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Société Affaire Vanessa Tchatchou : des Camerounais manifestent près de l’Ambassade du Cameroun à Paris

Affaire Vanessa Tchatchou : des Camerounais manifestent près de l’Ambassade du Cameroun à Paris

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Le jeudi 16 février, dès 15h, les citoyens camerounais de France se sont retrouvés près de l’ambassade du Cameroun à Paris, sise au 73 rue d’Auteuil, pour manifester leur soutien à Vanessa Tchatchou, la jeune mère du nouveau-né volé peu après sa naissance à l’hôpital gynéco-obstétrique et pédiatrique de Yaoundé, le 20 août 2011, et qui depuis lors a décidé d’élire domicile à la chambre N°2 de cet hôpital public pour réclamer que son bébé lui soit rendu.  
Après avoir placardé des portraits de Vanessa Tchatchou partout où il était possible de le faire, les manifestants ont interpelé les autorités camerounaises et fustigé l’arrogance, l’opacité et la désinvolture qui a jusqu’ici caractérisé la gestion de cette affaire par le gouvernement camerounais. Une attitude qui contraste avec l’indignation populaire et l’élan de solidarité observés chez les Camerounais d’"en bas" depuis la révélation de ce scandale par la presse. Les manifestants ont donc interpelé l'ambassadeur du Cameroun à plusieurs reprises et les forces de police qui encadraient la manifestation n’ont d’ailleurs pas manqué d’assurer la médiation entre les manifestants et les diplomates de l’ambassade qui n’ont cependant pas voulu recevoir le groupe de manifestants. Comme quoi, à Paris comme à Yaoundé, c’est le même combat citoyen mais aussi, en face, la même arrogance et la même condescendance.

Mais si les manifestants n’ont pas trouvé une oreille attentive auprès des autorités consulaires (comme il fallait du reste s’y attendre) les riverains et autres passants, eux, se sont montrés très sensibles à la cause pendant les deux heures qu’a duré la manifestation. Un travail de sensibilisation appréciable a en effet été mené, notamment par la distribution de plusieurs centaines de tracts et les prises de parole des participants qui ont ainsi transformé la Place de la porte d’Auteuil, le temps de cet après-midi d’hivers, en une sorte de parlement populaire camerounais où la parole s’est libérée - chose rendue impossible à Yaoundé où les pouvoirs publics ne répondent aux multiples voix indignées qui réclament Justice pour Vanessa que par les interdictions de manifestations, les bastonnades, les arrestations arbitraires et les incarcérations qu’on tente maladroitement de couvrir d’un vernis légal à travers le recours à des chefs d’inculpation aussi ridicules que l’"atteinte à la sureté de l’État"
Munis d’un mégaphone qui permettait d’être entendu jusqu’à l’ambassade, les manifestants — au nombre desquels on pouvait compter des personnalités telles que le président du Rassemblement des Camerounais de France ou encore Koko Ateba, artiste-musicienne bien connue —  ont tour à tour pris la parole. Des interventions qui se sont succédé, il est globalement ressorti que le drame de Vanessa Tchatchou (qui du reste apparait de plus en plus comme une victime parmi tant d’autres d’un trafic d’enfants plus ou moins organisé au sein des grandes formations sanitaires publiques au Cameroun) n’est rien moins que la métaphore de la tragédie collective d’une société sinistrée et naufragée.
Car les Camerounais sont tous, quelque part, des vanessa Tchatchou et en font l'expérience au quotidien. À elle, on a pris son bébé, mais à d’autres, c'est une formation de qualité; un emploi; un salaire décent, ect. À toute la jeunesse, c’est le droit au rêve, à un avenir et l’espoir même qui ont été confisqués. À tous c’est le droit à une vie digne et simplement humaine qui a été volé.
Le cri de cette fille de dix-sept ans qui réclame son enfant retentit donc aux oreilles de ses concitoyens comme le cri poussé par toute une génération qui demande à être rétablis dans ses droits. Ce qu’elle enseigne à notre génération, c’est la nécessité vitale de se battre, de refuser la résignation et d’exiger que des comptes nous soient rendus. C’est, en bref, ce message que chacun des manifestants a porté et transmis, à sa manière et avec ses propres mots, devant l’ambassade du Cameroun jeudi 16 février dernier.
Au fond, c’est cela, précisément, que Koko Ateba a clairement exprimé en scandant : « Vanessa nous inspire et nous resterons mobilisés jusqu'à ce que justice lui soit rendue. Nous sommes de tout cœur avec ceux qui manifestent leur indignation au Cameroun et qui sont arrêtés ou tabassés: Valsero, l'Addec, V.-S. Fouda et tous les autres… »
Et même si la confusion est entretenue y compris par des membres du gouvernement qui tantôt annoncent le décès et l’enterrement du nouveau-né volé, avant qu’aucune enquête sérieuse n’ait été menée à son terme (Issa Tchiroma), tantôt déclarent purement et simplement qu’aucun bébé n’a été volé à l’hôpital gynéco-obstétrique de Ngousso (Bakang Mbock) ; même si les violences et les mesures d’intimidations se multiplient, nous sous mobiliserons jusqu’à ce que Justice soit faire et que Vanessa retrouve son bébé. Les Camerounais se mobiliseront tant que Vanessa les inspirera et que prévaudra l’impression que, dans cette affaire, la force est contre le droit et que l’ordre (ou ce qu’on désigne ainsi) conspire contre la justice.
« Il y a toujours quelque chose de Divin chez un Homme qui se bat pour être reconnu comme tel », m’a dit, à ce propos, un jeune camerounais de Yaoundé. Tel était, en une phrase, le message des manifestants Camerounais de la place de la Porte d’Auteuil jeudi dernier.


Yves Mintoogue