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Médias Contrôle des médias : Le Renouveau couvre la presse de billets de banque pour acheter la paix

Contrôle des médias : Le Renouveau couvre la presse de billets de banque pour acheter la paix

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Index de l'article
Contrôle des médias : Le Renouveau couvre la presse de billets de banque pour acheter la paix
Comment et pourquoi la presse a reçu l'aide financière
Comment le pouvoir corrompt les médias
title
Houla lalaaaaaaaah!
Déclaration du Syndicat national des Journalistes du Cameroun
Corruption dans la presse: réaction du Dp de Le Messager
Arguments spécieux et pleins de sophismes
Toutes les pages

Le fils Njawé au cœur d’un réseau de corruption des médias

Le 19 octobre 2011,  le journaliste Christophe Bobiokono révéle dans une enquête bien conduite que de nombreux patrons de presse (notamment des Directeurs de publication) avaient reçu de l'argent du Directeur du Cabinet si vil de la présidence de la République du Cameroun, M. Martin Belinga Eboutou; mais aussi du ministre camerounais en charge de la Communication et porte-parole du gouvernement, M. Issa Tchiroma. Parmi les acteurs cités dans cette enquête , un nom apparaissait et qui surprenait plus d'un journaliste: celui de Njawé Ombede Jules (fils du défunt Pius Njawé). En réaction à l'enquête de Bobiokono, Jules Njawé a servi un droit de réponse au quotidien L'Actu et au journal L'Equation (droit de réponse repris par le site camer.be) La réaction, ci-dessous, de Christophe Bobiokono s'est pas faite attendre. Visiblement, Christophe Bobiokono à mis le doigt dans la plaie.

 

Christophe Bobiokono répond à Jules Ombebe Njawé
Monsieur le Directeur de la publication,
J’ai reçu quelques gentillesses à travers un texte paru

dans L’Actu,édition n°134 du vendredi 28 octobre 2011 et publié plus tard sur camer.be. C’est pourquoi je vous fais tenir cette réaction, en guise de droit de réponse, conformément à la loi sur la communication sociale. Je précise d’emblée que je n’ai jamais accusé « des responsables de presse d’avoir été corrompus par la Dcc à l’approche de la présidentielle » comme indiqué dans le chapeau introductif du texte qui est à l’origine de mon droit de réponse, même si j’ai publié une enquête dont les informations le suggèrent fortement. M. Jules Njawé Ombede, qui se présente comme « descendant et héritier du plus célèbre combattant de la liberté de la presse dans notre pays » ou encore « Administrateur du journal Le Messager ; président de Free Media Group ; Administrateur Directeur général de l’Agence de Communication Camcom Inc » a choisi les colonnes de L’Actu pour réagir à une enquête de presse réalisée par mes soins et mise en ligne sur mon blog www.christophe.bobiokono.over-blog.com le 19 octobre 2011.

Cette enquête unanimement saluée par la corporation pour sa qualité et intégralement reprise par une bonne demi-douzaine de titres paraissant au Cameroun (dont le célèbre quotidien Le Messager) et une quinzaine de sites Internet n’était manifestement pas du goût du fils Njawé. Il a donc décidé de s’en expliquer dans un texte (tantôt « mise au point», tantôt « droit de réponse ») au titre trompeur : « Comment et pourquoi la presse a reçu l’aide financière ». Ainsi intitulé, le texte de M. Njawé Ombede ne pouvait susciter que de l’intérêt pour moi. Et pour cause : l’enquête que j’ai menée portait sur le « soutien financier » récemment apporté à la presse par la Direction du cabinet civil de la présidence de la République et le ministère de la Communication, pris séparément, dans une opacité totale et au mépris des règles qui gouvernent la gestion des ressources publiques. Ces « soutiens financiers », destinés officiellement à soutenir la presse dans le cadre de la couverture médiatique de la Présidentielle du 9 octobre 2011, ont été gérés en réalité comme un alibi pour « caporaliser » les hommes des médias et en faire des soldats d’une certaine paix ou des boucliers du régime contre une éventuelle ingérence extérieure. Mieux : la mise à disposition des « enveloppes »a donné lieu, au regard de mon enquête, au versement de rétro commissions.

L’insulte comme argument

Il se trouve que les responsables étatiques ne se sont pas exprimés dans mon enquête malgré les efforts fournis pour recouper les informations recueillies auprès d’autres sources. Il en est de même de M. Njawé Ombede, qui avait trouvé le moyen de mettre son téléphone (98771171) hors service pendant de longs jours, faisant échec à la démarche menée pour avoir sa version des faits. L’initiative prise par « l’héritier du plus célèbre combattant de la liberté de la presse dans notre pays » de s’expliquer ne pouvait donc qu’être saluée, dans la mesure où cela supposait la dissipation (enfin !) du voile de l’opacité qui entoure encore malheureusement la démarche du cabinet civil de la présidence de la République et du ministère de la Communication. Mais grande a été ma déception à la lecture de la production littéraire de M. l’administrateur directeur général de Free Media Group.
Ma première déception tient au registre langagier qu’il s’est imposé dans son propre texte. L’auteur de ces lignes est traité tour à tour de « pseudo journaliste », de « blogueur parano », « d’instigateur de la cyber-calomnie », « d’autoproclamé enquêteur de la corruption des médias », de « blogueur en quête de notoriété », de « cupide blogueur », « d’apprenti blogueur », « d’aigri », etc. Mon article passe aux yeux de M. « l’héritier » pour « soi-disante (sic) enquête », un « pamphlet », une « médisance et désinformation » ou de « lugubres aventures en lignes ». Mon initiative professionnelle est présentée comme une manoeuvre visant à « bâillonner la parole et à diffuser de fausses informations », un acte « d’acharnement », un témoignage de « haine » et de « jalousie ». J’aurais fait preuve « d’arrogance » et de « mépris » dans mon texte.Le fils Njawé se prend d’ailleurs très au sérieux, puisqu’il se permet de lancer quelques menaces en ma direction : « Je t’ai à l’œil, écrit-il, toi et ton opportunisme aussi poussé, maquillé en enquête et enchevêtré dans une conspiration bien dissimulée ; relayé par un discours déstabilisateur ». J’ignore si c’est le complexe de fils à papa et/ou la fréquentation dans des conditions douteuses de certain proche collaborateur du chef de l’Etat qui autorisent ce type de dérive langagière. Ignorant le sens que l’auteur de toutes ces épithètes aurait de leurs réelles significations, il m’est apparu qu’on ne peut rien contre l’éducation d’un homme ou contre un entourage visiblement fait, entre autres, d’espions masqués qui ont toujours excellé dans le chantage, la corruption des médias et le brigandage. Pour cela, je n’en tiendrais pas rigueur à M. « l’héritier ».

Silence sur les commissions

Ma seconde déception, la plus sérieuse, tient pour sa part à la vacuité du texte du fils Njawé. Nulle part dans sa production littéraire, il n’y a de réponse aux questions incontournables que suscitent mon enquête et l’implication indiscutable de l’Administrateur Directeur général héritier dans l’opération de distribution des « enveloppes » par le Directeur du cabinet civil à divers hommes de médias. Il entretient à souhait le flou au sujet de son rôle personnel et des commissions perçues sur les enveloppes distribuées, confirmant ainsi le caractère mafieux de l’initiative du Directeur du cabinet civil de la présidence de la République. Il se présente comme « la vedette circonspecte d’un noble devoir » et parle de « commissions imaginaires ». Aucun mot n’est dit sur l’enveloppe (15 millions Fcfa) qui aurait dû atterrir dans les caisses du Messager (tous les autres quotidiens nationaux ayant reçu de l’argent). Le flou et les dénégations de M. Njawé appellent de ma part quelques précisions et observations. D’abord, je n’ai jamais personnellement accusé M. Njawé de quoi que ce soit : il n’était pas un enjeu pour mon enquête. Mais son rôle dans l’opération de distribution des enveloppes par le Dcc a été mis en évidence par divers témoignages concordants et jamais démentis à ce jour, que j’ai pris la peine de citer dans mon texte. Je rappelle d’ailleurs un de ces témoignages, qui me paraît d’une clarté indéniable. Le 9 octobre 2011, dans un court message électronique (Sms), Emmanuel Gustave Samnick, Directeur de publication de L’Actu m’a dit ce qui suit : « J’étais en France quand le fils Njawé (Jules Njawé Ombede, ndlr) m’a appelé pour dire d’aller d’urgence à la Direction du cabinet civil (Dcc) décharger 15 millions Fcfa. Je lui ai envoyé un collaborateur. Il me rappelle le soir pour dire que le montant a été réduit à 10 millions Fcfa. C’est ce que je sais ». Cette déclaration se passe de commentaires.
Je me serais attendu que la « mise au point » de M. Njawé Ombede explique comment il s’est retrouvé à appeler le DP de L’Actu. En quelle qualité ? Qui l’a mandaté sur la base de quels états de service ? Silence. Il n’explique pas non plus comment on est passé d’une annonce initiale de 15 millions Fcfa pour le quotidien L’Actu à une mise à disposition au final de 10 millions Fcfa. Il ne dit rien sur ce qui fonde même ce montant. L’épaisseur des enveloppes à distribuer variait-elle d’un moment à un autre en fonction de l’humeur de M. Belinga Eboutou, de l’heure de l’opération ou alors y a-t-il eu des micmacs avec l’argent du contribuable à certaines étapes de son parcours entre le Trésor public et la caisse des destinataires finaux ? Faute de réponse de la part de la « vedette circonspecte d’un noble devoir », l’opacité se renforce. Et j’en viens à soupçonner très fortement qu’une vaste opération d’atteinte à la fortune publique (oui, le mot est lâché !) a dû accompagner le « soutien » apporté dans des conditions troubles aux organes de presse.

Une vaine tentative de fuite…

J’ajoute un autre témoignage qui met en lumière la perception des commissions dans cette opération aux contours mafieux et qui aurait dû susciter un éclairage du fils à papa. Il a été fait par Alphonse Soh, vice-président du Conseil d’administration de la South Media Corporation (Smc), la société éditrice du quotidien Mutations, répercutant le compte rendu fait par Alain Blaise Batongué, le directeur de la publication, qui, lui, avait reçu l’enveloppe du Dcc. « Si 3 millions (reçus de la Dcc) sont arrivés à la caisse de la Smc, a dit M. Soh, il apparaît qu'en fait c'est 5 millions qui auraient été débloqués, la différence étant allée dans la poche d'un intermédiaire ». De nombreux autres témoignages ont été faits sous anonymat, qui rejoignent ce qui est dit par messieurs Soh et Samnick. Plutôt que d’expliquer comment le plus ancien des quotidiens privés et l’un des plus influents journaux nationaux n’aurait reçu que 5 millions Fcfa avec une rétro commission de 2 millions Fcfa là où d’autres journaux de la même catégorie ont reçu 15 millions Fcfa, M. Njawé Ombede a curieusement botté en touche en sombrant dans l’insulte facile. Cela renforce notre curiosité.
Il n’est pas inutile de relever une autre attitude surprenante de M. « l’héritier ». Pourquoi s’est-il rendu injoignable au téléphone au moment où les questions affluaient sur son rôle dans l’affaire s’il n’est pas un agent de la mafia ? Au cours d’un long échange téléphonique que j’ai finalement eu avec l’intéressé mercredi, 02 novembre 2011, après de multiples tentatives vaines et l’envoi d’un message écrit, il m’a expliqué que le numéro de téléphone utilisé au moment de l’enquête n’était pas le bon. C’était, a-t-il dit, un numéro hérité d’une sœur qui vit en Europe, mais qui a été mis hors service après l’opération d’identification des abonnés.C’est évidemment une grosse contre-vérité, d’abord parce que le répondeur automatique indique bien que le numéro est en service, mais que « le correspond n’est pas joignable pour l’instant » en demandant de « rappeler ultérieurement ». Ensuite parce que nombre de DP regroupés au sein d’une ténébreuse et opportuniste « Coalition des médias pour la paix » récemment montée, dont M. Njawé Ombede est le 1er vice-président, ont essayé de le joindre par téléphone sans succès pour une affaire qui touchait à une facture impayée dans un hôtel de Yaoundé… Je n’imagine pas que ces DP étaient ignorant du téléphone de M. Njawé Ombede alors que, pris dans le tourbillon des « enveloppes » du cabinet civil, ils avaient concocté diverses opérations, notamment la rédaction d’un communiqué de presse truffé de fautes qui a paru dans les colonnes du Messager, édition du 25 octobre 2011, et dans lequel ces illuminés du journalisme prennent « acte du déroulement serein de la dernière élection présidentielle au Cameroun » et indiquent, au sujet de l’appel de certains partis politique à manifester, « de ne donner aucun écho aux sirènes de la rue et de l’agitation ».
Je m’en voudrais, pour terminer, de ne pas apporter deux ou trois précisions en réaction à certaines déclarations de M. Njawé Ombede dans son « droit de réponse ». En tant que Secrétaire général de l’Union des Journalistes du Cameroun (Ujc), je suis mieux imprégné qu’il ne pourrait l’imaginer (puisque cela échappe manifestement à sa compréhension) des enjeux de l’aide publique à la presse dans une République. La corporation n’a pas attendu qu’un fils Njawé sorte de la cuisse de Jupiter (sa « bienheureuse nature » ? Si les morts pouvaient entendre…) pour voir l’intérêt que la presse avait à conquérir son indépendance économique pour être plus professionnelle et donc plus efficace. J’affirme donc que la poursuite d’un tel objectif ne saurait passer par des opérations de type mafieux du genre des enveloppes distribuées en dehors de tout cadre légal par le Dcc avec des intermédiaires qui ponctionnent une partie des ressources publiques.

Un illuminé dans le journalisme…

J’en profite pour rappeler l’un des extraits du Mémorandum de la presse déposé dans les services du Premier ministre le 23 mars 2010 concernant l’aide publique à la presse. Voici ce que nous avions écrit :« L’entreprise de presse n’est pas une entreprise comme les autres, eu égard à ses missions sociales d’éducation et de formation. Sa mission ne consiste pas à privilégier les acteurs des différents pouvoirs (politiques, économiques, socioculturels, etc.) qui passent, mais plutôt la Nation camerounaise appelée à demeurer.Dans les sociétés modernes, l’information est un droit du citoyen et l’exercice de ce droit, dont la presse est l’un des garants, est un critère d’évaluation de l’avancée démocratique. Ce rôle spécifique requiert que l’entreprise de presse puisse recevoir des aides directes et indirectes de l’Etat. Ce soutien aura pour effet de réduire la fragilité économique de l’entreprise de presse camerounaise aujourd’hui en proie à toutes sortes d’errements, de dérapages et d’abus, source de beaucoup de tort à la presse camerounaise et à la Nation toute entière.

Nous demandons :

- Pour ce qui est de l’aide indirecte :

- la mise en place d’un régime fiscal spécial pour l’entreprise de presse au Cameroun

- l’application effective de la loi sur la publicité dans le sens d’une répartition plus rationnelle et plus équitable des budgets publicitaires entre les entreprises nationales d’une part et entre les entreprises nationales et étrangères d’autre part.

Pour ce qui est de l’aide directe :

- l’augmentation substantielle de l’enveloppe de l’aide à la presse, et surtout la définition claire par une commission paritaire, des critères d’éligibilité des entreprises de presse à cette subvention. L’actuelle commission du ministère de la Communication ayant montré ses limites ;

- la mise en place à terme d’un fonds de développement de la presse. »

Cela dit, un rappel s’impose. Dans le principe, le Cabinet civil s’occupe des affaires réservées du président de la République. Son implication dans une opération même à caractère spécial d’attribution d’une aide publique à la presse est déjà en soi une curiosité, tout comme le fait pour le ministre de la Communication de faire distribuer ce soutien financier par son secrétaire particulier, qui est en principe chargé de ses affaires personnelles. Faire croire que l’intérêt de la presse passe par la préservation de tels réseaux de la mafia c’est faire preuve d’ignorance des principes qui gouvernent la gestion de la chose publique dans une République. Cela saute aux yeux, même quand on se cache derrière une casquette controversée de « descendant et héritier du plus célèbre combattant de la liberté de la presse dans notre pays ».