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Société Nouveau Code pénal: quand le parlement adopte le Code de la discorde - Le Code pénal adopté, et après?

Nouveau Code pénal: quand le parlement adopte le Code de la discorde - Le Code pénal adopté, et après?

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Nouveau Code pénal: quand le parlement adopte le Code de la discorde
Le Code pénal adopté, et après?
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Le Code pénal adopté, et après?

Après près de cinquante ans, un nouveau code pénal, constitué de plus 370 articles, visant entre autres, à organiser la répression des crimes et délits et à préserver les intérêts de la société vient d’être adopté. On se serait attendu que l’adoption du Code pénal dont l’un des enjeux est l’internalisation de certains instruments internationaux liant notre pays soit le résultat d’un large consensus et qu’on insistât sur certains points tels que la corruption, la question des immunités, des crimes d’enrichissements illicites et les blanchiments d’argent. Des juristes et avocats interrogés sont perplexes face la réaction du président de la République qui a ordonné la relecture de l'unique l'article 127 alors que plusieurs autres articles sont problématiques.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la révision ou la modernisation du Code pénal était nécessaire. Les débats portent moins sur l’opportunité que sur la manière de procéder du ministre de la Justice qui, si on s’en tient aux différentes récriminations et aux messages que l’on pouvait lire sur les pancartes que brandissaient les avocats au cours de la marche organisée à Bamenda, n’a pas recherché le consensus en consultant l’ordre des avocats du Cameroun, les organisations de la société civile, les responsables des partis et formations politiques, et pourquoi pas des citoyens ordinaires. Cette large consultation aurait permis d’affiner et d’enrichir le texte, de l’épurer des dispositions problématiques. Même si Laurent Esso soutient mordicus que le Barreau et les organisations de la civile avaient été consultés il y a 5 ans par son prédécesseur au ministère de la Justice, Amadou Ali, il reste que, compte tenu des changements intervenus entre temps à la tête de l’ordre des avocats, le gouvernement aurait dû, avant d’envoyer la mouture définitive du projet de loi au Parlement, par élégance, courtoisie et considération, le faire parvenir au nouveau bâtonnier pour avis et remarques. Hélas ! Sous le Renouveau, les habitudes ont la peau dure. Le réflexe du parti unique est resté presque intact. Chassez le naturel, il revient au galop.
Comment ne pas donner raison au philosophe Fabien Eboussi Boulaga qui écrivait à juste titre que : « ceux qui nous gouvernent ont posé comme intangible la résolution suivante ; ne montrer aucun signe de faiblesse. Ils l’ont tenue et appliquée, en l’interprétant ainsi ; il ne faut faire aucune concession, sinon pour la forme, en la vidant de tout contenu ou à titre de ruse et de diversion avant d’user de la force. Jamais, aucun membre de ce régime n’a reconnu d’erreur sinon en termes généraux et abstraits du genre : « nul n’est parfait », « toute œuvre humaine est perfectible » ».
Laurent Esso s'est conformé à cette règle. Il savait très bien que, quels que soient les vociférations et les « aboiements » des avocats et autres Camerounais, le texte du gouvernement devait passer comme une lettre à la poste au Parlement, compte des compostions de la chambre basse et de la chambre haute où le RDPC a des majorités obèses.
On peut même soupçonner les rédacteurs du projet de loi et même les accuser par ailleurs d’avoir taillé ce texte à leur mesure. Parmi eux, beaucoup sont bailleurs et propriétaires d’immeubles bâtis et/ou non bâtis. En introduisant une disposition emprisonnant des citoyens accumulant deux mois d’arriérés de loyer, ils veulent préserver leurs intérêts. Il suffit d’être un peu attentif, de suivre les chroniques mondaines pour se rendre à l’évidence que Laurent Esso, Emmanuel Mbiam et autres barons du régime qui ont fait main basse sur les terrains de certains « villageois », sont des propriétaires d’immeubles bâtis et non bâtis.
Si comme l’affirme Laurent Esso, une large consultation a été effectuée, comment donc expliquer des oublis (nombreux) et l’imprécision de certaines notions. Par exemple : l’oubli de la problématique et de la définition de la corruption et des crimes d’enrichissement illicites, alors que le Cameroun a signé et ratifié la convention de Mérida et celle de l’Union africaine contre la corruption.
Au demeurant, tout n’est pas mauvais dans le nouveau Code pénal qui vient d'être adopté par le Parlement. Il y a même plus de bon que de mauvais. Espérons seulement que l’application de l’article relatif au travail d’intérêt général contribuera au désengorgement de nos goulags que nous appelons prisons. Peut-être vaudrait-il mieux que Paul Biya ne le promulgue pas et demande une seconde lecture afin d'introduire les dispositions relatives à la criminalisation des crimes d'enrichissement illicites et autre corruption.
Serge-Alain Ka’abessine