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Succession présidentielle: La guerre totale

Succession présidentielle: La guerre totale

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Index de l'article
Succession présidentielle: La guerre totale
Vers Etoudi en marchant sur des cadavres
Succession présidentielle: passé, présent et avenir
Louis Paul Motaze: L'Ambitieux silencieux
Rémy Ze Meka: Mourir d'espoir
Edgar Alain Mebe Ngo'o: Le pouvoiriste bling bling
Laurent Esso: Le Magistrat-chirurgien de l'Opération épervier
Franck Biya sur le starting bloc
René Sadi: Le parangon de l'inertie
Broyé par le rouleau compresseur
Mathias Eric Owona Nguini:
Les conditions d'une succession ou d'une transition politique pacifique au Cameroun
Toutes les pages

Vers la nuit des longs couteaux
On peut résumer l’art de gouverner chez Paul Biya par cette phrase de Machiavel. « Les États héréditaires accoutumés à la famille de leur prince sont bien plus faciles à conserver que de nouveaux ; il suffit en effet de n’y pas bouleverser les dispositions établies précédemment et, pour le reste, de temporiser devant les situations imprévues. De sorte que si un prince héréditaire est d’une habileté moyenne, il se maintiendra toujours sur son trône, sauf s’il en est chassé par quelque force irrésistible et même alors, au moindre revers de l’occupant, il le regagnera ». Comme on le sait, Paul Biya est un vrai disciple de Machiavel. Jean-Marie Atangana Mebara ajoute qu’il a beaucoup lu le Bréviaire des politiciens du Cardinal Mazarin, un opuscule qui se termine par les préceptes suivants :

« Aies toujours à l’esprit ces cinq préceptes :
1. Simule ;
2. Dissimule ;
3. Ne te fie à personne ;
4. Dis du bien de tout le monde ;
5. Prévois avant d’agir.
»

Au moment où ses soi-disant lieutenants échafaudaient les stratégies pour le remplacer la tête de l’État, il avait pris sur lui en 2008 de faire modifier la constitution et de lever le verrou de la limitation des mandats, ce qui lui avait permis de briguer un autre mandat en 2011. Une manière de piéger les impatients et de clamer les ardeurs de ces caméléons qui peuplent son univers et le soutiennent le jour et complotent contre lui la nuit. Il avait compris leur stratagème. C’est pourquoi il avait décidé d’engager une opération dite d’assainissement de la moralité publique qui, aux yeux de certains observateurs avertis était non seulement une manière pour lui de se faire une virginité politique de manière à aller à la conquête de nouveaux suffrages dans une posture favorable, mais était aussi un sacrifice rituel permettant d’éliminer les personnalités de son entourage les plus aptes à le remplacer au sommet de l’État, et de positionner un dauphin. La manœuvre était cousue de fil de blanc. Les différents protagonistes l’ont si bien compris que de nos jours les objectifs de ladite Opération ont été détournés. Elle est désormais mise au service des ambitions de ceux qui pensent à la conquête du pouvoir chaque matin en se rasant. La bataille pour la succession de Paul Biya fait rage au sein du RDPC. Au regard de la faiblesse des leaders des partis dits de l’opposition, les protagonistes sont convaincus que le prochain président de la République sera quelqu’un du système, comme en Centrafrique, au Sénégal, au Gabon ou au Burkina Faso. Ils sont nombreux qui affutent leurs armes : Franck Biya,  Laurent Esso, Réné Sadi, Edgar Alain Mebe Ngo'o, Marafa Hamidou Yaya et Atangana Mebara qui ont perdu la bataille mais pas la guerre, etc. Vers un dénouement tragique.

Source: Germinal n°088 du 27 juin 2016


Vers Etoudi en marchant sur des cadavres

Tous les moyens sont bons pour s'accrocher au pouvoir. La manipulation de la constitution devient partout la règle, au Cameroun comme ailleurs en Afrique. La mort et la succession par le fils sont devenues la nouvelle forme d'alternance dans le continent..

Malgré le faux exorcisme des appels et des motions demandant à Paul Biya de se représenter à la magistrature suprême, le débat successoral bat son plein. A juste titre. Puisque malgré la révision constitutionnelle de 2008, il semble avoir un divorce  ou un malentendu entre Paul Biya et ses lieutenants. Malentendu qui se dégage de ses propos pertinent d’un ministre de la République à un opposant, exilé volontaire aux États Unis: « Massa, le patron est vieux, en 2011 il partira. Nous allons faire la politique autrement. Toi et moi, on aura un duel de chevalier ; on va s'affronter ». C’était sans compter avec la volonté d’éternisation au pouvoir de Massa. Conséquence, alors que le chef veut des actions de ses lieutenants pour servir son ambition, ceux-ci par contre s’organisent chaque jour pour sa succession qui peut intervenir à tout moment. Inertie, détournements de deniers publics, opération épervier à tête chercheuse, bref une gouvernance de la tricherie est mise à contribution. Preuve que, même différée la succession présidentielle est déjà là. Ce que témoigne la multiplication des G11, G18, G21 et autres Brutus.
Si on s’en tient à l’esprit et à la lettre de la loi électorale et de la loi constitutionnelle n° 2008-1 du 14 avril 2008 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n° 96-6 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 2 juin 1972, l’élection et la vacance au sommet de l’État sont bien encadrées et se feront, en théorie, sans heurts, malgré les incertitudes et les imprécisions de certaines dispositions contenues dans ces textes.
La loi constitutionnelle susvisée dispose :
«Article 6.- (2) (nouveau) : Le président de la République est élu pour un mandat de sept (7) ans. Il est rééligible.
(4) (nouveau) : En cas de vacance de la présidence de la République pour cause de décès, de démission ou d'empêchement définitif constaté par le conseil constitutionnel, le scrutin pour l'élection du nouveau président de la République doit impérativement avoir lieu vingt (20) jours au moins et cent vingt (120) jours au plus après l'ouverture de la vacance.
a) L'intérim du président de la République est exercé de plein droit, jusqu'à l'élection du nouveau président de la République, par le président du Sénat. Et si ce dernier est, à son tour empêché, par son suppléant suivant l'ordre de préséance du Sénat.
b)  Le président de la République par intérim- le président du sénat ou son suppléant ne peut modifier ni la constitution, ni la composition du gouvernement. Il ne peut recourir au référendum. Il ne peut être candidat à l'élection organisée pour la présidence de la République.
c) Toutefois, en cas de nécessité liée à l'organisation de l'élection présidentielle, le président de la République par intérim peut, après consultation du conseil constitutionnel, modifier la composition du gouvernement.»

Il est certes vrai que parler de succession dans une communauté historique qui se proclame République ayant choisi la démocratie comme système de gouvernement peut paraitre paradoxal. En ce sens, on peut convenir avec Alain-Didier Olinga que « le langage de la succession suppose immédiatement l'existence d'héritiers identifiables, ainsi que celle d'un patrimoine dont on peut hériter. D'un strict point de vue logique, l'on ne devrait pas hériter d'un individu qui n'est pas mort. Rigoureusement parlant, le lexique constitutionnel des républiques démocratiques ne connaît pas la notion de " succession ", laquelle est propre aux États monarchiques organisés autour du changement en principe dynastique à la tête de l'État, la structure gouvernementale ayant quant à elle généralement une légitimité démocratique, adossée qu'elle est à une majorité parlementaire élue au suffrage universel. »
Mais, à l’observation, le changement inéluctable qui se prépare au Cameroun se fera suivant le principe de la transmission dynastique ou monarchique du pouvoir. Étant donné que, même s’il n’existe pas de lien de filiation biologique entre le président actuel et la plupart des potentiels postulants à la fonction présidentielle, tous ceux qui gravitent autour du pouvoir et le servent se perçoivent comme des « fils », des « créatures » ou « des esclaves », du « Père » ou de « l’esclavagiste » Paul Biya.
On ne peut comprendre autrement les propos de Jacques Fame Ndongo, sémiologue et ministre de l’Enseignement supérieur, s’adressant à ses camarades, frères et sœurs de la région du sud : « Nous sommes tous les créatures ou des créations du président Paul Biya, c’est à lui que doit revenir toute la gloire dans tout ce que nous faisons. Personne d’entre nous n’est important, nous ne sommes que ses serviteurs, mieux, ses esclaves »
Même si cette sortie de Fame Ndongo s’apparente à une sorte de bouffonnerie clientéliste qui confine aux comiques de geste et de situation du théâtre où, comme l’a montré l’univers d’Alfred Jarry, le comique côtoie presque toujours le tragique, personne ne peut affirmer de manière péremptoire qu’il se livre à un simple exercice de rhétorique. Cette sortie du sémiologue est révélatrice d’une sorte de « liens de parenté » entre le Père-Créateur et les Fils-Créatures.
Au regard du contexte sociopolitique actuel caractérisé par des rivalités de pouvoir entre les barons et baronnies les plus en vue, les luttes proclamées contre la corruption et le terrorisme, de l’âge de Paul Biya et de ses absences régulières du pays, de longs courts séjours privés en Europe quelquefois, pour ne pas dire le plus souvent, pour des raisons de santé, les observateurs de bonne foi estiment que la guerre de succession a été engagée depuis plus une dizaine d’année. C’est donc à juste titre que Urbain Olanguena estime qu’ « un climat de fin de règne est fortement marqué par la violence de la guerre de succession comme dans la fable du vieux lion malade, en bout de course, et des lionceaux qui se battent férocement pour capter l’héritage »
Les différents protagonistes que sont entre autres, Franck Biya, Laurent Esso, Edgar Alain Mebe Ngo’o, Louis Paul Motazé, Réné Sadi, Rémy Zé Meka, amassent les munitions de guerre et affutent leurs armes. Pour les besoins de la cause, certains créent des sociétés de gardiennage, véritables milices, le plus souvent en usant de prête-noms. D’autres, en plus des réseaux et clans qu’ils forment ou favorisent l’émergence jusqu’au sein des forces de défense et de sécurité, créent - ou font main basse sur – les médias qui seront utilisés le moment venu comme outils de propagande. D’autres enfin usent ou ont utilisé l’Opération Épervier soit pour se faire une clientèle, soit pour éliminer de potentiels concurrents.
La dernière catégorie de protagonistes considère leur filiation biologique ou leur parenté avec le Leader perpétuel comme un avantage comparatif. Compte tenu de la structure encore largement patrimoniale du pouvoir étatique et présidentiel camerounais, leurs chances ne sont manifestement pas nulles, même si elles ne sont pas non plus inéluctables.
Visiblement, on s’achemine vers une guerre totale.
Jean-Bosco Talla


Succession présidentielle: passé, présent et avenir

La transmission du pouvoir depuis l’accession du Cameroun à l’indépendance a toujours obéit à la logique patrimoniale. Paul Biya dérogera-t-il à la règle?
De plus en plus, une rumeur récurrente fait état du dépôt, au cours d’une éventuelle session parlementaire, d’un projet de loi portant révision de la constitution en vue de la création du poste de vice-président de la République, lequel pourrait remplacer le chef de l’État en fonction en cas d’empêchement ou de démission. Cette rumeur fait couler beaucoup d’encre et de salive au sein de la classe politique camerounaise - au sein du RDPC et ses alliés, au sein de l’opposition et de la société civile - où d’aucuns y voient les prémisses d’un « coup d’État constitutionnel ». D’autres au sein du pouvoir estiment par contre que rien n’empêche le président de la République, garant de la stabilité du Cameroun et des institutions d’envoyer un projet de loi allant dans le sens de la création d’un poste de vice-président au cas où s’il se rend compte que c’est en procédant ainsi qu’il pourra assurer une succession paisible au Cameroun. L’enjeu ainsi clairement exprimé est la succession à la tête de l’État du Cameroun dont l’histoire de la vie politique a été marquée par différents épisodes.
Le 23 décembre 1956, l’Assemblée législative du Cameroun (ALCAM) remplace l’Assemblée territoriale du Cameroun (ATCAM). Des élections législatives sont organisées. André-Marie Mbida et son équipe (Cococam et membres affiliés) y prennent part. À l’ALCAM, ceux-ci créent le groupe parlementaire nommé les Démocrates Camerounais (DC), lequel deviendra plus tard le Parti des Démocrates Camerounais (PDC). Ce groupe, composé de 21 membres et dont André Marie Mbida est le leader, participe activement à la mise en place de l’autonomie interne du Cameroun sous tutelle française. Le 16 avril 1957, le Cameroun devient un État autonome. Le député André-Marie Mbida est alors pressenti par le Haut-Commissaire Pierre Messmer pour former le 1er gouvernement camerounais.
Dans la matinée du samedi 11 mai 1957, en application du statut du Cameroun, le Haut-Commissaire commence ses consultations en vue de désigner la personnalité politique susceptible de devenir le premier ministre camerounais. Il reçoit tout d’abord Jules Ninine, Antillais d’origine, président de l’Assemblée législative du Cameroun et président de la Commission des territoires d’outre-mer à l’Assemblée nationale française. Puis, tour à tour, les délégations du groupe d’Union Camerounaise conduite par son président, Ahmadou Ahidjo, alors Conseiller à l’Assemblée de l’Union française ; des Démocrates camerounais conduits par André-Marie Mbida, des Indépendants Paysans conduits par Djoumessi Mathias et de l’Action nationale conduite par Charles Assalé, enfin Charles Okala, non-inscrit et les parlementaires du Cameroun présents à Yaoundé.
Le dimanche 12 mai 1957 à 17 heures, le Député Mbida, Président du groupe des Démocrates Camerounais est chargé par le Haut-Commissaire de former le premier gouvernement camerounais. À sa sortie du palais à 17 h 30 mn, il annonce la nouvelle au Directeur de la Radio Diffusion en précisant qu’il a donné son accord de principe au Haut-Commissaire, mais qu’il ne pourrait lui fournir un accord définitif qu’après avoir procédé aux consultations nécessaires, c’est-à-dire le lendemain (lundi). En fin d’après-midi, le député du Centre s’installe dans un bureau du futur ministère des Finances et commence ses consultations.
Le Mercredi 15 mai 1957 à 16 h 45 mn, Sous la présidence du député Jules Ninine, l’Assemblée législative du Cameroun se réunit pour entendre et se prononcer sur la déclaration d’investiture du premier ministre : M. le Député Mbida. Ce dernier obtient l’investiture de l’ALCAM par 56 voix contre 10 (Ahidjo soutient le programme du premier ministre, tandis que Soppo Priso le critique et déclare que ses amis et lui voteront contre). À peine, cinq ans après son entrée sur la scène politique, André-Marie Mbida devient le premier ‘premier ministre, chef du gouvernement, c’est-à-dire chef d’État de fait de l’État autonome du Cameroun sous tutelle des Nations Unies.
L’accession d’André-Marie Mbida marque la naissance de « la magistrature suprême » du Cameroun pilotée par la France qui a désigné la personnalité chargée de l’incarner et avec la caution d’une Assemblée présidée par un Antillais d’origine, qui l’a investi.
Le 16 février 1958, à peine neuf mois seulement après son accession au pouvoir, Ahmadou Ahidjo, grâce aux manœuvres savamment orchestrées par Jean Ramadier, haut-commissaire français de l’État du Cameroun, fait tomber le gouvernement constitué par André-Marie Mbida en démissionnant avec la totalité des ministres du Nord qui lui sont fidèles. Il le remplace ainsi à la tête de l’exécutif le 18 février 1958.
Ainsi sera opérée, avec la caution d’une Assemblée corrompue, la première succession à la « tête de l’exécutif camerounais », orchestrée par la puissance « administrante » française dont un représentant a illégalement organisé le « limogeage » de la personnalité qui l’incarne.
La démission «surprise» d’Ahmadou Ahidjo, premier président de la République au Cameroun, est demeurée, jusqu’à ce jour – et, peut-être, le sera-t-elle encore pour longtemps – une véritable énigme. Une question demeure sans réponse précise. À savoir : « Comment cela se peut-il qu’un homme qui dirige le pays d’une main de fer, qui a réprimé cruellement toute opposition et toute contestation de son régime, et qui n’est âgé que de 58 ans, décide, tout d’un coup, de se retirer du pouvoir ? » Au lendemain de sa démission, des informations faisaient état de ce que son départ était le résultat d’une supercherie savamment orchestrée depuis la France par des médecins qui l’auraient induit en erreur en agitant l’épouvantail d’une maladie extrêmement grave ne lui laissant aucun autre choix. Pour mettre un terme à cette rumeur, Ahidjo répondra : « Il m’a été prescrit, c’est vrai, de modifier mon rythme de travail, de réduire celui-ci pendant quelque temps afin de prendre un repos nécessaire, réparateur du surmenage qui m’avait fatigué. J’ai pris moi-même et tout seul, la décision de démissionner parce que je crois que le pouvoir n’est pas un apanage personnel, mais un service de l’État et que l’on ne doit pas s’y accrocher envers et contre tout, alors même que l’on n’éprouve, du point de vue de la santé, des difficultés[…] Je pensais simplement que 25 ans à la tête du Cameroun m’autorisaient à croire et à dire que j’avais fait de mon mieux, suffisamment servi mon pays, pour aspirer au repos […] Si j’ai voulu une démission par surprise avec installation de mon successeur dans les 48 heures, je l’ai fait au bénéfice exclusif de M. Paul Biya afin qu’aucune manœuvre, aucune intrigue, aucune compétition, rien, ne puisse gêner sa venue au pouvoir »
En effet, force est de constater que le 29 juin 1979, le président Ahidjo avait fait promulgué une loi portant modification des articles 5 et 7 de la loi constitutionnelle du 2 juin 1972. L’article 5 nouveau donnait au président de la République le pouvoir de nommer un premier ministre qui l’assiste dans l’accomplissement de sa mission, tandis que l’article 7 nouveau disposait qu’ « en cas de vacance de la présidence de la République pour cause de décès, démission ou empêchement définitif constaté par la Cour suprême, le premier ministre est immédiatement investi des fonctions de président de la République pour la période qui reste du mandat présidentiel en cours ». C’est donc en toute légalité qu’en 1982, après la démission-surprise du président Ahidjo, Paul Biya, alors premier ministre, sera investi des fonctions de président de la République. Toutefois, il convient de relever que cette démission du président Ahidjo avait été précédée, le 28 octobre, d’un voyage « éclair » du côté de la France, à Grasse - avait-il prévenu Samuel Eboua, pour soi-disant consulter ses médecins - pendant le week-end de la Toussaint, période fort peu propice en France aux consultations médicales de routine (Gaillard, 1994). À Grasse, le lundi de la Toussaint, avant son retour au Cameroun, il reçoit à déjeuner le conseiller du président français François Mitterrand pour les affaires africaines face à qui il sort le grand jeu de sa maladie. Aussi, le 3 novembre 1982, à l’aéroport de Yaoundé où il descend de l’avion en se faisant passer pour un grand malade, la mise en scène grotesque de son retour laisse-t-elle les Camerounais dubitatifs quant aux raisons profondes de sa démission. Son épouse Germaine Ahidjo, qui l’accompagnait ce jour-là paraissait d’ailleurs radieuse pendant que son mari simulait la maladie (visage crispé, pas pesant) en se faisant passer pour un grand malade, déclarera plus tard : « A ce moment-là, j’ai mal joué mon rôle ». (Gaillard, op. cit.)
Telles sont en raccourci les circonstances dans lesquelles s’est déroulée la deuxième succession à la « tête de l’exécutif camerounais », plutôt mystérieuse et discutable, vraisemblablement sous l’instigation de la France qui aurait « recommandé » à Ahidjo, selon une certaine opinion, une retraite anticipée pour cause de maladie et, cette fois-ci, sans la caution d’une Assemblée nationale finalement réduite à un rôle institutionnel très secondaire.
Après 34 ans passés à la magistrature suprême, Paul Biya bat de 9 ans le record de son prédécesseur Ahmadou Ahidjo qui lui aussi était resté sans discontinuer à la tête de l’État pendant 25 ans lorsqu’il quittait le pouvoir le 6 novembre 1982. Il sait mieux que quiconque que « dans toutes les affaires humaines, y compris la vie elle-même, la durée finit par dégouter » (Lansiné Kaba, 1995, 100-101).  À  84 ans sonnés, d’aucuns redoutent les conséquences que sa disparition éventuelle, que d’aucuns considèrent ironiquement comme un coup d’État biologique, pourrait avoir sur la marche politique et socioéconomique du Cameroun, même si la Constitution encadre l’accession à la magistrature suprême
La rumeur persistante sur l’imminence d’un projet de révision constitutionnelle visant l’instauration d’un poste de vice-président qui serait le successeur constitutionnel du président Paul Biya qui quitterait le pouvoir avant ou peu après 2018, l’arrivée des forces militaires américaines sur le territoire camerounais, notamment à l’extrême-nord du Cameroun où elles sont positionnées officiellement pour contribuer à trouver une solution à la crise politico-militaire et sociale appelée terrorisme qui sévit dans cette région, la guerre succession de Paul Biya visiblement ouverte qui se traduit par la présence de tout un gouvernement dans les geôles de la République, les frontières poreuses du territoire camerounais et la sécurité nationale constamment mise à rude épreuve ne peuvent laisser des observateurs avertis indifférents.
Fort de ces expériences historiques, du climat social et politique au Cameroun et dans la sous-région Afrique centrale, le public et des observateurs avertis, qui scrutent ces évènements à la lumière des transitions politiques au Togo, au Gabon, en Côte d’Ivoire, au Sénégal, en Guinée Conakry, au Mali et, pourquoi pas, dans le monde maghrébin, se posent des questions. Quels sont les éléments permettant d’affirmer que la guerre de succession de Paul Biya à la magistrature suprême est désormais engagée ? Est-il possible d’identifier les forces en présence ? Si oui, lesquelles ? Au regard de l’actualité, quels sont les scenarii probables ? Assisterait-on à une succession verrouillée ou déverrouillée ? Les institutions politiques et juridictionnelles camerounaises sont-elles suffisamment fortes pour assurer une transition démocratique et pacifique à la tête de l’État ? Quel rôle jouerait Paul Biya dans la guerre de succession ouverte au sommet de l’État ? Ses postures, actes et silences permettent-ils d’appréhender comment il prépare sa sortie ? Comment pourraient réagir les forces de défense et de sécurité camerounaises en cas de crise politique majeure ? Adopteront-elles une posture de neutralité républicaine ? La communauté internationale, dont notamment la France et les partenaires bilatéraux et multilatéraux, peut-elle être écartée du jeu politique camerounais relatif à la succession au pouvoir ? Sinon, quels sont ses moyens concrets d’influence ? Un poste de vice-président, pour quoi faire ? À quand la mise en place du Conseil constitutionnel ?
Des questions auxquelles il est impératif de trouver des solutions si l’on veut envisager une succession une transition politique pacifique au Cameroun.
Jean-Bosco Talla


Louis Paul Motaze: L'Ambitieux silencieux

Longues interviews qui occupent deux pages de certains journaux par-ci, profil haut, rencontres avec les journalistes et papiers favorables par-là, son déploiement médiatique ces derniers temps ne laisse pas les observateurs avertis indifférents. Il est selon certains sources en quête de visibilité et utilise les médias pour soigner son image de présidentiable ayant la maîtrise des questions économiques.
Louis Paul Motaze, n'est pas loin de rouler sur l'or. Il a eu le temps d’amasser une fortune colossale et même de s’offrir des pied-à-terre à l’étranger. Il n’a pas hésité à envoyer ses enfants dans les écoles les plus huppées.
Dans la perspectives d’une succession familiale, il pense qu’il a sa chance, l’atout majeur selon lui étant son porte-monnaie, d’où disent ses détracteurs, sa boulimie financière. A tort ou à raison des contempteurs disent de lui qu’il est un « frappeur », la dernière « frappe » en date ayant été lors de la l’organisation de la conférence internationale, Investir au Cameroun, au cours de laquelle le trésor public aurait été soulagé de 12 milliards de franc CFA dévalué. Pour Rien!!!


Rémy Ze Meka: Mourir d'espoir

Malgré un parcours bordé de cimetière, Remy Ze Meka s’active dans l’ombre pour revenir aux affaires. Son nom est cité dans l’affaire de l’assassinat du colonel Nnanga Abo’o Pétain, assassiné, selon la veuve, parce qu’il aurait refusé de s’associer à la bande à Ze Meka pour renverser les institutions républicaines après avoir envoyé Paul Biya Ad patres. L’affaire des 9 de Bépanda a donné l’occasion au ministre délégué à la Défense de faire étalage de sa volonté diabolique d’arriver aux premières cimes du pouvoir. Avec le capitaine Abah Nzengué à la manœuvre, Zé Meka a pu faire échouer, une opération de lutte contre le grand banditisme. Au dernier réajustement ministériel, il était annoncé à la Délégation générale de la sûreté nationale, en remplacement de Martin Mbarga Nguele. C’était sans compter avec les dribbles légendaires de Paul Biya


Edgar Alain Mebe Ngo'o: Le pouvoiriste bling bling

Ses détracteurs disent de lui qu’il aime et qu’il a une rancune tenace. Spécialiste des coups fourrés, sa main se profite derrière les démêlés judiciaires de Polycarpe Abah Abah. Dans son dernier ouvrage, Jean-Marie Atangana Mebera déclare avoir été incapable de réconcilier les deux frères ennemis. Lors du dernier réajustement, il se dit qu’il avait été informé quelque temps auparavant du fait qu’il devait être nommé ailleurs qu’au ministère de la Défense. Pouvoiriste invétéré, il aurait préféré être nommé au ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation. René Sadi appréciera. Il contrôle plusieurs médias, radio et presse écrite qu’il saura utilisé le moment venu. Accusé à tort ou à raison dans l’affaire du détournement de 310 millions au ministère de la défense, il a su utilisé ses médias pour se blanchir.


Laurent Esso: Le Magistrat-chirurgien de l'Opération épervier

Le taiseux aux allures de chat tigre trône au ministère de la Justice. Pour quelle destinée?
Beaucoup retiennent de son passage au ministère de la Défense (Mindef) les dissensions avec le chef d'état-major des armées, et plus cocasse encore, avec le secrétaire d’État à la Gendarmerie, Remy Ze Meka. Là aussi, le chef des armées avait dû sacrifier le ministre. Zé Meka est enfin porté à la tête du ministère de la Défense. 
En tenant compte des réalités camerounaises on peut se demander qui est l’actuel ministre de la Justice. Non pas que l’on ignore l’existence de Laurent Esso, ce fils Dualla dans le Canton Deido, département du Wouri, province du littoral. Ce que l’on sait également de lui, c’est qu’il est chrétien catholique d’obédience Jésuite, régulièrement vu du côté du collège Libermann, membre influent et discret du Ngondo. Il est donc originaire de cette minorité à laquelle le chef de l’État semble accordé assez d’attention.
Sur le plan purement politique, il a été Directeur du cabinet civil de la présidence de la République, ministre de la défense, ministre des Relations extérieures 2006, ministre d’État Secrétaire général de la présidence de la République. Magistrat de formation, il est présenté comme l’un des bulldozers du chef de l’État et l’un des prétendants au trône. Parler de Laurent Esso, c’est s’aventurer presque dans l’inconnu. Tant cet homme est insaisissable sur tous les points. En somme, l’on aura constaté qu’à tout moment où le chef de l’État a besoin de faire le ménage dans une administration quelconque, c’est lui qui est envoyé. Cela a été constaté au niveau de l’armée où, à un moment donné, les officiers supérieurs ont été accusés à tort ou à raison de plusieurs maux. C’était lui lui que l’homme du 6 novembre 1982, avait envoyé pour faire le ménage. Même situation au ministère des Relations extérieures où il avait fait ce qu’il avait pu. Ici ou ailleurs, les avis sont toujours partagés sur la gestion des dossiers à lui confiés par Paul Biya.
Sa nomination au Secrétariat général de la présidence de la République a été aussi perçue, au-delà du côté purement technique, comme une « mission spirituelle ». On se souvient que depuis des années, les Secrétaires généraux de la présidence ont toujours été présentés comme des grands maîtres de la Rose croix, de la Franc-maçonnerie ou encore de l’ordre des Rameaux. Dans cette bataille des loges, Laurent Esso serait lui-même admirateur du premier ordre de la Rose croix. Certaines nominations qu’on lui attribuait viendraient de cela. A titre illustratif, on peut citer le cas de Dayas Mounoumé, ex-Directeur du Port Autonome de Douala, en fuite, neveu du vieux Dayas, ancien parrain de certains dignitaires du pays dans la Rose croix dont Paul Biya (Lire de livre de Eballe Angounou). Ce cas et bien d’autres montraient que la mise à l’écart des Francs-maçons était engagée. Lorsqu’on regarde les hauts cadres arrêtés dans le cadre de l’opération Épervier, plusieurs d’entre eux sont soupçonnés d’être francs-maçons. Ses mouvements seraient donc essentiellement «sécuritaires» pour le président Paul Biya. Le chef de l’État l’avait fait avec Titus Edzoa. Après sa mise à la touche, la chasse aux rosicruciens avait commencé : Agbor Tabbi et Makon Ma Weignong par exemple avait payé le prix fort leur appartenance à cet ordre avec l’arrivée aux côtés du chef de l’État d’un proche collaborateur … Franc-maçon. On peut alors comprendre pourquoi certains cadres de la présidence avaient changé le fusil d’épaule pour devenir rosicruciens.
Mais peut-on se dire que son retour au ministère de la justice consolide en lui des prétentions pouvoiristes? Certes Laurent Esso répond à cette question par la négative, comme d’ailleurs tous les autres. Une attitude dictée par un principe du jeu politique selon lequel : il faut toujours penser au pouvoir mais jamais le déclarer. Toujours est-il que des observateurs de la scène politique camerounaise relèvent à juste titre, les fait étant têtus, que le blanc des sawa entretien tout une stratégie communicationnelle acquise à sa cause - on ne sait pour quelle finalité ? - avec comme lieutenants à la manette, certains confrères bien connus, dont le patron du groupe Anecdote et son directeur général et parfois Jeune Afrique.
Dans la même lancée, ses détracteurs qui estiment que l’ascension à la fonction présidentielle impose comme contrainte l’intégrité ou l’obligation de rendre compte, accusent le ministre de la Justice, Garde des sceaux de partialité dans la gestion de l’Opération Épervier qu’il dirige des mains de maître. On ne comprend pas toujours, l’empressement des journaux aux ordres évoqués ci-dessus à demander l’édiction d’un mandat d’arrêt international contre Essimi Menye, à qui un mandat de comparution venait d'être servi , alors même que Dallas Mounoumé qui a écopé 15 ans de prison est toujours en fuite sans que cela n’écœure curieusement le garant de l’exécution des décisions de justice ; de même, la protection d’Amougou Belinga, chef autoproclamé de la cellule de communication de Laurent Esso, dans le dossier Campost, à qui on demande de payer 700 millions de FCFA. La même faveur qu’il accorde à Atanga Nji, mis en cause dans le même dossier, s’apparente à un brouillage stratégique.
La même opinion, exige du Minjustice, des clarifications sur son niveau d’implication dans le compte Beth, à propos du dossier Marafa/Yves Michel Fotso. Puisqu’en bon magistrat, on ne comprend pas son intrusion dans l’instruction de ce dossier alors confié aux mains expertes du juge Pascal magnaguemabe dont il a au passage demandé la radiation du corps de la magistrature. N’eut-été la vigilance du président de la République lors du récent conseil supérieur de la Magistrature, ce magistrat serait déjà dans la rue pour avoir fait son travail.
L’obligation de rendre compte lui est également opposée dans l’affaire du Rio Del Rey, baptisée "affaire Bibi Ngota". Puisque si les documents présentés étaient faux, son contenu était-il aussi faux ?
Junior Etienne Lantier


Franck Biya sur le starting bloc

Contrairement aux enfants des autres chefs d'Etat africains, Franck Emmanuel Olivier Biya, fils aîné du chef de l'Etat camerounais, fait semblant de ne pas s'intéresser au pouvoir de son père, encore moins à la question de la succession
Les camerounais peuvent compter au bout des doigts d'une main le nombre de fois où Franck Biya a été au-devant de l'actualité. Les quelques rares fois qu'il a focalisé l'attention de l'opinion, il ne s'est pas agi des questions du pouvoir, même s’il avait été vu à Douala aux côtés de son père lors de la pose de la première pierre du 2ème pont sur le Wouri. Il est vrai que le fils aîné du président de la République est conseiller de son père, mais c'est à peine s'il a déjà pris part aux meetings du Rdpc ou s'il a une carte de parti. Les générations actuelles de jeunes camerounais arrivent parfois à ignorer que  Paul Biya a un autre enfant en dehors de Junior et de Brenda. Effacé, Franck Biya est un homme des affaires foireuses et par ailleurs victime de déception amoureuses à répétition et ami des home d’argent. L’affaire des titres de Camtel l’avait projeté au-devant de l’actualité. Il a réussi quelques placements de ministres, dont Ousmane Mey qui roule aujourd’hui pour lui-même. Conseiller de son père, dans quel sens ? - il est régulière en mission auprès des chefs d’Etat. Ce qui fait dire son père le prépare pour la succession.


René Sadi: Le parangon de l'inertie

Pour ses thuriféraires, René Sadi, bien que sommeilleux, est incontestablement le prochain président du Cameroun. Dans leur argumentaire, ceux-ci soutiennent qu’il est le fils spirituel caché d’Ahmadou Ahidjo. Ce faisant, plus que tout autre candidat du RDPC, il peut compter éventuellement sur une certaine classe politique française nostalgique d’Ahidjo, mais aussi sur le soutien des islamo-peuls du groupe géopolitique baptisé Grand Nord. Il y a étudié et parle bien le peulh. Un atout majeur qui se greffe à celui de la situation géographique de son Yoko natal situé à équidistance du nord et du sud, et à l’embastillement du comité central et du bureau politique du RDPC du temps où il était secrétaire général. Même s’il éprouve quelques difficultés à imposer ses hommes au poste de gouverneurs ainsi qu’au niveau des services centraux de son ministère, toujours est-il que le successeur Sadi tisse sa toile au niveau de la préfectorale et peut compter sur la puissance financière du groupe Bocom dont on dit à tort ou à raison qu’il sera le parrain de l’ombre. La prorogation récente des carrières de plusieurs préfets et sous-préfets est présentée au Minadt comme prime de fidèlité offerte par le successeur Sadi à ses obligés d’un genre nouveau. Elle participe de sa stratégie de conquête du pouvoir, même si les stratèges de Paul Biya veulent instrumentaliser cette mesure pour la présidentielle anticipée. Cette mesure est de tout même curieuse, au moment où les fonctionnaires se retrouvant dans la même situation sont appelés sans manière à faire leurs droits à la retraite.
Source: Germinal, n°087.


Broyé par le rouleau compresseur

Marafa Hamidou Yaya: complice intellectuelle de ses ambitions politiques

Mais pourquoi avait-il suggéré au président Biya de prendre sa retraite. Cette suggestion lui a été fatale. Récompense 25 puis à 20 ans de prison ferme pour complicité intellectuelle de ses ambitions présidentielle. La machination n’a pas échappé aux sourds, muets et aveugles de naissance.
Pour les uns, c’est est un impatient qui rêvait d’occuper le fauteuil présidentiel par tous les moyens. Pour les autres, il est plutôt un courageux qui a pris le risque de conseiller à Paul Biya d’entrer dans l’Histoire en quittant le pouvoir en 2011.
Son autre pêche est, aux ses détracteurs, sa proximité supposée avec la droite française, et l’establishment étatsunien. Marafa Hamidou Yaya est perçu comme un adversaire de poids. Ce d’autant plus que l’homme a su se forger une personnalité d’homme d’Etat. Ses fameuses Lettres ouvertes à Paul Biya ont renforcé son aura. Pour ses thuriféraires, son arrestation-incarcération-condamnation est un moyen de maintenir le natif de Garoua hors-jeu.

Polycarpe Abah Abah/Urbain Olanguena Awono

Amadou Ali expressément demandé la tête de Abah Abah à Me Yen Eyoum Lydienne aujourd’hui, injustement incarcérée à la prison centrale de Kondengui. Elle paie le prix de son niet opposé à la volonté de nuire Abah Abah. Les Camerounais de bonne foi savent que c’est sous l’ère Abah que le Cameroun a atteint le point d’achèvement de l’Initiative.
Que dire aussi d’Olanguena Owono ! Son procès a été ubuesque. Son tort, être compétent. Le dictionnaire spécialisé de certains magistrats de la Cour suprême ne fait pas encore la différence entre une subvention et un marché public. Les observateurs attentes que les ministres ayant accordé des subventions aux associations, ONG et syndicats soient traduits devant les tribunaux pour détournement de deniers public. La compétence est un délit

Jean-Marie Atangana Mebara: Triple condamnation pour loyauté et fidélité

Pour briser son éventuel destin présidentiel, les membres des réseaux tapis autour du chef de l’Etat ont accusé l’ex SGPR d’avoir tenté de l’assassiner à travers un cercueil volant : l’Albatros.
Le 3 août prochain, il aura passé 8 années à la prison centrale de Yaoundé-Kondengui et a déjà écopé trois peines privatives de liberté, de 15, 20 et 25 ans de prisons à l’issue des procès en accordéon. Sûrement qu’après sa mort, il se réincarnera, renaîtra pour revenir terminer ses peines de prison. Il ne recouvra la liberté qu’à la deuxième réincarnation.
Une certaine presse, visiblement embastillée par des politiciens aux méthodes peu orthodoxe avait achevé son assassinat social en le présentant au public comme le leader d’une nébuleuse appelée G11. De toute façon, ce qui ne tue rend fort.


Mathias Eric Owona Nguini: "Les formes de la succession seront liées à des dynamiques critiques"

Germinal: Visiblement la question de la succession de Paul Biya ne fait pas débat au sein du Rdpc. De même, les responsables de ce parti politique font feu de tout bois pour empêcher tout public autour de cette question. Qu’est-ce qui d’après vous explique ces attitudes des responsables du Rdpc ? Autrement dit pourquoi la question de la succession de Paul Biya est-elle taboue au sein du RDPC.
Mathias Eric Owona Nguini: La question de la succession du Président Paul Biya ne peut qu’être saisie par la censure politico-discursive dans un ordre gouvernant basé sur le pouvoir perpétuel au sein duquel le Leader présidentialiste est posé en véritable Totem étatique. Dès lors, comme la règle fondamentale du jeu est que le Président perpétuel dure le plus longtemps possible et s’inscrit dans une perspective d’éternisation gouvernante, évoquer sa succession, pour ceux qui sont conviés au festin absolutiste-présidentialiste, c’est «cracher dans la soupe»!!!

Malgré la persistance de ce tabou, il reste qu’une bonne partie de l’opinion publique estime que la guerre de succession a été engagée depuis bientôt dix ans au sein du Rdpc. Quel crédit accordé à cette opinion ? Quels sont les éléments pouvant permettre au commun des Camerounais d’affirmer que cette guerre de succession est bel et engagée ? Et comment identifier les forces en présence ?
La guerre de succession est bel et bien engagée sur la base des rivalités de pouvoir entre les barons et baronnies les plus en vue depuis 2001. Elle s’exprime dans des intrigues courtisanes au cours desquelles des barons puissants ou influents du Renouveau ont dû subir les manœuvres de leurs concurrents et des coteries rivales les accusant auprès du Chef central et de son «entourage de Cour» de convoiter sa position étatique et politique suprême. C’est à cette lutte qu’il convient  d’associer les violentes campagnes de presse qui sont orchestrées par des officines clientélistes et pouvoiristes contre des Barons du Régime, suspectés à tort ou à raison de convoiter la Présidence comme Position centrale et suprême dans le Jeu politique (Edouard Akame Mfoumou, Joseph Owona, Marafa Hamidou Yaya, Amadou Ali, Jean Marie Atangana Mebara, Polycarpe Abah Abah, Edgar Alain Mebe’e Ngo’o,René-Emmanuel Sadi,etc.)
Les forces en présence sont constituées des coteries liées aux Barons engagés directement dans les jeux de positionnement, ces coteries se recomposant de manière opportuniste quand les Barons crédités d’ambitions ou de chances présidentielles sont victimes de disgrâces administrées par leur Mentor (le Monarque présidentiel), surtout quand la mécanique intrigante de neutralisation fait passer ces barons au rouleau compresseur politico-judiciaire de l’opération «Épervier», leurs obligés ou protégés se cherchent de nouveaux Parrains et Patrons dans l’Orthodoxie clientéliste qu’est l’Appareil gouvernant.

Sur quoi cette guerre de succession pourrait-elle débouchée ?
La guerre de succession qui s’est jouée jusqu’ici de manière feutrée à travers des jeux de brigues et d’intrigues pourrait prendre un tour violent si les Barons et Baronnies qui sont intéressés par l’accès à la Présidence considéraient que l’échéance fatidique de la succession du Président en Fonction était sur le point d’aboutir. Il n’est pas difficile d’imaginer que chacune de ces coteries se positionnerait de manière à jouer serré et même à pratiquer un jeu dur fait de coups tordus et de coup bas, un jeu pouvant même faire appel à des démarches de liquidation physique ouverte ou sournoise de rivaux craints. Il ne faut pas négliger l’éventualité d’un durcissement physique de ces rivalités entre factions gouvernantes dès lors capables de recourir à de gros bras ou barbouzes pour entreprendre de neutraliser les concurrents redoutés. Il convient de prendre la mesure des risques qui sont liés à une militarisation des rivalités seigneuriales et baronnales pour l’accès au Centre présidentiel de gravité. Les Grands Barons du Renouveau ont des capacités d’installer le Cameroun dans une lutte sévère et âpre de pouvoir pouvant dériver vers une guerre civile fort destructrice!!! Ne les sous-estimons pas sur ce terrain!!!

De nos jours, quel peut donc être l’intérêt, pour le Cameroun, d’un débat public sur la succession au sommet de l’État ?
Un débat public sur la succession au sommet de l’État du Cameroun a le mérite de contribuer à une réappropriation de la question qui est en fait interceptée par l’establishment politico-institutionnel et surtout par l’appareil gouvernant du Régime Biya-RDPC-Renouveau qui veut le confiner dans des Cercles politico-oligarchiques et politico-initiatiques. Ce débat a aussi pour vertu de permettre par les échanges contradictoires qui vont se faire à son sujet, que la République apprenne à examiner sur le mode de la réflexion politique et citoyenne ou même de la réflexivité intellectuelle ou savante, à s’exprimer sur ses évolutions futures , de manière à mieux cerner les risques et les dangers qui pourraient se présenter et de se donner les moyens d’anticiper sur des évolutions périlleuses. Par ailleurs, susciter et faire mûrir ce débat sur la succession, c’est refuser que celui-ci soit envisagé sur des bases monarchiques ou patrimoniales ou oligarchiques et clientélistes, dans des conditions où la puissance citoyenne ne sera pas en mesure de s’exprimer, de s’orienter et de s’organiser afin d’être en mesure d’user de sa plénitude souveraine pour décider démocratiquement de cette «succession». Ce débat ne saurait être abandonné aux mains du Président perpétuel, de ses oligarques princiers et seigneuriaux ou de son appareil gouvernant à la structure réelle toujours autocratique et monopoliste.

Au regard de l’âge de Paul Biya et de son absence régulière du pays, de longs courts séjours privés en Europe quelquefois, pour ne pas dire le plus souvent, pour des raisons de santé, peut-on comparaît la situation actuelle du Cameroun avec celle de la Tunisie de Bourguiba avant le coup d’État de Ben Ali ? Peut-on s’acheminer vers un scénario à la Ben Ali ?
Il y a certainement des liens entre la Tunisie du Bourguibisme décadent et le Cameroun du Biyaisme déclinant dans la structuration de la Gouvernance du Maître central présidentiel et dans les postures des factions courtisanes et partisanes en alerte par rapport à l’éventualité d’une succession que ces Barons et Baronnies désirent sur un mode monarchiste et patrimonialiste ou sur un mode casté ou oligarchique. Toutefois, compte tenu de la structuration des mécanismes politico-administratifs, politico-manoeuvriers et politico-sécuritaires du Régime, un scénario à la Bourguiba est peu probable même s’il n’est pas impossible. Les Barons et Baronnies se surveillent et s’épient trop pour laisser que l’un des Seigneurs-Vassaux du Prince-Président puisse accumuler au  seul profit de sa coterie de pouvoir, les ressources de coordination qui seront nécessaires pour réussir un putsch  même constitutionnel à la Ben Ali !!!! Par ailleurs, le précédent d’avril 1984 ne plaide pas en faveur d’une telle éventualité, car chacun de ces Initiés sait quel est le coût d’un putsch raté, qu’il soit violent ou pas. Le Jeu du Présidentialisme perpétuel est délicat et peut être cruel pour qui convoite la Cathèdre présidentielle!!!

Il y a quelques années dans nos colonnes, vous esquissiez les scénarii possibles de la succession au sommet de l’État. Ceux-ci sont-ils encore d’actualité ?
Oui ces scénarios sont toujours envisageables même s’ils ne le sont pas au même titre!!! Cela dit, la logique d’évolution de la situation du Cameroun semble avoir créé des contraintes assez sévères pour les plus doux de ces scénariii. Cette Logique semble conforter ceux de ces scénarios qui ont une configuration épousant des contours de conjonctures de crise. Il semble que l’une des marques du chaos lent qui modèle de manière dominante la trajectoire du Cameroun que les formes de la succession seront liées à des dynamiques critiques.

Au regard du contexte sociopolitique actuel caractérisé par les luttes proclamées contre la corruption et le terrorisme, quel le scénario le plus probable ?
En clair cela signifie que la Conjoncture de succession et son inscription durable seront porteuses et révélatrices de puissantes décharges de violence dont les scénarios se distinguent surtout par la durée plus ou moins longue de ces processus. Le niveau de dégradation, de corruption des institutions et de la constitution rendent presqu’impraticable toute dynamique non violente de succession.
Il n’y a pas de manière inexorable un scénario dominant quant au schéma situationnel et événementiel. Par contre, il y a des Arborescences évolutionnelles privilégiées selon que la logique de succession s’engage de façon institutionnelle et légale ou de façon extra-institutionnelle et extra-légale, selon que cette logique intervient en cas de disparition fatale du Président en Fonction ou en cas de Démission avec Parrainage ou Non-Parrainage de son Successeur ou même dans un scénario improbable, mais pas impossible d’Insurrection contre le Régime actuel ou d’Insurrection pour l’empêcher de se prolonger après une disparition de son Chef central. La logique des Arborescences semble indiquer que même si le scénario de succession se déroule de manière institutionnelle, rien ne garantit qu’il ne pourra pas dérailler. Les chances de crise dominent quand on envisage les formes de la succession à la tête de l’État au Cameroun. Ce qui est clairement exclu par les mécanismes du Système institutionnel et gouvernant camerounais existant du fait de sa nature néo-coloniale et endo-coloniale, c’est une Succession fondée sur une alternance démocratique par la voie d’élections libres profitant à un politicien d’opposition et à sa coalition de soutien.
Au regard des faits et gestes de Chantal et Franck Biya, notamment la pause de la première pierre et l’inauguration du Centre hospitalier de recherche et d’application de la chirurgie endoscopique et reproduction humaine pour l’une et pour l’autre les études récentes et ses voyages ou missions auprès de certains chefs d’État, des Camerounais pensent que l’hypothèse d’une succession familiale est la plus plausible. Qu’en dites-vous?
Avec ce type de système institutionnel et gouvernant marqué en pratique par le Centralisme et le  Monarchisme présidentiels qui sont même en mesure de permettre au Pontife présidentiel d’exercer une Emprise patrimoniale et personnelle sur les Circuits étatiques, la tentation dynastique et népotiste n’y relève pas de la spéculation. Cette Succession familiale est une Hypothèse de travail à prendre au sérieux et pourrait se loger dans une Stratégie de Ticket ou le Président-Successeur-Héritier serait cornaqué en apparaissant d’abord institutionnellement comme vice-président accompagnant le Président Eternitaire dans une Mandature qui lui serait cédé en cours d’exercice sur une base en fait patrimoniale et familiale...

Cette succession familiale peut-elle être acceptée sans heurts par les Camerounais ?
Non. Une telle perspective ne pourra pas se dérouler sans faire face à des Courants d’Hostilité qui ne seront autre chose que des Explosions émotionnelles gérables par la coercition et la corruption s’ils ne sont pas fortement structurés aux plans politique et stratégique. Il faut savoir que la perspective de tumultes politiques puissants ne suffira pas nécessairement à décourager les cliques et camarillas gouvernantes qu’une telle évolution arrange!!! Cela dit ceux qui veulent manufacturer une telle perspective doivent savoir que ce serait jongler avec des grenades!!!!

Depuis quelque temps, le secrétaire général du comité central du RDPC fait le tour du Cameroun, officiellement pour installer les responsables de ce parti. Serait-il en pré-campagne pour son propre compte, pour celui du président national de leur parti ou pour un autre un candidat ?
Non le Secrétaire général du comité central du RDPC n’est pas en campagne pour son propre compte. Il se met en action dans le cadre du Manège politique habituel du Gouvernement perpétuel qui tourne toujours au seul profit du Seigneur Présidentiel Installé !!! S’il lui venait de tenter de manoeuvrer à son profit, le Secrétaire général serait remercié  sèchement et impitoyablement par son Patron politique !!! Dans la situation actuelle, personne, pas même le Chef central ne pourra sans faire face à une puissante adversité externe au RDPC, mais aussi interne au Parti  présidentialiste d’État, utiliser cette machinerie pouvoiriste annexé à la puissance étatique au profit d’un autre candidat que le «candidat naturel», c’est-à-dire le Leader étatique !!!. En tant que Parti d’État dominé par des États-majors d’oligarques néocoloniaux et endocoloniaux, le RDPC ne peut servir directement qu’un Leader monopoliste contrôlant déjà le Pouvoir étatique.

Pensez-vous comme certains le souhaitent et le soutiennent que la succession de Paul Biya obéira à un pacte non écrit entre lui et son prédécesseur, Ahmadou Ahidjo, c’est-à-dire au fameux axe nord-sud ?
Un tel Pacte a été peut-être conclu. Il reste à savoir s’il y avait des co-contractants ou des témoins et si ceux-ci au cas où les choses se sont passées ainsi, sont encore vivants et capables d’obliger le Principal bénéficiaire qui serait le Président Biya de tenir ses engagements. Par ailleurs, quand on note le bouillonnement pouvoiriste politico-communautariste qui travaille le Cameroun, il est douteux que des acteurs sociaux liés à d’autres foyers régionaux laissent jouer une nouvelle fois sans rien dire ni rien faire, ce jeu de balancier que le Pr Joseph Owona a appelé Ping-Pong Nord-Sud.

Que pensez-vous de cette affirmation attribuée à Amadou Ali, alors ministre de la Justice qui selon wikileaks, estime que le Septentrion soutiendra Biya aussi longtemps qu’il voudra rester président, mais n’accepterait pas un successeur qui soit un autre Béti/Boulu, ou un membre du groupe ethnique Bamiléké ?
Le Grand Baron qu’est Amadou Ali est le seul parmi les Oligarques encore aux Affaires à avoir été à un niveau gouvernemental sous le Président Ahmadou Ahidjo et à être resté sans rupture à ce niveau de responsabilités sous le Président Paul Biya. Il évoque la situation avec des perspectives communautaristes qu’il n’est pas le seul à partager et que beaucoup d’autres - même sans être des milieux gouvernants ni sans être ressortissants de la même aire générationnelle - partagent!!! Cela indique combien la situation de l’après Biya pourra être compliqué!!! Rien ne nous dit cependant que seul l’avis des Barons et des Baronnies du Régime du Renouveau comptera à l’heure H, même s’il faut tenir compte du fait que ces Niches d’intérêt escomptent avoir au moins un «Veto-Power» à utiliser dans le Jeu de la Succession commodément désigné sous le nom d’«Après Biya»

Plus généralement, doit-on envisager la succession présidentielle au Cameroun sous le prisme ethno-régional ?
Dans le Principe, en s’en tenant à une Normativité républicaine d’orientation souverainiste, la succession à la tête de l’État n’est pas à envisager selon une optique politico-communautariste comme celle d’une lecture Ethno-régionale. Pourtant, la vérité sociologique et anthropologique montre que ces lectures nombrilistes prolifèrent à tous les niveaux de la formation sociale camerounaise, indiquant que même derrière le Costume républicain peuvent transparaître les bijoux de la Tribu !!!  Nous devons veiller à ce que ce tropisme communautariste ne ruine pas la cohésion nationale supra-communautaire. Il importe aussi que le débat sur la succession souligne et soulève les ambiguïtés ou ambivalences mentales autant que comportementales des Camerounais sur ce point. Ce qui est important, c’est la consistance politico-morale, politico-culturelle, politico-intellectuelle, politico-idéologique, politico-stratégique et politico-technique du Postulant aux Fonctions présidentielles, c’est son sens de Dirigeant Intègre, Juste, Sérieux, Discipliné, Pondéré, Patriote, Travailleur, Dynamique, Créatif et attentif à la prise en compte de la diversité des intérêts sociaux en même temps qu’à l’impératif supra-communautaire de la cohésion nationale et à l’exigence de la légalité républicaine ou à la valeur de l’intérêt général.
Ce n’est pas un fait relevant du simple hasard si la lecture ethno-regionale de la Succession est prisée par de nombreux Camerounais. Cela est révélateur des Codes de Perception et d’Appropriation de la Réalité sociale existante qui sont fortement institués dans la vie quotidienne ainsi que dans la Dynamique systémique de la Société étatique camerounaise. Cet état de choses montre la prégnance persistante des habitus communautaristes de Type ethno-régional ou de Type ethno-confessionnel dans une Société étatique camerounaise qui se présente morphologiquement comme une Formation sociale polysegmentaire et qui opère  empiriquement comme une Société plurale et pluriculturelle autant que comme un État multinational et multinational, ceci en déphasage avec sa Constitution affichée basée sur le Républicanisme et le Cosmopolitisme bourgeois d’origine occidentale. Cette situation de Prégnance des habitus communautaristes africains dans la perception de la Succession présidentielle au Cameroun est aussi favorisée par la Structuration centraliste et monarchiste de la Présidence comme Position suprême étatique de facture monopoliste et autocratique. Comme la Présidence est à elle seule une Position concrètement souveraine, chaque segment communautaire souhaite que celui qui est détenteur de cette Fonction étatique suprême provienne de ses rangs!!! Dans de telles conditions, chaque processus de succession à la tête de l’État menace de dégénérer en une Lutte sévère de Pouvoir largement motivée par des Calculs communautaristes, clanistes, tribalistes, regionalistes, sectaristes ou vonfessionnalistes et pouvant prendre la forme d’une Guerre civile. C’est là l’envers de ce que Mongo Beti appelait le Tribal-Confessionnalisme. Tant que le Système institutionnel et constitutionnel consacrera factuellement une Présidence souveraine et monarchique alias Présidence perpétuelle, ce Centralisme despotique pratiqué dans une Société polysegmentaire, engendrera toujours des Luttes de puissance communautaristes  âpres, aiguës et aigres révélatrices du Fédéralisme et du Régionalisme officieux qui modèlent de manière clandestine la Vie des Institutions politiques et constitutionnelles Camerounaises pourtant officiellement fondées sur un État unitaire décentralisé. C’est peut-être en construisant un État basé officiellementsur le Fédéralisme multinational, fondé sur une Division du Travail et du Pouvoir entre un État  fédéral national-multicommunautaire et des États - Régions autonomiques avec un Équilibre sérieux entre le Président et le Premier ministre fédéraux et un Parlementarisme balancé entre l’État fédéral et les États Autonomiques ainsi qu’une Limitation des Mandats Presidentiels ou des Conventions constitutionnelles de Rotation interrégionale de la Présidence dans un Système fédératif, que le Cameroun pourra apprendre à domestiquer l’Absolutisme Etatique liée à la Présidence impériale ou hégémonique qui favorise un Pouvoir perpétuel despotique et satrapique.
Entretien mené par:
Jean-Bosco Talla


Les conditions d'une succession ou d'une transition politique pacifique au Cameroun

Mathias Eric Owona Nguini: Pour que la transition politique soit durablement et substantiellement pacifique au Cameroun, il est nécessaire qu’elle se déroule sur une base politique et institutionnelle démocratico-représentative de facture républicaine, libérale et sociale. Cela signifie que cette transition s’appuie sur :
1- Un processus électoral démocratique véritablement transparent et intègre de concurrence politique ;
2- Une Constitution républicaine débarrassée de l’absolutisme pernicieux du présidentialisme étatique personnel et providentiel et de l’Etat-Présidence personnalisé et providentialiste ;
3- L’aménagement d’une séparation libérale et républicaine sérieuse des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire ;
4- L’interdiction constitutionnelle de la présidence perpétuelle par des mécanismes de limitation stricte des mandats présidentiels ;
5- Une destruction préalable de la structure autoritaire militariste et para-militariste de l’État de puissance perpétuelle jouant sur la manipulation électorale plébiscitaire ou censitaire des votes à des fins de captation licencieuse et frauduleuse des majorités institutionnelles exécutives ou législatives ;
6- Un consensus politique de transition démocratique pactée avec une formule « Vérité et réconciliation « et une logique d’amnistie politique et économique ;
7- L’érection d’un gardien non présidentiel exigeant de la Constitution (un Conseil constitutionnel indépendant) et d’une justice complètement indépendante du pouvoir exécutif ;
8- L’aménagement légal et constitutionnel d’une République sociale et autonomique de facture semi-fédérale ou quasi-fédérale basée sur des régions constitutionnellement déterminées intégrant les multinations ethno-régionales et régio-confessionnelles à une Grande Nation étatique territoriale ;
9- L’institution d’une République impersonnelle détruisant le monarchisme et l’anarchisme tyranniques et ultrapatrimoniaux de l’Etat césarien de gouvernement perpétuel pour prévenir toute politique corruptrice de dynastisation de l’Etat et de satrapisation de sa direction présidentielle ;
10- La mise en place d’un gouvernement politique et économique fondé sur la démocratie synarchique et polyarchique(jeu consociatif et corporatif pluriel des groupes d’intérêts et d’identités légitimés par le parlementarisme ou le paritarisme comme piliers de l’espace public et du dialogue social) et un cadre institutionnel prévisible évitant le dualisme constitutionnel ou l’opportunisme et le cynisme paraconstitutionnels ou extraconstitutionnels des présidences éternelles, des transitions constitutionnelles sans délais, des révisions constitutionnelles taillées à la mesure des inamovibles présidentiels ou du dévoiement monarchique des Républiques pluralistes-constitutionnelles ainsi que les cadres brouillés de succession présidentielle ;
11-L’organisation consistante d’un constitutionnalisme économique et social De telles conditions demeurent encore utopiques dans un Cameroun encore livré à l’arbitraire du présidentialisme étatique et de l’État-Présidence, mécanismes associées aux moteurs de pouvoir qui tournent au carburant du gouvernement perpétuel. Cette résistance du gouvernement perpétuel sera particulièrement farouche au plan militaro-policier et politico-militaire. II y a alors de fortes chances qu’une solution pacifiquement durable ou durablement pacifique ne soit qu’une vue de l’esprit, compte tenu de la robustesse conservatrice et ou de l’opiniâtreté réactionnaire d’une machinerie étatique toujours réglée par le gouvernement perpétuel et prompte à faire dérailler ou tomber en panne tout processus sérieux de transition politique fondé sur l’alternance simultanément régalienne, républicaine et démocratique.
Propos recueillis par
Jean-Bosco Talla
Source : Les dossiers et documents de Germinal, n°004.