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Les délires obscènes de la contremaîtresse Calixte Beyala

Les délires obscènes de la contremaîtresse Calixte Beyala

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A défaut d’avoir pitié, il faut avoir la force morale, nous dit un dicton africain, d’avoir honte. Or manifestement, ni l’une ni l’autre de ces deux qualités humaines ne semble manifestement habiter la contremaîtresse franco-africaine de l’intrigue, la nommée Calixte Beyala, dont le dernier article «  Le procès de Laurent Gbagbo ou la chronique d’une mascarade annoncée »(1) offre tout le spectacle de la hideur d’âme déguisée en indignation moralisante. Que nous dit donc cette dame de scène dans sa dernière inspiration ? Que valent ses arguments ? Et surtout que s’évertuent-ils à cacher ? L’intention  plus ou moins affichée est de faire admettre une thèse fataliste visant à ratisser large dans les ressentiments des afro-Français que Madame Beyala veut attirer dans son nouveau canular dit du Mouvement des Africains Français. Le raisonnement de notre politicienne enhardie, malgré ses contorsions inavouées, est limpide à l’analyse : si le procès de Laurent Gbagbo est inutile car perdu d’avance par Gbagbo du fait du droit occidental du plus fort, alors il ne resterait plus qu’une seule issue aux résignés d’Afrique et d’ailleurs : rejoindre Madame Beyala dans son projet de s’implanter comme tête de proue dans la politique franco-africaine sur des bases communautaristes. Nous montrerons donc ici l’inanité de cette opération d’enfumage crypto-politique qui fait de la haine de l’Autre, le seul programme politique de notre impudente. L’occasion offerte par son imprudente tribune nous permettra de dévoiler et de décrypter devant l’opinion internationale l’affligeant simplisme des thèses de cette dame, en montrant qu’elles ne renvoient ni plus, ni moins qu’à ce que nous avons nommé dans notre dernier essai politique (2) , l’imposture structurelle d’un anticolonialisme dogmatique qui est  le masque rongé de la haine de la démocratie en Afrique.
Quelques arguments apparents structurent la tribune, manifestement écrite à main levée – sinon, ce serait plus grave encore ! -  de Madame Beyala. Elle commence sa sortie par le procès d’une engeance directement sortie de son imagination fébrile : les Rois du monde. Le style lepéniste de l’argumentation se confirmera par la suite, quand viendra en renfort, le procès sempiternel du prétendu complot judéo-maçonnique et de l’infâme Dollar. Mais voyons. Face à ce nouveau pseudonyme théologico-politique de la Communauté internationale – les Rois du monde -  présentée sous oripeaux implicites du Grand Satan, Laurent Gbagbo, seul contre tous, pour ainsi dire, incarnerait la résistance universelle aux Rois du monde, la nuque raide christique, le Sauveur  persécuté et crucifié du monde. La contremaîtresse des Saints du monde, Sainte Calixte Beyala nous offre donc en adoration, le pauvre Christ de Mama, buvant le calice de l’innocent sacrifié. Quel admirable psychodrame théologico-politique, n’est-ce pas ? Or qui ignore que Laurent Gbagbo dut son pouvoir en octobre 2000 au soutien de cette même communauté internationale alors alignée sur l’indulgence des socialistes qui gouvernaient  la France ? Qui ignore que faisant face à une rébellion en 2002, c’est à cette communauté internationale – via la France - que Laurent Gbagbo fit appel pour contenir les troupes rebelles dans la moitié nord de son pays ? N’est-ce pas le même qui a accordé que l’ONUCI participe de la certification du processus électoral ivoirien ? Qui diantre ignore qu’en dix ans de pouvoir,  pendant lesquels il disposait de la majorité parlementaire pour défaire courageusement et au besoin sacrificiellement tous les Accords de coopération et de défense iniques, le pauvre Christ de Mama n’a osé réellement démanteler, ni la préemption des entreprises multinationales françaises dans le marché ivoirien, ni le Franc CFA, ni la présence militaire étrangère, ni le rôle de premier plan des conseillers et officines politiques françaises en Côte d’Ivoire ? Le procès des soi-disant « Rois du monde » ne saurait manifestement se faire- s’ils existent du reste -  sans le procès des complicités nécessaires du régime Gbagbo avec cette même communauté internationale qu’on s’empresse à diaboliser quand elle ne s’aligne sur les intérêts des potentats africains. Et en ce qui concerne la Côte d’Ivoire, Calixte Beyala nie ici une évidence : la droite et la gauche classiques ivoiriennes ont toujours été en réalité franco-compatibles, si l’on se fonde sur les politiques économiques et diplomatiques qu’elles ont successivement menées.
Madame Beyala enchaîne sur la thèse victimaire de l’homme africain qui ne dirige rien de son Histoire, reprenant ainsi au fond le discours malheureux qui a proclamé que  le malheur de l’Homme africain, c’est de n’être pas encore assez entré dans l’Histoire. Dieu, qu’elle sait faire feu de tout bois, cette dame ! Si les chefs d’Etat africains ne sont que des contremaîtres, comment comprendre que Calixte Beyala ait récemment, par une campagne tapageuse et éperdue, sollicité leurs appuis pour accéder à la tête de l’Organisation Internationale de la Francophonie, alors même qu’elle les savait tous soumis aux Rois du monde ? Pourquoi n’avoir pas créé son Organisation des Insoumis de la Francophonie dès le départ ? La lumière fulgurante de la vassalité des chefs d’Etats africains francophones serait-elle seulement apparue à Madame Beyala quand elle a été retoquée aux portes d’une organisation qu’elle devait plus tard dénoncer par dépit amoureux ? Beyala, parions prudemment pour elle, n’est pas du genre à jouer en ignorant les règles du jeu. En niant les responsabilités africaines des chefs d’Etat africains dans les tragédies que connaissent leurs pays, Calixte Beyala décharge de fait ses mentors de leurs propres crimes contre l’humanité : Khadaffi, qui était resté de 1969 à 2011 au pouvoir au mépris violent de toutes les libertés politiques fondamentales de ses compatriotes ; Gbagbo, jamais élu démocratiquement, qui a vainement tenté après dix ans d’une présidence calamiteuse de violer la voix des urnes en 2010-2011, sont-ils ces enfants de chœur que le Grand Satan a ôté à la grand’messe de la fraternité africaine ? Suffit-il de traficoter un Khadaffi Day, pour en faire le summum de l’excellence africaine ?
Incapable de blanchir ces criminels sans vergogne que l’Afrique consciente ne regrettera pas, Calixte Beyala choisit de salir davantage le portrait imaginaire de ses adversaires fantasmés du jour, s’imposant ici un véritable style de reine de l’immonde : c’est la séquence du haro sur le complot judéo-maçonnique qui étranglerait le monde. De prétendus suprêmes illuminati sont convoqués au procès de notre sainte nitouche, déterminée à restaurer l’ordre de la pureté sur terre, élue suprême de la chevalerie du Bien désintéressé. Mais comment Madame Beyala, dont la passion pour le Dollar en général, voire pour tout ce qui est sonnant et trébuchant, nous convaincra-t-elle qu’elle déteste réellement l’argent facile ? N’est-ce pas elle que des tribunaux ont nommément condamnée pour faits de plagiat et donc de détournement de droits d’auteur ? N’est-ce pas cette dame que les tabloïds nous ont montré récupérant au tribunal contre l’un de ses anciens amants, des centaines de milliers d’euros – donc de dollars maudits -  en raison d’un ouvrage qu’elle aurait commis en posture de « négresse » ? N’est-ce pas la même Madame Beyala que la justice ivoirienne a récemment mise à l’index pour encaissements injustifiables de fonds publics ivoiriens sous l’égide du régime du Christ de Mama, le bien nommé Laurent Gbagbo ? On voit bien, dans cette insidieuse propension à réchauffer les thèses d’extrême droite sur les Juifs et les Francs Maçons, que Calixte Beyala confond l’idéal et le réel, la spiritualité et les lobbies, la quête sincère du perfectionnement de l’humanité par des millions d’hommes et de femmes à l’abri des passions de la gloriole, avec l’affairisme inévitable de ces marchands du Temple qui prospèrent dans toutes les religions et spiritualités humaines. Ce n’est pas parce qu’au cœur de l’Afrique ou ailleurs, des Francs-Maçons ou prétendus tels se sont rendus coupables d’abominations que la Franc-Maçonnerie est  une abomination. Car à raisonner ainsi, on condamnerait de fait toutes les religions et spiritualités, aucune n’étant exempte de brebis galeuses. Détester les actes condamnables de n’importe quelle personne est un droit, voire un devoir. Mais mépriser la liberté de conscience et de croyance des autres humains est un outrage que Simone Gbagbo, grande prêtresse de l’anti-maçonnisme ivoirien et sa contremaîtresse de l’intrigue, Dame Beyala, devraient regretter amèrement. Qui les laissera donc réussir ce qui a perdu Hitler ?
Mais Dame Beyala n’est pas sûre, malgré les charges qui précèdent, d’avoir définitivement écrasé la tête du Serpent. Un crêpage de chignons lui paraît devoir accommoder davantage le psychodrame théologico-politique qu’elle s’ingénie à nous imposer. On se battra donc, entre « contremaîtresses ». Le proverbe ivoirien dirait ici avec raison : ennemi de femme, c’est  femme. Madame Beyala s’est intéressée aux hommes, « les rois du monde ». Elle a tenté de les émasculer symboliquement. Il lui faut faire équilibre. Déféminiser une femme. Dire qu’elle est un hybride de « je ne sais-quoi ». Telle une furie, voici notre sainte de Mama en habits de walkyrie. Il lui faut s’en prendre dans sa tribune à une autre femme africaine, qui a réussi ce qu’elle a échoué à faire : prendre la tête d’une Institution mondiale de premier rang. Mais dans son ire, Madame Beyala rate sa cible. Elle s’en prend à « la responsable de la Cour Pénale Internationale ». Qui donc est la responsable de cette cour ?  D’où vient ce langage banalement approximatif chez une femme supposée cerner les arcanes des mots ?  Dans tous les cas de figure, on devra s’intéresser à la plus haute instance du Tribunal, s’il faut à tout prix un/une « responsable ». Et là, patatras ! Voici qu’éclate encore, si besoin en était du reste, l’extraordinaire légèreté intellectuelle et complexuelle de cette dame. Suivons.
Contrairement à ce que Calixte Beyala écrit furieusement, la Présidente du Tribunal Pénal International  n’est pas une africaine, mais un coréen nommé Sang-Hyun Song ! Il y a deux vice-présidents, dont Madame la juge Sanji Mmasenono Monageng, originaire du Botswana est la première et M. le juge italien Cuno Tarfusser, le second. Madame Fatou Bensouda, originaire de Gambie, est procureure. Et c’est raté, Madame Beyala ! Comme Gbagbo vous balancez vos obus dans le tas ! Ce sont donc la vice-présidente ou  la procureure de la CPI qui reçoivent les foudres confuses de notre vengeresse de la plume, fidèle à la logique de l’enchevêtrement qui préside à sa rationalité étrange : « La nouvelle responsable de la Cour Pénale Internationale est certes une Africaine, mais une Africaine en service commandé. C’est une contremaîtresse qui se doit d’accomplir la mission que lui ont déléguée ses patrons : condamner Laurent Gbagbo, malgré un dossier aussi mince qu’une feuille vierge ».  Ite missa est ! Madame Beyala fait et défait les Africaines qui comptent. Quand Beyala,  la franco-camerounaise proche du sempiternel Paul Biya, veut être contremaîtresse de l’Organisation Internationale de la Francophonie ou quand elle s’honore des Prix Littéraires attribués par les jurys de la littérature occidentale, c’est bien. Quand la gambienne Fatou Bensouda ou  la botswanaise Sanji Mmasenono veulent être contremaîtresses à la CPI, c’est un péché originel ! Beyala les attaque, fonçant bille en tête, à coups de contrevérités flagrantes si possible. Qui ne voit pas ici que les seuls crimes des rivales involontaires de Madame Beyala sont leur compétence, leur succès et la reconnaissance diplomatique internationale qui les auréolent dans leur sphère d’originalité ?
Pour parachever le travail de sape esquissé dans ses précédents coups d’épée dans l’eau, Calixte Beyala ausculte enfin, en lieu et place de la Cour Pénale Internationale dont elle ignore réellement le fonctionnement, le dossier  de Saint Gbagbo. Dans cette ultime posture, Madame Beyala s’octroie donc à la fois les rôles de juge et de procureures – puisqu’elle les a mangées en sorcellerie - , en transformant, dans un miracle que seules les liturgies enfiévrées des prophètes du gbagboisme savaient faire, le principe juridique de la présomption d’innocence de tout prévenu en principe d’innocence absolue des soi-disant nationalistes africains de son cru. La métaphore filée ici par Calixte Beyala puise dans le registre déjà emprunté du théologique. Notre juge absolue estime que contre Laurent Gbagbo, la CPI ne détient qu’ « un dossier aussi mince qu’une feuille vierge ». Comment Madame Beyala ose-t-elle nous déguiser Gbagbo en vierge ? Qui a inauguré les charniers du 21ème siècle en Côte d’Ivoire ? Qui donc a trahi le pacte républicain ivoirien de 1995 qui prévoyait l’arbitrage électoral et équitable de la compétition politique ivoirienne ? Qui a surfé à mort sur les flammes de l’ivoirité au point de s’y brûler les ailes, tel Icare se rapprochant trop du feu solaire ? Gbagbo, le Christ de Mama, serait-il la Vierge de Beyala ? Comment entendre de la part de cette Dame une version réchauffée et ignorante d’une Immaculée Conception qu’elle est bien la dernière à incarner par ses faits et gestes ? Il importe de rappeler à Madame Beyala qu’une feuille quelconque, même vierge, a une épaisseur certaine. Que dans la descente aux enfers de la Côte d’Ivoire après la défaite de Laurent Gbagbo dans les urnes en novembre 2010, tout comme en octobre 2000, dans le détournement de l’espérance démocratique ivoirienne au prix d’une élection calamiteuse, Laurent Gbagbo porte une responsabilité illimitée que les dirigeants légitimes et légaux de la Côte d’Ivoire ont eu la présence d’esprit et la magnanimité exceptionnelle de lui faire assumer devant un tribunal de haute qualité.
Si donc pour finir, seules les incantations de la grande prêtresse Beyala peuvent sauver symboliquement le Christ de Mama, demandons-nous maintenant quand cette dame prendra comme nous, Franklin Nyamsi, la responsabilité d’être exemplaire dans la dénonciation active de la haine de la démocratie qui prospère dans son Cameroun natal ? Paul Biya, jamais élu, assassin impuni de centaines, voire de milliers de Camerounais, indirectement responsable par abandon de la chute de l’espérance de vie dans son pays à moins de 45 ans, accroché au pouvoir sans discontinuer depuis 30 ans, peut-il mériter un Tribunal comparable aux yeux de Calixte Beyala ? J’espère avoir montré, en déconstruisant les arguments insipides de cette dame, qu’elle n’est que l’ombre d’une esbroufe, l’expression d’une brocanterie politique dont les citoyens de France, originaires ou non d’Afrique, doivent résolument se détourner. Calixte Beyala, c’est l’archétype incarné de cet anticolonialisme dogmatique africain qui masque derrière la haine affectée, vague et aveugle d’un Occident fantasmé en complot judéo-maçonnique, la véritable haine du message de fraternité, de justice et de vérité qui émerge de toute expérience politique authentique de la démocratie. Vous comprendrez donc que je retourne à ce compte le qualificatif choisi par Calixte Beyala contre les dignes magistrates africaines de la Cour Pénale Internationale : Calixte Beyala, c’est résolument la contremaîtresse franco-africaine de l’intrigue. Ses propos sur le conflit ivoirien ne sont dès lors que les délires surfaits d’une obscénité qui se gargarise malheureusement de sa cécité.
Une Chronique de Franklin Nyamsi
Agrégé de philosophie
Paris, France
(1)Lire sa parution du jour sur le site : http://www.cameroonvoice.com/news/news.rcv?id=8698
(2) Alexis Dieth, Franklin Nyamsi, Pour un anticolonialisme critique & contre l’anticolonialisme dogmatique, Abidjan, Editions Balafons, 2012.
(3) Voir  à toutes fins utiles la structure de cette cour sur son site officiel : www.icc-cpi.int/Menus/ICC