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Economie Comment les multinationales spolient les petits paysans

Comment les multinationales spolient les petits paysans

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Index de l'article
Comment les multinationales spolient les petits paysans
Des Contrats iniques
Des paysans bientôt sans terre
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Accaparement des terres
Les entreprises industrielles tuent l’agriculture familiale dans plusieurs régions du Cameroun.
En décembre dernier, l’Institut africain pour le développement économique et social (Inades-formation Cameroun) et la Coalition d’organisations de la société civile de lutte contre l’accaparement des terres au Cameroun (Colat) organisaient un atelier national sur les résultats d’une étude sur le phénomène de l’accaparement des terres au Cameroun. Et les ONG étaient arrivées, dans leurs conclusions, que ce phénomène a des effets négatifs sur l’agriculture familiale camerounaise qui nourrit plus de 80% de Camerounais.
C’est que l’accaparement de terres, que ces Ong définissent comme étant l’acquisition, par des acteurs publics ou privés, étrangers ou nationaux, de droits sur de grandes surfaces de terres arables -en vue d’y développer une agriculture de type industrielle dans le but de produire des denrées alimentaires ou des agro carburants destinés principalement à l’exportation- est une vraie plaie pour l’agriculture familiale camerounaise.
Et selon Inades formation et Cie, «  au Cameroun, l’agriculture familiale représente l’un des piliers de l’économie nationale, cette agriculture est la troisième contribution au PIB du pays après le pétrole et le bois » (Dsce 2008). Le phénomène de l’accaparement des terres y est factuel. Il s’agit d’une exploitation légalisée des paysans au profit d’autres acteurs financièrement et politiquement influents. L’accaparement des terres conduit encore à la perturbation des systèmes d’exploitation agricole familiale qui assure la base de l’agriculture paysanne dont dépend la production vivrière nationale. De même qu’il hypothèque la souveraineté alimentaire du pays dans la mesure où l’essentiel des productions des terres accaparées est destiné au marché international.
D’où la volonté d’Inades formation et Cie d’engager des actions de plaidoyer pour faire entendre la voix des populations rurales camerounaises et contrer efficacement ce danger.
Et c’est vrai qu’en 2009, la Banque mondiale estimait  que 45 millions d’hectares de terres agricoles dans les pays en développement – soit deux fois la surface agricole française -avaient fait l’objet de transactions ou de négociations. Une tendance qui n’est pas  près  de s’arrêter du moins selon Peuples Solidaires et son partenaire camerounais, le Coden (Comité de développement pour la région de Ndo) qui souligne  comment   l’État et ses cadres  sucrent  les droits des riverains
Ikemefuna Oliseh

Des Contrats iniques
L’État est le premier accapareur mais les particuliers ne sont pas en reste.
Dans le département de la Haute-Sanaga, région du Centre au Cameroun, l’entreprise sucrière Sosucam ne cesse d’étendre ses activités. Ceci aux dépens des communautés rurales dont la  sécurité alimentaire est de plus en plus menacée.  La Sosucam appartient pourtant à la Somdiaa, géant français de l’agroalimentaire dirigé par Alexandre Vilgrain qui s’enorgueillit d’être à la pointe en termes de responsabilité sociale.
En Octobre 2010, Peuples Solidaire et son partenaire camerounais, le Coden (Comité de développement pour la région de Ndo), lançaient  un appel urgent visant au respect des droits des populations locales par la Somdiaa.
Et de fait, qu’il s’agisse d’achat direct de terres à son propriétaire ou de la signature de baux emphytéotiques, les populations locales vivant sur les terres convoitées ne sont, en général, pas consultées. Elles disposent pourtant, sur ces terres dites disponibles, des droits d’usage ou de gestion collectifs, issus de la coutume mais qui continuent d’être peu sécurisés dans de nombreux pays malgré les réformes en cours. De telles acquisitions reviennent alors à priver ces populations des ressources naturelles nécessaires à leur subsistance.
En tout cas, dans l’étude diagnostic du phénomène de l’accaparement des terres agricoles au Cameroun, la coalition d’organisations de la société civile de lutte contre l’Accaparement des Terres au Cameroun (Colat) a découvert que les « accapareurs » se recensent parmi les acteurs publics et publics et privés, mais le principal étant l’État représenté par ses différentes administrations et collectivités territoriales décentralisées. « Cet État négocie avec des firmes agro-industrielles  généralement étrangères, se fondant sur une présomption de domanialité pour décider seul de la plupart des vastes espaces aux-agro industries », précisent les Ong. A côtés de ces acteurs publics cohabitent des intérêts privés.
Dans ce cas, révèle l’étude, l’accapareur est présenté comme « un individu riche et puissant. Il est tantôt membre du gouvernement, élu du peule, homme d’affaires, haut gradé de l’armée, haut cadre de l’Administration, etc. ». Et la prise de contrôle du foncier et l’appropriation des richesses naturelles s’accompagne de contreparties floues en échange d’utiliser les terres à long terme.
À l’identique des acquisitions privées, les contrats de cession par l’État des vastes superficies des terres sont couvertes du plus grand mystère et ils opèrent à des prix relativement bas lorsqu’ils ne sont pas gratuits. À titre d’illustration, dans le bail emphytéotique Socapalm, Convention de cession n°90/004 du 22 juin 1990, le prix du mètre carré  coûtait… 0,5  Cfa par an.
I.O.

Des paysans bientôt sans terre

Les espaces agricoles des zones riveraines sont en constante régression
Les statistiques de la Fao révèlent qu’en Afrique subsaharienne, la taille moyenne des exploitations se situe entre trois et cinq hectares, avec un taux de croissance de 2,6% entre  1996 et 2005, contre 0,9% pour les pays développés. Ces chiffres suggèrent que la terre fait la richesse du pays. C’est grâce à elle que des milliers de ruraux nourrissent des millions de citadins.
Cependant, on note depuis 2008, l’accélération du phénomène d’accaparement des terres agricoles dans plusieurs d’Afrique et du monde. Au Cameroun, selon des données documentées par la coalition d’organisations de la société civile, ce sont près de 358 000 hectares de terre que se sont appropriées des entreprises transnationales. Une acquisition qui se situe entre la privatisation à travers de nouvelles acquisitions et la concentration par l’extension des domaines mis à disposition des accapareurs.  Conséquence, les terres agricoles des zones riveraines de la Safacam, de la Socapalm, de la Sosucam, de la Php et de la Cdc sont en constante régression.
Car, dans leur processus d’expansion, ces sociétés agroindustrielles détruisent systématiquement les champs vivriers sur leur passage au profit des plantations de palmiers à huile, de bananes et d’hévéa, dont les productions sont majoritairement exportées. D’où les conflits multiformes qui se développent au sein des communautés. A l’instar de la confrontation entre autochtones  à Penja où certains réclament la rétrocession totale des terres occupées et d’autres militent plutôt pour l’augmentation de la redevance foncière.
De toutes les façons, selon la Colat, l’acquisition des vastes étendues de terres par les investisseurs a une influence négative sur la main d’œuvre disponible pour l’agriculture familiale. Du fait, de la réduction des espaces cultivables.
I.O.