarer incompétente la Cour d’appel du Centre. Tel ne fut pas le cas. Des sanctions tombèrent sur le juge-rapporteur Jean Jacques Bikoué et le président de la Chambre spécialisée, Ombala qui payeront de leurs postes pour avoir osé se prononcer en faveur de l’acquittement de l’ex-Sgpr.
C’est dans le même élan et avec le même acharnement que les juges du Tribunal Criminel spécial infligeront 15 et 20 ans de prison à l’ancien ministre de la Santé Urbain Olanguena Awono en l’espace de deux mois. C’était les 14 juin et 12 août 2013 dans le cadre d’un dossier unique, initialement transmis par le Tgi du Mfoundi quelques mois plus tôt, et qui éclata en deux (disjonction de procédure) procédures distinctes devant le Tcs. Un dossier qui, faut-il le rappeler, avait connu moult péripéties devant le Tgi dont l’un des épisodes les plus emblématiques aura été cette attitude scandaleuse du ministère public. Ses deux représentants avaient, ni plus ni moins, et sur très hautes instructions de la hiérarchie, décidé de quitter la salle des audiences le jour J et le jour suivant réservés au prononcé du verdict. Il ne fallait pas donner sa caution à l’acquittement de Olanguena. La suite de l’histoire (ou plutôt de la mascarade) devant le Tcs se passe de commentaires.
C’est le 19 juin 2012 que tout s’emballe devant la barre du Tpi d’Ekounou pour Abah Abah Polycarpe depuis son incarcération en 2008. Il est reconnu coupable du délit d’évasion aggravée alors qu’il faisait escale chez lui sous l’œil vigilant de son escouade de geôliers. Il est condamné, en l’absence de ses avocats, à 6 ans de prison ferme par le Tpi d’Ekounou siégeant dans le cadre de la procédure de flagrant délit. Une condamnation qui discréditera davantage la justice camerounaise. Mais le meilleur était à venir. Le 13 janvier 2014, les juges du Tribunal criminel spécial condamnent Abah Abah Polycarpe à 25 ans de prison ferme au terme d’une audience qui aura duré près de neuf heures d’horloge. Dans le dossier plié sans témoin à charge où seules les déclarations mensongères d’une coaccusée acquittée, dame Mewoulou, fondèrent la conviction des juges. Drôle !!!
Reconnu coupable de complicité intellectuelle par le Tgi du Mfoundi dans le cadre du détournement supposé de 29 millions de dollars destinés à l’achat d’un aéronef neuf, le Bbj-2 présidentiel, Marafa Hamidou Yaya purge depuis le 22 septembre 2012 une peine de 25 ans de prison. Une peine qui, même si elle a été récemment ramenée à 20 ans par la Cour suprême, passe aux yeux de nombreux observateurs comme injuste et injustifiée, si ce n’est par des considérations de politique politicienne. A l’instar de la Commission des droits de l’homme de l’Onu qui demande la libération de Marafa, jugeant arbitraire et abusive la condamnation et la détention de l’ancien Minatd, divers organismes internationaux de défense des libertés individuelles indexent, et la justice camerounaise et les autorités camerounaise quant à la manière dont elle mène la lutte contre la corruption dans le cadre de l’ « opération épervier ».
Les pressions des mêmes organismes qui, avec le concours de la France, ont fini par faire plier l’échine à Paul Biya qui, de la manière la plus inattendue, s’est résolu à libérer Me Lydienne Yen Eyoum le 4 juillet 2016. L’avocate franco camerounaise qui purgeait 25 ans de prison depuis le 26 septembre 2014 répondait du détournement de 1,2 milliard Fcfa supposés lié au recouvrement d’une créance de l’Etat, recouvrement adossé sur un conflit d’honoraires. une affaire, concordent les avis, justiciable devant le Bâtonnier de l’Ordre des avocats et non devant le Tcs. Il reste constant que l’avocate franco-camerounaise paie son refus de livrer la tête de Polycarpe Abah Abah à l’ex-justice Amadou Ali qui avait déclaré, toute honte bue, que ceux qui sont arrêtés dans le cadre de l’Opération Epervier n’ont aucune chacune chance de s’en sortir, donc qu’ils sont présumés coupables.
Ikemefuna Oliseh


Une justice indépendante à l'épreuve des fait

Un document montre que Pascal Magnaguembe aurait été contraint d’apposer sa signature au bas d’une ordonnance de renvoi manipulée sur injonction de l’actuel Garde des Sceaux, Laurent Esso. On peut y lire : « Les 12, 13 et 14 juin 2012, le juge d’instruction Pascal Magnaguemabé prend part à des réunions auxquelles il est convié à la chancellerie, aux côtés du secrétaire général du ministère de la Justice, du directeur de l’Action publique et des Grâces, du procureur général près la cour d’appel du Centre et le procureur de la République près le tribunal de grande instance du Mfoundi, réunions présidées par le Garde des Sceaux. Au cours de ces assises, il est « instruit » au juge d’instruction Pascal Magnaguemabé de ne pas dans son ordonnance renvoyant Yves Michel Fotso et Marafa Hamidou Yaha devant le tribunal de grande instance du Mfoundi statuant en matière criminelle en phase de rédaction, rentrer dans les détails des charges qui pèsent sur Fotso Yves Michel et Marafa Hamidou Yaya. Le juge d’instruction Pascal Magnaguemabé tique devant cette « instruction » et relève qu’il semblait judicieux de mettre à la disposition de l’accusation l’entier mécanisme et dans ses détails usités par Yves Michel Fotso et Marafa Hamidou Yaya pour détourner les 31 000 000 de dollars US de fonds publics par eux détournés. La haute hiérarchie maintient ses « instructions ». Le juge d’instruction Pascal Magnaguemabé rédige une mouture de cette Ordonnance conformément aux instructions reçues et le remet le 22 juin 2012 au ministre d’État, ministre de la Justice, Garde des Sceaux. Le 25 juin 2012, la Hiérarchie judiciaire par l’entremise du président du tribunal de grande instance du Mfoundi, M. Schlick remet au juge d’instruction Pascal Magnaguemabé pour uniquement y requérir sa signature. Une mouture d’ordonnance renvoyant Fotso Yves et Marafa Hamidou Yaya devant le tribunal de grande instance du Mfoundi statuant en matière criminelle, mais, dans laquelle ce magistrat ne se reconnaît pas pour 40% de la décision à lui remise. Le juge d’instruction Pascal Magnaguemabé tique encore, mais appose sa signature tout de même, sur ce document censé émaner de lui. (Hiérarchie oblige) ».
Lettre du 20 janvier portant n° B441/SG/PR
« À Monsieur le Secrétaire général des Services du Premier Ministre,
J’ai l’honneur de vous faire connaître que le Chef de l’État a marqué son accord en vue du rétablissement de la SGBC dans ses droits, la saisie attribution pratiquée contre elle ayant été abusive.
Il vous prescrit par conséquent d’instruire le Minefi aux fins d’arrêter toute action engagée ou envisagée, dans le cadre de la procédure portée en objet, de rembourser les sommes indûment saisies, sans préjudice les cas échéant des poursuites à l’encontre des auxiliaires de justice (Avocat et Huissier de justice), auteurs des malversations dans cette affaire.»


Une justice accroupie

Dans les discours, la justice camerounaise est indépendante. Dans la pratique, elle est sous la botte de l'exécutif.
Paul Biya et ses ministres nous rabâchent depuis des lustres les mêmes propos selon lesquels la justice camerounaise est indépendante. À force de les répéter, ils invitaient les justiciables camerounais, les opérateurs économiques nationaux et étrangers à faire confiance en la justice camerounaise. Peut-être ont-ils cru un seul instant que les justiciables camerounais avaient été convaincus de la justesse de leurs propos. Erreur !, la correspondance du ministre d’État, ex-secrétaire générale de la présidence de la République, Laurent Esso, adressée à l’ex-ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Amadou Ali, dans laquelle l’ordre est donné au parquet du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi, d’ouvrir une information judiciaire contre Maitres Eyoum Yen Lydienne, Baleng Maah Célestin et, les nommés Abah Abah Polycarpe, Engoulou Henri et Ngwem Honoré, avec mandat de détention provisoire, du chef d’accusation de détournement de deniers publics et complicité était venue démontrer qu’au Cameroun la justice est  sous la botte de l’exécutif.
Répétons avec force, quitte à choquer : dans le cadre de l’Opération Épervier et vraisemblablement dans beaucoup d’autres affaires, c’est l’exécutif qui discrimine et ordonne la mise en détention provisoire des mis en cause  dont certains bénéficient encore de la présomption d’innocence. C’est encore lui qui détermine le chef d’accusation. Dans ces conditions peut-on être fondé de parler d’une justice indépendante et d’une volonté des pouvoirs publics de combattre la corruption et les détournements des deniers publics ? Autrement dit, dans le cadre de l’Opération Épervier, c’est l’homme politique qui, en fonction de ses intérêts ponctuels, livre ses proies à la justice. Les magistrats attendent toujours l’aval du politique pour engager des actions contre la corruption et les infractions connexes. De là à penser que l’Opération Épervier est une opération à tête chercheuse, doublée d’une volonté d’épuration politique, il y a un pas que des observateurs avertis n’hésitent pas à franchir.

Bras armé
Comment pouvait-on imaginer une justice indépendante au Cameroun à partir du moment où la constitution fait du chef de l’État, c’est-à-dire du chef de l’exécutif, le garant de l’indépendance de la justice et le président de droit du conseil supérieur de la magistrature ? À partir du moment où la constitution lui confère un rôle majeur dans l’organisation du système judiciaire camerounais et la nomination des magistrats et lui accorde une immunité pénale et civile pendant toute la durée de ses fonctions ?
Il suffit d’ailleurs, pour se convaincre de la dépendance de la justice, d’assister aux déroulements des procès dans les cours et tribunaux pour tirer la conclusion selon laquelle, les procureurs ne font aucun effort pour dissimuler leur dépendance vis-à-vis de l’exécutif, qu’ils défendent aveuglement et quelquefois bêtement. On comprend pourquoi en 2008, la cour européenne des droits de l’homme avait refusé d’admettre que le parquet était une autorité judiciaire. Coincé entre l’intérêt politique, le carriérisme de certains procureurs et les contraintes juridiques, il lui manque l’indépendance à l’égard du pouvoir exécutif pour être ainsi qualifier.
Cette dépendance de l’institution judiciaire vis-à-vis de l’exécutif est renforcée par le décret n°095/048 du 08 mars 1995 portant statut de la magistrature en ses chapitres VII et VIII. De plus, les substituts sont sous les ordres de leur procureur, qui prend les consignes ou les instructions de son procureur général, nommé par le président de la République et hiérarchiquement soumis au ministre de la justice, chacun notant ses subordonnés et ayant un réel pouvoir sur leur carrière. C’est dire si les parquets sont à la fois l’œil de l’exécutif, donc du pouvoir et son bras armé.
L’intervention de l’exécutif dans les affaires ouvre un débat sur la conception que Paul Biya a de sa fonction présidentielle et de son rapport avec la justice. Le président de la République n’ignore pourtant pas : (1) que les éléments qui fondent l’indépendance de la magistrature sont : l’inamovibilité, la sécurité matérielle et financière, l’indépendance administrative et, (2) que l’indépendance individuelle d’un juge et l’indépendance institutionnelle ou collective de la cour à laquelle le juge appartient constituent les deux composantes de l’indépendance judiciaire.
Aussi, souligne Robert Badinter, socialiste et ancien ministre français de la justice, « Au-delà des compétences et de l’intégrité, la qualité première de la magistrature dans une démocratie, c’est son indépendance au regard du pouvoir politique. »
J.-B.Talla.
Source: Germinal n°057


Indépendance de la justice: attention danger!

L’arbitraire a pris les rênes destructrices du pacte social républicain pour empêcher toute procédure de destitution enclenchée à l'encontre du président Biya.
Pourquoi l’exécutif multiplie-t-il moult stratégies depuis des décennies pour contrôler l’appareil judiciaire ? À quoi rime cette imbrication qui étouffe l’État de droit et la démocratie sous des procédures actionnées par le politique ? Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’au Cameroun, l’univers judiciaire choque de par les graves violations et institutions dérogatoires. Plusieurs avocats et magistrats interrogés sont d’avis que l’enjeu est de renforcer les pouvoirs de l’exécutif, de protéger son chef et surtout d’éviter toute procédure de destitution qui pourrait être enclenchée à l’encontre du président de la République.
C’est un truisme que de préciser que l’indépendance de l’appareil judiciaire n’est en fait qu’une indépendance de pacotille, formelle. Tout est actionné et mis en oeuvre comme le souligne si bien Urbain Olanguena Awono, ex-ministre de la Santé publique par un « machiavel fou » pour la tenir en laisse. Dans son récent ouvrage Mensonges d’État, il montre que « la plupart des dossiers de l’opération Épervier sont volontairement saucissonnés par la pratique des ordonnances de disjonction au niveau du juge d’instruction pour en faire des dossiers à plusieurs « tiroirs » afin de ne pas rater la cible désignée et de démultiplier au besoin les condamnations ».
Ainsi sous le couvert des raisons moralisantes, une justice aux ordres se cache et suit, tête baissée, de façon moutonnière. En renonçant à sa défense le 24 juin 2015, le collège des avocats de Jean-Marie Atangana Mebara, ex-secrétaire général de la présidence de la République avait compris que les débats avaient transcendé le cadre juridique et que l’impartialité de certains magistrats, surtout ceux qui ont en charge certains dossiers au TCS, était un mythe. « L’impartialité est une notion, une vertu qui est interne, intrinsèque à la personne du magistrat […] Dire donc d’un magistrat qu’il est indépendant et impartial, c’est dire qu’il doit prendre une décision sans se référer à une personne, ou en s’assurant que lui-même en interne n’est pas soumis à des forces qui pourraient éventuellement dépasser le seuil de sa volonté », soulignait Me Claude Assira. De plus, des magistrats friands d’argent cèdent avec une facilité déconcertante aux logiques occultes que leur impose l’État. Le dispositif actuel de nomination des magistrats et non le principe d’élection des juges est l’autre source du contrôle du pouvoir judiciaire par le détenteur et locataire du Palais d’Etoudi. Ce n’est pas un fait du hasard si le conseil supérieur de la magistrature est présidé par le président de la République. Les magistrats n’ont pas la possibilité d’être syndiqués. Le comble, l’article 127 du nouveau Code pénal est venu une fois de plus consacrer une sorte supériorité des membres du gouvernement sur les magistrats qui rendent justice et incarnent le pouvoir judiciaire. Les seuls moments où certains parmi ces magistrats bénéficient d’une protection policière, c’est quand ils ont en charge des dossiers sensibles, tels ceux de Marafa Hamidou Yaya, Atangana Mebara, entres autres. Lors du déroulement du procès Marafa/Yves Michel Fotso au TPI, par exemple, on a pu constater une présence policière remarquée autour des domiciles des magistrats appelés à connaître de cette affaire.

Illustration
Alors quel est l’agenda caché derrière ce feuilleton continuel au sommet de l’État camerounais ? L’enjeu ne consisterait-il pas à protéger Paul Biya, en le maintenant dans son tabernacle inaccessible et en empêchant des juges indépendants allant dans le sens de l’ouverture d’un procès en destitution, comme c’est le cas dans les pays où l’État de droit est une réalité.
On sait ce qui est arrivé à certains chefs de l’État dans des pays où la justice est véritablement indépendante. En 1999, au Sénat américain Bill Clinton échappe de justesse à l’impeachment (destitution) après avoir été accusé de parjure par la Chambre des représentants des États unis dans le scandale Monica Lewinski révélé par le procureur Kenneth Starr devant qui elle est obligée de reconnaitre sa relation avec Clinton après avoir passé un accord avec lui.
Dilma Rousseff, ex-présidente du Brésil accusée d’avoir maquillé les comptes publics pour favoriser sa réélection en 2014 a, purement, simplement et provisoirement été mise à l’écart. Actuellement, son procès se tient devant le Sénat brésilien. À propos de la crise brésilienne, le constitutionnaliste français Pascal Jan, professeur à Sciences Po Bordeaux, analysant le procès en destitution qui attendait la présidente brésilienne Dilma Rousseff a établi que la démarche était semblable à celle prévue par la Constitution française en cas de « manquement » du président en exercice.
En Afrique du Sud Jacop Zuma est pris dans les rets de la Justice. En septembre 2015, il avait échappé à une tentative de destitution après sa décision de ne pas arrêter le président soudanais qui est sous le coup d’un mandat d’arrêt international délivré par la Cour pénale internationale (CPI) alors qu’il s’était rendu en Afrique du Sud. Il est aujourd’hui visé par plusieurs autres procédures judiciaires. Récemment, les 11 juges de la Cour constitutionnelle lui ont ordonné le remboursement d’une partie (soir 500 millions d’euros) des 20 millions d’Euros, fonds publics officiellement engagés en 2014 pour des raisons de sécurité.
Ce ne sont pourtant pas ces types « manquements » qui font défaut au Cameroun. L’affaire Messi Messi, avec la faillite de la SCB, celle des milliards de francs CFA non dévalués virés amicalement par la SNH, pendant la décennie 90, dans les comptes du Centre international de recherches culturelles et spirituelles (Circes) devenu Comité d’initiatives et de réalisations caritatives et sociales, branche humanitaire de l’Ordre souverain du Temple initiatique (OSTI) ou de l’Ordre du Temple Solaire (OTS) qui étaient contrôlés par le Grand maître Raymond Bernard, restent vivaces dans l’esprit des Camerounais.
Jeanlin


Rendre justice la faim dans le ventre

Solde insuffisant, très mauvaises conditions de travail peuvent expliquer les critiques faites aux magistrats. Ne faudrait-il pas aussi un minimum de bien-être des magistrats pour appliquer la justice ?
Pour tenter de colmater les bêches des manquements dans l’exercice de leur profession, après moult revendications, le décret n° 095/048 portant Statut particulier de la magistrature a été signé le 08 mars 1995. Ce décret donne les détails sur les conditions d’administration dans le corps de la magistrature, le mécanisme de promotion des magistrats, leurs droits et devoir, etc. Seulement, 21 ans après ce texte, la magistrature camerounaise ne se porte guerre mieux.
Selon plusieurs spécialistes de la chose juridico-judiciaire « au-delà du décret portant statut particulier des magistrats, décret discutable à plusieurs égards, il faut noter que beaucoup de magistrats sortis de l’Enam commencent leur carrière après des années de frustration et de misère car ils attendent souvent des années au quartier ». La raison de ce retard est que le président de la République ne convoque pas régulièrement le Conseil supérieur de la magistrature qui valide l’entrée dans la profession de magistrat.
Une fois intégrés, nos magistrats se retrouvent submergés par le travail, eux qui doivent suivre et étudier des dizaines voire des centaines de dossiers. Face à l’immensité de la tâche, ils se limitent aux minima. Certains magistrats rencontrés estiment que « ceux qui critiquent les juges ne savent pas dans quelles conditions déplorables [ils travaillent] ». Un tour au Palais de justice, centre administratif permet de constater que la plupart des magistrats travaillent dans des véritables capharnaüms, des sortes de « cases de fous ». Après plusieurs hésitations un magistrat qui a requis l’anonymat explique : « On nous refuse jusqu’à la sonorisation des salles d’audience et l’informatisation de procédures ».
Comme l’on peut très bien se rendre compte, les tribunaux camerounais manquent cruellement de personnel. Ce qui n’est pas sans conséquences sur le suivi des dossiers.
En limitant le nombre d’auditeurs de justice qui entrent à l’Enam, l’exécutif fragilise insidieusement le judiciaire. Car s’il y a peu de magistrats pour beaucoup plus de dossiers, ces derniers seront nécessairement survolés et ce sera, dira-t-on en fin de compte, la faute des magistrats. Pour ne pas arranger les choses, le décret cité plus haut fait la part belle aux magistrats de la Cour suprême alors que les magistrats «ordinaires» qui triment dans les tribunaux de l’arrière-pays sont très mal lotis.
Faut-il le souligner, le président de la Cour suprême perçoit mensuellement 1 605 000 F CFA, sans compter les primes et avantages divers. Il bénéficie de l’attention du président de la République qui peut proroger à l’infini son admission à la retraite comme on a pu le voir avec Alexis Dipanda Mouelle. Du coup, nombre de magistrats, malgré les difficultés rencontrées, préfèrent se taire pour ne pas s’attirer les foudres de l’exécutif. On s’installe alors dans un cycle vicieux avec pour corollaire une justice affaiblie que l’on veut à dessein tenir par le ventre des magistrats.
Olivier Atemsing Ndenkop


Construire des ennemis intérieur

Comme dans toutes les dictatures, mieux les démocratures, les stratèges du Renouveau ont l’art de créer des situations et de construire des ennemis intérieurs, réels ou supposés afin de légitimer leurs actions répressives contre eux. Ceux-ci n’inventent pas le fil pour couper le beurre. La stratégie est vieille comme le monde. Elle a été pratiquée en URSS, en Allemagne Nazie, au Cambodge par les Khmers rouges, en Italie du temps de Mussolini, et plus proche de nous, par Sassou Nguesso, Hisène Habré, Idriss Déby Itno, Gnassingbé Eyadéma, Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu wa Za Banga, né Joseph-Désiré Mobutu, pour ne citer que ceux-là. 
Afin de mettre en scène leurs actions machiavéliques contre des personnes et personnalités ciblées, ils créent une catégorie d’ennemis, pour ensuite les nommer, les démasquer pour les identifier avant de les jeter en pâture ou de les offrir en holocauste. Cette construction résulte des jeux de positionnement, de coopération et de distanciation, ainsi que des conflits d’intérêts au sein du système gouvernant à un moment donné, notamment au moment où la fin du vieux lion malade s’avère inéluctable et s’approche à pas de géant. Elle permet de préserver les intérêts des tenants du pouvoir et la consolidation du régime en place, malgré les fissures béantes qui apparaissent sur l’édifice.
Au Cameroun où Paul Biya suit les traces de son illustre prédécesseur Ahmadou Ahidjo, l’avènement dans le champ politique des groupes G11, G18, G21, G25 et autres Brutus participent de cette logique de construction et de désignation des ennemis intérieurs que l’on veut mettre à mort, d’abord médiatiquement, puis judiciairement, quand on ne procède pas à leur kidnapping et à leurs exécutions extrajudiciaires. Des hauts commis de l’État, victimes de cette stratégie diabolique, ont souffert et continue de souffrir dans leur chair.
Certains parmi ces victimes désignées et jetées à la vindicte populaire sont tout simplement surpris et interloquées. Jean-Marie Atangana Mebera est de ceux-là. Lui qui écrit dans son récent ouvrage : « J’avais notamment entendu qu’un hebdomadaire de Yaoundé, rapportant les propos tenus par un chef traditionnel à Ngoumou, le chef-lieu de mon département d’origine, à l’occasion des festivités d’accueil du nouveau ministre originaire du département, avait écrit que j’avais trahi le Président de la République, qui m’avait particulièrement fait confiance, en créant le G11 (Génération 2011), dans l’optique, ajoutait ce chef traditionnel, de prendre la place du Président en 2011 (année de l’élection présidentielle). » Urbain Olanguena Awono, Polycarpe Abah Abah, et bien d’autres qui souffrent en silence, se trouvent certainement dans la même situation
Pourtant, de plus en plus, il se dit que c’est feu Ferdinand Léopold Oyono qui avait lancé l’idée du G11.
Etienne Lantier


Me Charles Tchoungang : «Dans certaines affaires, la principale motivation ayant permis le déclenchement des poursuites a été politique »

Maître Charles Tchoungang, Ancien Bâtonnier de l’Ordre des Avocats au Barreau du Cameroun n’a pas sa langue dans sa poche. Il n’a pas peur de choquer. Son parler-vrai ne l’a jamais quitté, même s’il n’a plus la fougue juvénile du président de l’Organisation camerounaise des droits de l’Homme (OCDH) créée au début des années 90 et dissoute par arrêté du ministre de l’Administration territoriale. Il jette un regard froid sur la justice camerounaise et se prononce sur certaines affaires emblématiques ayant fait les choux gras des médias ces derniers temps. Lisez plutôt.
Germinal : Vous venez de publier un ouvrage aux éditions Schabel ayant pour titre De l’impossible justice au Cameroun. Ce titre laisse perplexe le justiciable camerounais étant donné qu’implicitement il laisse comprendre que la justice camerounaise est en déroute. La Justice camerounaise est-elle vraiment en déroute à telle enseigne qu’il lui est impossible de rendre justice ?
Je vous remercie de me permettre de m’exprimer pour la première fois dans les colonnes de votre Journal, dont l’intérêt pour les questions intéressant l’opinion publique est connu.
Pour revenir à votre question, je voudrais dire que l’idée de commettre un ouvrage sur la Justice au Cameroun m’est apparue comme une nécessité après 33 (trente-trois) ans de pratique professionnelle, ainsi qu’à l’observation des dysfonctionnements devenus récurrents dans notre système judiciaire.
Il est vrai que le titre suggère implicitement que notre Justice est en déroute.
Si cette posture peut paraître excessive pour ceux qui n’ont pas la pratique au quotidien de nos Palais de Justice, elle apparaît pour les habitués les pas perdus de nos Palais comme étant un euphémisme.
L’impossible Justice au Cameroun est à la fois un constat et un appel, un cri de conscience pour des réformes qui s’imposent si nous voulons sauver notre Justice.
En effet, à l’image de notre société, notre Justice s’est éloignée des valeurs essentielles de la cité. Elle est aujourd’hui gangrenée par le phénomène de la corruption qui fait que les décisions sont rendues en faveur du puissant, du riche et des compromissions de tous ordres.
Cet ouvrage est une invite donc à la réflexion, pour un réarmement moral des valeurs qui fondent l’institution judiciaire et pour des réformes qu’appelle le contexte des contraintes sociales qui nous imposent un regard différent sur l’Humain.

En donnant ce titre à votre ouvrage, est-ce une manière de demander au justiciable de ne plus croire en la justice camerounaise ?
Il ne s’agit pas de demander aux justiciables de ne plus croire en la Justice camerounaise, mais de constater la défiance généralisée dont est l’objet cette vieille institution de la République.
En effet, dans le domaine des affaires, on observe de plus en plus que les acteurs économiques préfèrent soumettre leur litige à des Arbitres ou à des Médiateurs, et que dans le domaine civil ou traditionnel, les citoyens préfèrent régler leur litige à l’amiable que de recourir au système judiciaire classique.
Au-delà de l’interpellation générale que suggère ce constat, il appartient à l’État c’est-à-dire au Gouvernement de déclencher un processus de réforme pour crédibiliser notre Justice et la rendre plus attractive aux yeux de ses usagers.

Qu’est-ce qui d’après vous explique cette déroute du système judiciaire camerounais ?
La première cause de la déroute de notre système judiciaire réside dans le système de formation de ses acteurs qui ne correspondent plus aux exigences de notre modernité.
En effet, comment voulez-vous construire un système judiciaire crédible et indépendant, lorsque ses principaux acteurs sont formés dans le même moule que les Administrateurs civils et les Inspecteurs d’État et de Régie financière, sans créer dans l’esprit de ces prochains Juges l’idée de la course effrénée vers l’avoir, avec son corollaire : la corruption.
Par ailleurs, les mécanismes de contrôle des pratiques judiciaires sont, non seulement inexistants quand bien même elles existeraient, elles sont faibles et en tout cas ne s’exercent qu’avec beaucoup de parcimonie.
Sont donc en cause, les Hommes, les Structures et un manque criard de moyens qui oblige chacun à se débrouiller.

Vous parlez aussi d’une justice à la recherche de son indépendance. Cette justice peut-elle être indépendante alors que le conseil supérieur de la magistrature est présidé par le président de la République, chef de l’exécutif, alors que le ministère public est lié à l’exécutif par une sorte de cordon ombilical, et alors que les nominations et promotions des magistrats dépendent de l’exécutif ?
Votre question intègre elle-même la réponse à la question que vous posez.
En effet, tant qu’il n’y aura pas une grande réforme du statut de la Magistrature impliquant une réforme du Conseil Supérieur de la Magistrature, en donnant un statut spécial au ministre de la Justice au sein du Gouvernement avec son corollaire, qui consisterait à rompre le lien ombilical entre le Parquet et l’exécutif, la quête de toute indépendance pour la Magistrature sera vaine.
Notre conviction est que l’indépendance de la Magistrature et un encadrement constitutionnel plus prononcé des conditions d’exercice du droit de grâce sont les conditions indispensables pour une Justice digne de ce nom.
Les frustrations actuelles des Magistrats à la suite de l’exercice du Droit de Grâce sont l’expression d’un malaise que l’on ne peut ignorer si l’on veut rendre notre Justice réellement indépendante.

Que faut-il faire pour rendre la justice camerounaise indépendante ?
Pour avoir une Justice réellement indépendante donc, il faut changer le système de formation des Magistrats en créant une école Nationale de Magistrature distincte de l’École nationale d’Administration et de la Magistrature
Il faut instituer un nouveau statut de la Magistrature qui mette à l’abri tous les acteurs de notre système judiciaire des différentes tentations existentielles que sont l’argent, la tribu, les influences politiques et les multiples tentations de la vie
Il faut en fait, rendre nos Magistrats libres, mais responsables, c’est-à-dire mettre en place un système de contrôle de leur exercice professionnel qui rapproche le constat des fautes, des mécanismes de l’oppression.
Il faut enfin, améliorer les conditions matérielles de travail en renforçant les capacités de management moderne de notre système judiciaire.

Y a-t-il une nécessité d’une émergence d’un syndicat des magistrats comme cela se fait ailleurs, syndicat qui œuvrerait pour la défense des intérêts des magistrats, de leur indépendance vis-à-vis de l’exécutif ?
Notre conviction est que l’exercice de l’activité syndicale au sein de la Magistrature ne peut être qu’un plus, non seulement pour favoriser une défense saine et collective de leurs intérêts, mais également, pour créer entre eux un climat d’autorégulation, dont la conséquence ne pourrait être que le renforcement de leur indépendance vis-à-vis de l’exécutif.

Nous avons constaté ces dernières années que les arrestations de certaines personnalités sont ordonnées par l’exécutif. Pensez-vous comme certains compatriotes que l’indépendance de la justice est sujette à caution dans certains procès relatifs à ce qui est communément appelé « Opération Épervier » ?
Il est évident et constant que la manière avec laquelle ces affaires sont gérées ne peut que créer la suspicion sur la neutralité des procédures engagées et la non-personnalisation des individus mis en cause.
Le processus de déclenchement des poursuites devait avoir un caractère général et impersonnel.
Par exemple, si l’Article 66 de la Constitution avait été mis en œuvre, il eut été facile pour les Parquets à l’occasion des contrôles, de déclencher des poursuites sans que personne ne pût dire qu’il s’agirait de poursuites à tête chercheuse.
Il en aurait été de même pour les questions d’enrichissement illicite si le Code pénal l’avait intégré, et de détournement de deniers publics si les audits avaient été menés par des organismes indépendants.

Irez-vous jusqu’à dire comme ces compatriotes que dans le cadre de l’« Opération Épervier » la justice est à tête chercheuse ?
S’agissant des personnes mises en cause dans le cadre de l’opération Epervier, lorsqu’on analyse les dossiers physiques, il apparaît que dans la plupart des cas, les accusations sont fondées sur des preuves avérées.
S’agissant de l’affirmation selon laquelle, nous assisterions à une Justice à tête chercheuse, il faut à la vérité convenir que la plupart des gens mis en cause ont été en charge de la gestion de fonds importants appartenant à l’État.
Le fait de ne pas poursuivre tout le monde en même temps ne peut excuser le crime.

Ces arrestations le plus souvent ordonnées par l’exécutif (ou le politique) font-elles des personnes arrêtées des prisonniers politiques ?
Le fait que les arrestations aient été pour la plupart ordonnées par l’exécutif, ne peut être une raison suffisante pour affirmer qu’il s’agit d’affaires politiques.
L’examen des dossiers dans la plupart des affaires démontre des atteintes inacceptables, répétées et renouvelées à la fortune publique, comme-ci leurs auteurs bénéficiaient d’une immunité dont ils seraient les seuls à en connaître l’origine.
L’on ne peut donc pas conclure systématiquement que les personnes arrêtées dans ce cadre sont nécessairement des prisonniers politiques.
Cependant, dans certaines affaires, il est difficile de ne pas conclure que la principale motivation qui a permis le déclenchement des poursuites a été politique.

De plus en plus, certains compatriotes condamnés dans le cadre de cette opération saisissent les juridictions internationales (groupe de travail sur la détention arbitraire, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples) qui leur donnent raison. Nous pensons à Michel Thierry Atangana, à Marafa Hamidou Yaya, Lyidenne Yen Eyoum et à Jean-Marie Atangana Mebara. Les manquements relevés par ces juridictions n’entachent-ils pas la crédibilité de la justice camerounaise, et partant l’image du Cameroun ?
Le fait pour certains accusés et certains condamnés de saisir des juridictions internationales, telles que le Groupe de Travail des Nations Unies à Genève ou la Commission africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, ne peut pas nécessairement vouloir dire que les juridictions nationales ont eu tort.
Au demeurant, il faut rappeler à l’opinion qu’il s’agisse du Groupe de Travail des Nations Unies de Genève ou de la Commission africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, leurs avis n’ont aucun caractère contraignant.
Cependant, le fait pour les Juristes de ce niveau d’émettre des avis pertinents sur la qualité de notre Justice, crée une pression morale parfois inconfortable, sur notre pays et partant véhicule une très mauvaise image du Cameroun à l’internationale.
C’est la raison pour laquelle, nous pensons que contrairement à la pratique de notre diplomatie actuelle, le Cameroun ferait mieux de confier sa défense devant ces instances à de véritables Cabinets professionnels pour faire entendre sa voix.
Car, il apparaît que dans les cas que vous avez cités, nous avons pu constater que pour certains d’entre eux, le Cameroun n’a même pas daigné répondre au Mémoire des plaignants dans les forme et délai prescrits.
Ces silences que ces structures interprètent pour du mépris ne sont pas de nature à crédibiliser la position de notre pays.

Nous constatons aussi que le président de la République accorde aussi la grâce aux personnes condamnées pour détournement de deniers publics. Ces grâces n’enlèvent-elles pas au président de la République toute légitimité pour poursuivre l’Opération Épervier ? En accordant la grâce, le président de la République ne perd-il pas toute légitimité pour parler de lutte contre la corruption au Cameroun ?
S’agissant de la Grâce présidentielle, je voudrais prima faci dire qu’aucune critique juridique sérieuse dans le cadre de nos institutions actuelles ne peut être faite au Président de la République quant à l’opportunité qui lui appartient d’exercer son droit de Grâce.
Cependant, le fait que cette Grâce soit accordée dans une matière où il a fait son cheval de bataille, peuvent avoir des conséquences non pas sur la légitimité de l’opération, mais sur sa crédibilité.
Par ailleurs, le choc émotionnel observé dans l’opinion publique en général et dans le milieu de la Magistrature en particulier milite en faveur d’une nouvelle approche de la lutte anti-corruption au Cameroun loin des sentiers de la politique et de ce qu’il apparaît pour certains comme étant des règlements de compte.
Ces Grâces posent également la problématique de la double nationalité et de l’égalité des citoyens devant la Loi.
La double nationalité serait-elle un privilège et une prime aux prévaricateurs de la fortune publique ? D’aucuns franchissent aisément le pas.

Intéressons-nous au système Ohada. Ce système dont l’ambition était de favoriser l’environnement des affaires peut –il garantir au plan judiciaire, l’indépendance des Juges ?
Vous me donnez une occasion une question qui me tient à cœur. J’espère que cette question intéressera vos lecteurs. Il s’agit pour moi de soumettre à leurs réflexions, ce que je considère comme étant la première, mais aussi la plus grave crise du système Ohada, depuis sa mise en place.
Cela dit, depuis quelques années, tous les acteurs du système ont constaté que la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’Ohada avait pris ses marques et s’acheminait tranquillement vers la consolidation d’une institution réellement indépendante au service des contentieux contractuels et économiques.
Mais malheureusement, depuis quelque temps et à l’image de ce qui se passe dans nos Etats, certains gouvernements ont considéré que l’indépendance des Juges d’Abidjan portait gravement atteinte à leur pouvoir dans la mesure où les Juges qu’ils avaient nommés auprès de cette Cour ne leur obéissaient plus.
Ils ont donc entrepris par des manœuvres multiples de déstabiliser la Cour.
Ce fut le cas du Bénin dans l’affaire Thomas Yayi Boni contre Monsieur Talon, où l’on a vu un Chef d’État bloqué financièrement le fonctionnement de la Cour et appeler à la sanction des Juges, l’affaire ayant opposé la Cour à la Guinée Équatorial qui souhaitait changer le juge qu’elle avait nommé et plus récemment, l’initiative de la Cour Suprême du Congo qui a tenté de rendre un Arrêt pour contredire une décision de la Cour.
Malheureusement, ces coups de boutoirs qui s’étaient jusqu’ici heurtés à une indépendance solidaire des Juges de la Cour commencent à porter ses fruits depuis la prise de la présidence du Conseil des ministres par le Congo.
La première décision sans appel, a été le limogeage du Directeur de l’École de formation de l’Ohada qui se trouve au Bénin, la seconde qui est la plus grave et la plus inacceptable a été la mise en Jugement par des ministres de la Justice de 3 (trois) pays membres et d’un ministre des finances du Premier Président de la Cour d’Abidjan sur la base d’un audit qui met en cause 2 (deux) de ses prédécesseurs.
Il faut noter que les 2 (deux) prédécesseurs ne sont pas inquiétés et que la suspension prononcée contre le Premier Président de la Cour dans une curieuse argumentation, prêtant que la sanction ne concerne que sa qualité de Président – Gestionnaire.
En réalité, le Président Serekwase paye le prix de l’indépendance de la juridiction qu’il préside.
Si ce type d’intervention devait prospérer, il serait souhaitable que l’on en revienne au statu quo ante où les exécutifs peuvent tout faire y compris révoquer tout Magistrat dont une décision aurait déplu.
Ce qui se passe à Abidjan rejoint les critiques que j’ai formulées sur notre Justice au plan national.
J’en appelle aux États forts du système que sont le Cameroun qui s’est déjà opposé par le passé à toutes atteintes à l’indépendance des Magistrats de la Cour, à la Côte d’Ivoire siège de la Cour, au Mali dont le Garde des Sceaux est très engagé dans le développement du système Ohada et surtout à nos partenaires bilatéraux et multilatéraux dont les financements sont indispensables au fonctionnement du système.
Entretien mené par
Jean-Bosco Talla


J'accuse...

Réflexion sur une libération à polémiques

La manière par laquelle le Pouvoir gère la ‘’Justice’' expose le Cameroun à l’humiliation, à la risée du monde. Plaçant la Justice aux ordres, aucun dossier n’est jugé conformément au droit et même les pseudo-réformes proposées le sont en dépit du bon sens, en marge des intérêts généraux du pays et au mépris des conventions internationales que nos dirigeants ont librement signées.
Pour sauver l’honneur et la dignité du pays, avant toute chose, le Président Biya doit se séparer de tous ceux qui, de près ou de loin, l’assistent dans le traitement du dossier ‘’Justice’’. Cela commence par le limogeage de messieurs Laurent Esso, Fouman akame, Belinga M’Eboutou, Amadou Ali, Akame M’Foumou, Meva’a M’Eboutou, Issa Tchiroma pour ne citer que les plus en vue dont l’examen des dossiers présentés au Chef de l’Etat vise plus les règlements de comptes que la solution en droit des problèmes qui leur sont soumis.
Je suis au Cameroun l’Avocat principal de Me Lydienne Yen Eyoum. Cette Avocate n’a commis au regard de la loi aucune infraction, mais ses détracteurs ont réalisé l’exploit de la faire condamner par nos Cours et Tribunaux à 25 années d’emprisonnement, à la confiscation de ses biens et autres peines complémentaires. Aujourd’hui, pour empêcher aux hommes épris de justice de s’en émouvoir, ils créent à dessein des éléments de confusion qui, n’ayant rien à voir avec le dossier, poussent à la haine, mettent en avant l’amour-propre et éloignent de toute analyse logique du dossier et des questions de principes que pose le cas. Cela n’honore pas le Cameroun, un pays qui regorge de ressources, aussi bien humaines que naturelles et qui en font de ce fait une vitrine du monde. Ces collaborateurs du chef de l’État, loin d’être irremplaçables, passeront comme leurs prédécesseurs, mais le Cameroun, lui, ne passera pas.
A force de souffler le chaud et le froid, en condamnant implacablement pour ensuite élargir, ils se trouvent face à leurs propres contradictions qu’ils n’arrivent pas eux-mêmes à gérer. Comment s’étonner dès lors de cette vague de polémiques qui agitent et les médias et tout un chacun. Tout le monde y va de son commentaire. Rien à voir avec les préoccupations du pays. En parler facile, comment mettre en liberté un coupable de détournement de deniers publics à un moment où l’on place sur la sellette la lutte contre cette endémie : une chose et son contraire donc. En réalité, cela tient du fait qu’il y a malgré tout une conscience. L’œil était dans la tombe et regardait Caïn.
Il est en effet difficile de voir jeter en prison pour 25 années du chef de détournement de deniers publics un citoyen qui ne s’est pas rendu coupable d’un tel crime, tout simplement parce que l’on n’a ni le courage ni l’honnêteté intellectuelle de reconnaître qu’on s’est trompé dans l’examen du dossier. A force d’être obstiné, de n’avoir pas daigné prêter l’oreille et seulement écouter les explications apportées tout au long de la gestion de ce dossier, ils ont fini par se fourvoyer dans les manipulations et se soumettre aux ordres.
En voulant maintenant rattraper la situation, ils créent un autre problème que beaucoup dénoncent avec raison, une sorte de ‘’ 2 poids-2 mesures’’. On aurait évité une telle querelle si le décret du Chef de l’État avait porté sur une ‘’grâce amnistiante’’, ce qui en d’autres termes aurait signifié que Lydienne Yen Eyoum n’a pas commis les faits mis à sa charge. Le Président de la République aurait ainsi tout simplement redressé une erreur judiciaire. Ceci entre constitutionnellement dans le domaine de ses pouvoirs. Et nous serions restés dans de l’État de droit que nous appelons tous de tous nos vœux. La dignité du pays en serait sauve, car cela nous aurait permis d’éviter le traitement humiliant de la part du gouvernement français qui donne à penser, comme beaucoup le dénoncent, que le Cameroun, de triste souvenir, continue à recevoir de la France des instructions, que dis-je, des ordres pour la solution de ses problèmes.
Ne serait-il pas temps, prenant enfin en compte la volonté populaire, que le Chef de l’Etat songe à renouveler les ‘’hommes’’ qui l’encadrent ?...
Me Yondo Black
* Avocat au Barreau du Cameroun