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François Fillon pris en flagrant délire de négationnisme néocolonial

François Fillon pris en flagrant délire de négationnisme néocolonial

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Négationnisme néocolonial et coups d'Etat légitimes
Décidément, les autorités de la France officielle sont incorrigibles. François Fillon, premier ministre français vient encore de le démontrer lors de la récente visite, aux relents de colonialisme, qu’il a effectuée les 14 et 15 juillet 2011 à Abidjan, capitale économique de sa sous-préfecture ivoirienne. Comme à l’accoutumée, en bombant le torse et en tapant fièrement la main sur la poitrine, le premier ministre français a demandé à ceux qui considèrent cette visite comme un «retour [en force] des colons» d’aller mettre leur logiciel à jour. Pour ce négationniste français :

« Aujourd’hui, nous assumons l’ensemble de nos responsabilités dans le cadre de ce Nouveau Monde qui est en train de se construire. Par contre, les observateurs, les commentateurs qui continuent à parler de relations coloniales entre la France et l’Afrique, n’ont pas encore compris la nature des changements qui ont affecté le monde. Donc, je leur demande de faire cet effort de remise à jour de leur logiciel de compréhension du monde. Je pense que tout le monde se portera mieux.» Avant d’asséner: « Ces accusations et ces critiques correspondent à des logiciels dépassés. J’appelle tous ceux qui continuent à vouloir évoquer les relations entre la France et l’Afrique, en parlant de France-Afrique à changer de vocabulaire, à changer de logiciel. Cela n’a plus rien à avoir avec la réalité des relations qu’il y a entre nos deux pays. Ce que nous voulons, c’est aider la Côte d’Ivoire à assumer la plénitude de sa souveraineté. »
Pourtant, une réalité est et demeure, même pour les sourds-muets-aveugles de naissance, à savoir la préservation en Afrique des intérêts de la France, cette puissance européenne en voie de sous-développement. Et le sous-préfet d’Abidjan, Alassane Dramane Ouattara de renchérir, toute honte bue : « Nous avons l’ambition de faire de la Côte d’Ivoire un État plus moderne. Et ces notions du passé qui sont dans une certaine presse ne nous intéressent point du tout. Nous sommes fiers de notre souveraineté et nous ferons en sorte que la Côte d’Ivoire soit un pays ouvert sur tous les pays du monde ». Fiers, évidemment, comme au temps du vieux nègre et la médaille de Ferdinand Léopold Oyono.
Visiblement, les responsables de la France négrière, colonialiste et néocolonialiste, flanquée de ses agents négationnistes, supplétifs et commissionnaires en service dans les différentes sous-préfectures d’Afrique veulent nous faire prendre des vessies crevées pour des lanternes. Sinon, comment comprendre qu’ils affirment du bout des lèvres qu’il n’y aura plus d’ingérence militaire directe dans les affaires intérieures des pays africains alors que la métropole continue de maintenir des bases militaires dans ce qu’on appelle abusivement États africains ? Qui ne se souvient pas des élections truquées au Togo, au Burkina Faso, au Gabon, en Centrafrique, au Congo Brazzaville et au Cameroun ? Cette France n’est-elle pas intervenue dans les affaires intérieures de la Côte d’Ivoire sous le masque mal ajusté de la résolution 1975 de l’Onu qui la rendait paradoxalement plus visible ? N’avait-elle pas sauvé in extremis, il y a un plus de 5 ans une dictature sortie des urnes au Tchad ? Ce cas mérite que l’on s’y attarde un peu pour montrer la duplicité des autorités françaises dont l’objectif géopolitique, géostratégique et géo-économique est le maintien de l’influence de ce pays si loin et si proche de nous.
En effet, dès les premières heures de la matinée du 13 avril 2006, les populations de la ville de N’Djamena avaient été réveillées par des coups de feu qui marquaient l’entrée dans la capitale politique du Tchad, des hommes de Mahamat Nour, leader du Front uni pour le changement (Fuc), que les autorités tchadiennes accusaient d’être soutenus par le Soudan avec lequel elles venaient de rompre toute relation diplomatique.
D’après plusieurs sources, cette attaque de N’Djamena survenait après celles des localités situées dans l’Est et le Sud Est du pays, notamment les villes d’Adré, de Koukou, de Harez Mangueigne, qui avaient été assiégées par les rebelles pendant plusieurs heures. C’est grâce au soutien de la France que les forces régulières, restées fidèles à Idriss Deby Itno, président de la République du Tchad, avaient repris le contrôle de la situation.
Cette tentative de prise de pouvoir par les armes, qui était en ce moment-là la dernière en date en Afrique noire, avait été unanimement condamnée par plusieurs chancelleries et par les instances internationales parmi lesquelles l’Organisation des Nations unies (Onu), l’Union africaine (Ua) et, bien entendu, la France qui, par principe, condamnent toute prise de pouvoir par les armes.
Faut-il le souligner, en condamnant les coups d’État, la communauté internationale faisait - et continue de faire d’ailleurs - des élections la voie royale pour accéder au pouvoir suprême, mieux pour l’alternance politique. Il s’agit, pour reprendre les mots de Norbert Elias, d’une autre manière de moraliser ou de civiliser les mœurs politiques. Mais les coups d’État sont-ils toujours mauvais ? Dans des circonstances particulières et spécifiques, la prise du pouvoir par les armes n’est-elle pas un mal nécessaire ?
Sachant que tous les détenteurs du pouvoir politique tendent à en abuser au détriment des citoyens démunis et sans défense, l’Église catholique qui ne souhaite pas l’usage de la force armée pour régler des différends politiques indique cependant dans le Catéchisme de l’Église catholique, cité par Christian Cardinal Tumi dans son récent ouvrage (1), cinq conditions qui, réunies, pourraient justifier une résistance armée à l’oppression politique. Ces conditions sont les suivantes :
«  1. La violation des droits fondamentaux des citoyens doit  être certaine, grave et prolongée ;
2. Tous les autres recours doivent être épuisés ;
3. Il ne faut pas provoquer des désordres pires ;
4. Il faut qu’il y ait un espoir fondé de réussite ;
5. Il faut qu’il soit impossible de prévoir raisonnablement des solutions meilleures. »

Certes, on peut rétorquer à juste titre que dans l’histoire des civilisations humaines, les précédents heureux sont rares. Si très souvent et pratiquement partout dans le monde les putschistes en armes ont fini plus corrompus que les démons civils qu’ils étaient venus exorciser (Ibrahim Maînassara, Robert Guei, François Bozize, Blaise Compaoré, Idris Déby Itno, Denis Sassou Nguesso, Idi Amine Dada, Mobutu Sese Seko, Jean Bedel Bokassa, Moussa Dadis Camera, etc.), ce serait une erreur de méconnaître le bien fondé et la force libératrice de certains coups d’État.
Étant donné que, comme le souligne le philosophe camerounais Anatole Ayissi,  « la grandeur morale d’un coup d’État, lorsque les circonstances et l’histoire le consacrent comme correct, tient de son pouvoir libérateur des peuples opprimés et/ou en voie de suicide politique », il est indéniable que nous avons assisté en Afrique, au début des années 90, à certains coups d’État que nul ne peut éthiquement rejeter. C’est celui perpétré en mars 1991 par Amadou Toumani Touré (Att) et ses compagnons d’armes. Ce coup de force salvateur avait renversé le général Moussa Traoré et avait jeté les bases d’une véritable alternance politique au Mali. De même, après les putschs perpétrés en Guinée et au Niger, les militaires ont favorisé l’instauration de régimes démocratiques dans ces pays. Tout comme nous ne saurons reléguer aux oubliettes de notre conscience les bienfaits du coup d’État perpétré par Jerry Rawlings au Ghana, pays aujourd’hui présenté comme l’un des fleurons de la démocratie en Afrique.

Démocratie

On doit cependant reconnaître que si les pays occidentaux condamnent la prise du pouvoir par les armes, c’est parce que l’enracinement de la démocratie dans ces sociétés s’est traduit par la mise sur pieds d’institutions solides réalisant les conditions d’une alternance politique par la voie des élections. Combien de pays africains peuvent-ils s’enorgueillir d’avoir des institutions suffisamment solides pour garantir une véritable alternance politique qui permettraient d’éviter les révolutions de palais ? En dehors de l’Afrique du Sud, du Ghana, du Bénin, du Mali et dans une certaine mesure du Sénégal, (presque) tous les autres pays africains ne sont-ils pas de véritables poudrières?
C’est dire s’il ne suffit pas de condamner par principe les coups d’État pour les exorciser, étant entendu que les coups de force sont symptomatiques d’une crise politique profonde. Il urge par conséquent d’agir sur les causes, les conditions et les situations qui les favorisent.
Sans doute l’une des causes est la privatisation et la mise en jachère de l’État et « la transformation de l’espace public en arène féroce où ne peut par conséquent prospérer que le langage du vice institutionnalisé et de la force débridée- à l’instar de la désespérante répétition des coups de force militaires » (Anatole Ayissi), coups de force ayant atteint ces dernières années des pays jusque-là réputés « tranquilles et stables » à l’instar de la Côte d’Ivoire.
L’autre cause est l’absence de volonté politique, de transparence dans la gestion des biens publics et le désir des régimes en place de s’éterniser au pouvoir par tous les moyens, notamment par l’organisation d’élections entachées de nombreuses irrégularités qui leur assurent en plus de la pérennité au pouvoir, le contrôle des richesses nationales.
L’exemple du Tchad susmentionné n’est-il pas très proche de cette description. En sommes-nous si éloignés au Cameroun ? Dans notre Afrique en miniature, toutes les conditions sont réunies pour susciter un mécontentement général. Entre autres : la modification, en mars 2008, de la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996  afin de permettre au monarque présidentiel Paul Biya de briguer un autre mandat en octobre 2011 ; les élections truquées, l’absence de dialogue républicain entre le chef de l’État et les leaders politiques et d’opinion, la confiscation du pouvoir par une seule ethnie, l’ethnie du ventre ; l’absence d’une armée républicaine, et comme pour narguer ses compatriotes, le maintien de la date de l’organisation d’une élection dont les résultats sont connus d’avance, et ce malgré les voix qui s’élèvent pour non seulement décrier l’absence de consensus sur la question électorale et sur Elecam, organisme supposé indépendant et chargé de gérer le processus électoral au Cameroun, mais aussi pour dénoncer la stratégie jusqu’au-boutiste d’un chef de l’État vieillissant qui s’accroche au pouvoir comme un naufragé s’accroche sur un radeau à la dérive. Tout cela, depuis 30 ans, avec la bénédiction, faut-il le répéter quitte à choquer, de la communauté des intérêts dite communauté internationale et de la France négrière, colonialiste et néocolonialiste dont les représentants officiels affirment du bout des lèvres, sans convaincre les caciques du régime en place, qu’ils n’ont pas de candidat à la présidentielle 2011, tout en voulant maintenir son influence dans la sous-région Afrique centrale, et applique en Afrique la politique de deux poids deux mesures.
Pour justifier son intervention aux côtés des forces régulières tchadiennes, la France avait cité les accords de coopération militaire signés avec le Tchad en 1976. Cette justification n’était en réalité qu’un alibi car, malgré l’existence d’un pacte de défense entre la Côte d’Ivoire et la France, pacte qui a favorisé l’installation à Port-Bouet de la 43e Rima dont la mission est de défendre la Côte d’Ivoire en cas d’agression extérieure, la même France a choisi de jouer la carte de la « neutralité » pendant qu’une partie du territoire ivoirien tombait sous la coupe des forces rebelles, rebaptisées forces nouvelles soutenues par la France et certains pays voisins du pays des éléphants.
En clair, même si depuis quelque temps les régimes autocratiques et dictatoriaux qui ont mis plusieurs décennies au pouvoir sont voués aux gémonies par les autorités françaises, il reste que l’objectif pour cette puissance coloniale et néocoloniale reste et demeure de placer à la tête de ses états-sous-préfectures d’Afrique des dictateurs sortis des urnes qui lui sont totalement acquis ; États qui ont toujours été considérés comme une chasse gardée qu’elle ne voudrait aucunement perdre compte tenu des tentatives d’infiltration des États-Unis d’Amérique, de la Chine, du Brésil et de certains pays émergents. Le président et patriote  Laurent Gbagbo aujourd’hui séquestré au nord de la Côte d’Ivoire, l’a appris à ses dépens, lui qui a tenté de décoloniser ou d’émanciper l’économie ivoirienne en l’ouvrant à la concurrence.
(1)Christian Cardinal Tumi, Ma foi : un Cameroun à remettre à neuf, Douala, Véritas, 2011, p. 145-146.
(2) Anatole Ayissi, « Illusoire interdiction des coups d’État », Manière de voir, n° 51, Mai-Juin 2000, pp. 32-34.

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